A Lanzarote, le jardin de cactus est une œuvre végétale de César Manrique qui s’intègre parfaitement dans les paysages naturels de l’île. L’exotisme de cette végétation piquante, plantée dans un insolite écrin volcanique, exerce une fascination certaine sur la plupart des visiteurs. Petit tour d’horizon de ce jardin d’exception.
LE JARDIN DE CACTUS EN BREF
📍 Localisation : à Guatiza, dans le nord-ouest de Lanzarote.
🚶 Durée totale : 1h en moyenne (de 1/2h minimum à 2h, voire plus selon les goûts).
⭐ Intérêt principal : les cactus dans toute leur splendeur, de toutes les formes, toutes les dimensions, et avec des fleurs de toutes les couleurs !
🎒 Niveau : un peu de marche sans aucune difficulté.
🕒 Meilleure saison : douceur toute l'année !
Avec ces 4500 spécimens de cactus, issus de 1400 espèces différentes provenant des cinq continents, César Manrique a réussi le tour de force de faire de ce jardin exceptionnel l’un des plus réputés de la planète.
Le jardin de cactus et le volcan Montaña Tinamala
Le jardin de cactus et le volcan Montaña Cobrada
Pour donner naissance à ce site épatant, Manrique a jeté son dévolu sur une ancienne zone agricole qui avait été laissée à l’abandon au fil des années. Située dans un joli cadre naturel, aux pieds des cratères et au milieu des roches volcaniques, il l’a réhabilitée avant d’y faire prospérer ces innombrables variétés de cactus. Son éternel objectif était alors atteint : relier l’art et la nature de la manière la plus harmonieuse qui soit.
Ce jardin magistral, qui constitue une véritable œuvre d’art, s’intègre donc parfaitement à son environnement naturel et volcanique.
Le sol est recouvert de picòn, cette fameuse cendre volcanique, et comporte quelques petits bassins où flottent des nénuphars et nagent de gros poissons rouges.
Dans ce sanctuaire paisible règnent le calme et la sérénité. Les cactus prennent toutes les formes possibles, mais aussi toutes les couleurs imaginables lorsqu’ils sont en fleurs.
Il faut déambuler tranquillement dans ces allées pour mieux s’imprégner de l’atmosphère poétique créée par ces cactées en tous genres. Comme de nombreux visiteurs, nous avons été touchés par la magie qui se dégage de ce site atypique.
Au fond du jardin, un vieux moulin domine le site. Parmi les différentes variétés de cactus qui prospèrent à ses pieds, mentionnons le coussin de belle-mère, au nom si explicite…
Le fameux coussin de belle-mère…
Infos pratiques
Entrée : horaires et prix
Le jardin de cactus est ouvert tous les jours de 10h00 à 17h00 (dernière entrée à 16h30), 365 jours par an.
Adultes : 8,50 euros – Adultes en situation de handicap : 6 euros
Enfants : 4,25 euros – Enfants en situation de handicap : 3 euros
Commodités
Le site est doté d’un vaste parking.
A l’intérieur, il y a une cafétéria qui sert à manger et à boire à des tarifs corrects : voir le menu.
A noter que deux œuvres de Manrique décorent les toilettes, pour distinguer celles des femmes de celles des hommes.
L’entrée des toilettes hommes…
… et celle des toilettes femmes.
Localisation
Le jardin de cactus est situé dans le nord-ouest de l’île à Guatiza, qui dépend de la municipalité de Teguise, bien que cette ville soit située à 15 minutes de là.
Costa Teguise est également à 15 minutes, Arrecife à 20 minutes, Puerto del Carmen à 30 minutes.
Que visiter aux alentours ?
Juste à côté du jardin de cactus est situé un lieu naturel époustouflant, auquel nous avons consacré un article à part entière : Los Roferos, encore appelé Stratified City.
Depuis le jardin de cactus :
En voiture : 5 minutes.
A pied : 50 minutes à 1 heure.
Le jardin de cactus a été conçu en amphithéâtre
Grâce à d’innombrables variétés de cactus et un environnement naturel d’origine volcanique, César Manrique a réussi le tour de force de constituer à Lanzarote l’un des jardins de cactus les plus réputés de la planète. La magie qui se dégage des lieux fait de ce site atypique une escale incontournable pour qui visite cette si belle île.
Le jardin de cactus en images
Et encore quelques photos : car c’est vraiment trop difficile de s’arrêter de photographier ces jolies plantes, quand on déambule dans les allées de ce jardin d’exception…
Réputé pour son calme et sa douceur de vivre, Arrieta est un petit village côtier qui a une âme. Peu touristique en dehors de la saison estivale, sa situation est idéale pour s’y poser quelques jours : cela permet de rayonner dans tout le nord de l’île, qui ne manque pas de sites intéressants à visiter. Avec ses plages agréables et ses excellents restaurants, ce charmant petit village constitue une halte incontournable.
Souvent appelée le chalet Juanita en français, cette bâtisse singulière est à Arrieta ce que la tour Eiffel est à Paris ! C’est-à-dire son symbole.
La Casa Juanita, sa plage et sa piscine naturelle
Derrière cette étrange maison colorée se cache une histoire tragique, celle de la petite Juanita.
Casa Juanita
Atteinte de tuberculose au début du XXe siècle, ses médecins préconisèrent une cure en bord de mer. Ils pensaient que respirer abondamment l’iode marin aurait des conséquences favorables sur sa santé.
Casa Juanita
En 1916, ses parents fortunés lui firent donc construire en bord de mer cette demeure qui porte son nom. Pour l’architecture, ils s’inspirèrent tout simplement de la maison de sa poupée.
Malheureusement, cinq ans plus tard, la maladie finit par emporter Juanita à l’âge de dix-sept ans. Elle fut enterrée dans le village voisin de Haría, où elle repose toujours.
Casa Juanita
Aujourd’hui, la maison appartient à une famille d’Arrecife qui, paraît-il, la loue de temps en temps…
Les plages
La plage de la Garita
Lorsqu’on arrive à Arrieta par le sud, la première vision que l’on a du village est celle de sa longue plage de sable fin faisant face à l’océan. C’est la plage de la Garita.
La plage de la Garita borde le village d’Arrieta
Avec ses huit cents mètres de long, elle est réputée assez calme car elle est abritée des vents dominants qui soufflent sur l’île. L’océan s’y déchaîne donc rarement.
Tout au bout de la plage, côté village, il y a une jetée très prisée des enfants et des ados car elle offre la possibilité de faire des plongeons dans la mer.
La Garita
Le climat étant doux tout au long de l’année à Lanzarote, on peut se baigner à la Garita à n’importe quelle période, comme partout sur l’île.
La plage de la Casa Juanita
Située aux pieds de la fameuse Casa Juanita, cette plage est déjà toute petite mais en plus, elle subit un peu la variation des marées. L’eau y est extrêmement calme puisqu’une digue, prolongée par une rangée de gros rochers, ferme quasiment l’accès à la mer. C’est ce qui fait de cet endroit une jolie petite piscine naturelle, particulièrement adaptée aux familles.
La petite plage de Casa Juanita et sa piscine naturelle
La balade dans le village
Acculé entre les volcans et l’océan, Arrieta est un petit village de pêcheurs qui fut construit sur une coulée de lave.
Arrieta les pieds dans l’eau
L’un de ses gros points forts, c’est qu’il est peu touristique, en dehors de la saison estivale.
On peut donc s’y balader en toute tranquillité, et cette découverte du village à pied est rapide : en prenant son temps, la balade dure une quinzaine de minutes.
Elle démarre de l’une des deux extrémités du village, c’est-à-dire soit de la plage de la Casa Juanita, soit celle de la Garita. Dans les deux cas, il y a un parking naturel pour garer la voiture.
Arrieta
Chaque matin, les pêcheurs partent en mer et à leur retour, on peut voir les restaurateurs du village venir s’approvisionner avec la pêche du jour. De la mer à l’assiette, ici, la fraîcheur est garantie.
La rue principale est justement colonisée par une dizaines de restaurants, dont certains sont réputés. La plupart d’entre eux offrent une terrasse face à la mer.
Il y a aussi la possibilité de flâner dans ces jolies petites ruelles qui font le charme d’Arrieta.
En faisant un court détour en direction de l’intérieur des terres, on peut visiter le musée de l’aloe vera, à l’entrée du village.
Il y en a trois autres identiques sur l’île (à Punta Mujeres, Yaiza et Teguise, ainsi qu’un dernier sur l’île voisine de la Graciosa).
Le musée de l’aloe vera d’Arrieta
La balade se termine à la plage de la Garita ou à celle de Casa Juanita, en fonction du sens choisi.
La petite piscine naturelle de Casa Juanita, sur fond de volcans
Infos pratiques
La Casa Juanita
Parking
S’il n’y a plus de places dans les petites rues à proximité, on peut se garer sur le parking qui fait face à la mer et à la Casa Juanita, dans une sorte de terrain vague.
Où manger ? La bonne adresse…
A trente mètres de la jetée qui fait face à la Casa Juanita se trouve le minuscule restaurant El Pisquito.
Il ne comporte pas de salle : on mange exclusivement dehors, sur une petite terrasse qui domine la mer. Les prix sont bon marché, la nourriture délicieuse, le personnel adorable.
La petite adresse parfaite, à tel point qu’elle est vite devenue notre cantine.
Attention : il vaut mieux réserver, y compris en basse saison. Sinon, il y a d’autres restaurants à proximité..
Le resto el Pisquito
La plage de la Garita
Parking
Là aussi, la plage est dotée d’un vaste parking naturel.
Commodités
La plage de la Garita est dotée de WC et de douches.
Où manger ?
La Casa de la Playa est un restaurant très agréable, posé sur la plage.
La nourriture y est délicieuse, les prix très corrects et la vue sur la mer parfaite.
La Casa de la Playa
Arrieta
Le musée de l’aloe vera
Possibilité de ramener une foule de cadeaux et de souvenirs, dérivés non seulement de cette plante, mais aussi des roches volcaniques, de la vigne etc.
Si vous souhaitez photographier le coucher du soleil ou dîner face à lui, vous êtes du mauvais côté de l’île ! Ici, le soleil se lève derrière la mer mais se couche à l’opposé, derrière les volcans.
Que visiter dans les environs ?
Les sites intéressants ne manquent pas dans le nord de l’île.
Depuis Arrieta, voici les temps approximatifs de trajets :
Cueva de los Verdes et Jameos del Agua : 7 minutes.
Mirador del Rio : 15 minutes.
Haria : 10 minutes.
Jardin de cactus : 8 minutes.
Arrieta est un petit village de pêcheurs authentique, avec beaucoup de charme et qui se visite paisiblement. Idéalement placé, il permet en plus de découvrir les principaux sites touristiques du nord de l’île. C’est donc un village à ne pas rater.
Los Roferos est un site qui permet d’admirer de somptueux paysages naturels, composés de formations rocheuses aux formes tourmentées sur fond de volcans. Niché dans le nord de Lanzarote, il est facile d’accès et n’est pas encore surfréquenté. Par endroits, on se croirait carrément dans l’ouest américain.
Photos, description, infos pratiques, voici tout ce qu’il faut savoir pour profiter au mieux de ce site méconnu mais, selon nous, incontournable.
Les formations rocheuses de Los Roferos
Notre visite sur ce site étonnant s’est déroulée un jour où la lumière du soleil jouait à cache-cache entre les nuages. Pas l’idéal pour les photos, j’ai donc décidé d’y revenir le lendemain matin très tôt, au lever du soleil, pour essayer de faire de meilleures images. Je me suis alors retrouvé tout seul pendant plus d’une heure face à des panoramas de toute beauté.
Stratified City et le volcan Montaña de Guenia
Quand le soleil levant éclaire le site de sa lumière chaude, le paysage s’enflamme brusquement. Les différentes formations rocheuses aux formes énigmatiques (colonnes, arches et petites grottes) se mettent alors à rougeoyer. Ce panorama est d’une beauté sauvage qui ne laisse pas insensibles les amoureux.ses de la nature.
Le volcan Montaña de Guenia
Comment ce site atypique s’est-il créé ?
A l’origine, Los Roferos, qu’on appelle également Stratified City, était une carrière d’extraction de roches, celles avec lesquelles sont construites les maisons de l’île. Au fil du temps, la carrière a fini par péricliter et être abandonnée. L’activité minière avait déjà commencé à creuser ces formations rocheuses, et la nature a fini le travail grâce à la pluie, au vent et à son activité permanente d’érosion.
Le volcan Montaña de Tinaguache, sous une arche de Stratified City
Aujourd’hui encore, la nature continue à façonner les paysages de ce site atypique. Particulièrement photogénique et sans doute très instagramable, Stratified City n’est pourtant pas encore pris d’assaut par les touristes même si, en haute saison (juillet – août), il vaut quand mieux y aller tôt le matin si l’on veut être tranquille.
Se balader au milieu de ces curieuses formations rocheuses face à des volcans majestueux laisse un souvenir impérissable.
Le volcan Montaña de Tinaguache
Conseils pratiques
Pour les photographes
Le site est déjà photogénique sous la lumière brute de la mi-journée mais pour le photographier dans les meilleures conditions, il faut impérativement venir au lever ou au coucher du soleil. C’est à ces moments-là, pendant les fameuses golden hours, qu’il se présente sous sa plus belle lumière.
En arrivant, garez bien votre voiture à côté de la route et non pas à coté des formations rocheuses. Sinon, en fonction des photos que vous prendrez, vous risqueriez d’avoir votre véhicule dans votre champ de vision…
La boulette : garer sa voiture en plein dans le champ de la photo
Commodités
Un parking naturel borde le site, le long de la route.
Il n’y a pas d’autres commodités.
Accès
Stratified City se situe juste au bord de la route (la LZ-404).
Lorsqu’on arrive à hauteur du site, on ne peut pas le rater car on aperçoit les formations rocheuses depuis la voiture : c’est qu’on est arrivé.
Le prix
L’entrée est gratuite, le site est en accès libre.
Quelle durée prévoir ?
Le site se visite assez rapidement. On peut y passer quelques minutes comme une bonne heure, voire plus si l’on veut faire le tour de toutes les formations rocheuses, en prenant le temps de les photographier et de les admirer.
Quand visiter le site ?
Le conseil précédent vaut également pour tous les visiteurs : le meilleur moment pour admirer les lieux, ce sont les premières et les dernières lueurs du jour, car ce sont les deux moments de la journée où les couleurs sont de loin les plus belles.
L’autre avantage, c’est qu’à ces moments-là, surtout tôt le matin, le site est vide de touristes : on peut alors profiter des lieux tout seul.
Les différents noms du site
Vous pouvez trouver différents noms qui désignent tous ce seul et même site : Stratified City, Los Roferos (qui vient de rofe, le nom des pierres qui étaient extraites du site), Ciudada Estratificada, Antigua Rofera de Teseguite…
Que voir autour de Los Roferos ?
Si Los Roferos vous plaît, alors vous pourriez tomber sous le charme d’un autre site naturel d’origine volcanique, lui aussi façonné par l’érosion au fil des millénaires : Las Grietas (qui signifie les fissures). Il est situé à environ 20 km et 20 minutes de Los Roferos.
Le site se trouve dans l’ouest de l’île et il est accessible relativement rapidement depuis à peu près tous les points de l’île : l’une des villes les plus éloignées du site, Playa Blanca, n’est qu’à 45 minutes.
Pour les autres villes principales, Puerto del Carmen est à 25 minutes, Arrecife à 20 minutes, Haria à 15 minutes et Teguise à 5 minutes.
Pour résumer, Los Roferos est un site naturel atypique qui offre des paysages sublimes et fascinants. Ne faisant généralement pas partie des circuits touristiques, il est encore peu fréquenté pour l’instant. C’est pourquoi il faut vite en profiter avant que le secret ne se répande…
Couverte de champs de lave, de cratères et de falaises qui plongent dans l’océan, Lanzarote est une île qui a été façonnée par un volcanisme intense. La nature y a créé des paysages sauvages et atypiques, parfaits pour explorer l’île sous son visage le plus brut et le plus spectaculaire. Voici notre sélection des sites les plus étonnants…
LANZAROTE EN BREF...
🗺️ Ce que vous verrez : des couloirs de lave, un littoral déchiqueté, une lagune colorée, des points de vues saisissants...
🚗 Accès : facile en voiture.
🎒 Niveau : facile, peu de marche.
⭐ Ce qui rend l’île incontournable : hors saison, l'avion n'est pas cher, il fait doux toute l'année et les paysages naturels sont époustouflants.
Imaginez le cratère d’un ancien volcan qui émerge d’une mer profondément bleue. Ses parois sont marron-orangé et un lac vert repose au fond, cerné par une plage de sable noir. Et bien vous ne rêvez pas, ce paysage étonnant et inhabituel existe : il s’appelle Charco de los Clicos.
Charco de los Clicos : el Lago Verde
Avant d’accéder à ce panorama atypique, il ne faut pas rater le minuscule détour par le mirador El Golfo. Il permet d’admirer la plage du même nom, constituée de sable noir volcanique.
La plage el Golfo vue depuis le mirador
Ensuite, quand on arrive à la lagune, on est saisi par sa couleur verte qui présente un gros contraste avec le noir de la plage volcanique.
Pourquoi la lagune est-elle verte ?
Pour commencer, la présence de la lagune à cet endroit est due aux infiltrations de l’eau de mer au fond de l’ancien cratère. Puis peu à peu, elle a été colonisée par des algues : ce sont elles qui lui ont donné cette couleur verte.
El Lago Verde
Ce site a de véritables airs de bout du monde. Bien qu’exposé aux vents et aux embruns, son panorama sublime respire le calme et la sérénité.
Pour parfaire la visite, on peut aller se régaler dans l’un des excellents restaurants du petit village voisin, El Golfo, posé à 600 mètres de là (voir les conseils pratiques ci-dessous).
Conseils pratiques
Le prix
L’accès au site est gratuit mais le chemin est balisé, on ne peut pas aller jusqu’à la lagune pour s’y baigner par exemple, le but étant de préserver cet espace naturel unique.
Commodités
Le site est doté d’un parking gratuit, en bordure de la route LZ-703.
Accès au site
Le mirador El Golfo qui domine la plage est situé à droite du parking. A quelques mètres de là démarre le chemin très court (moins de cinq minutes de marche) qui mène au point de vue sur El Charco de los Clicos et sa lagune verte.
Quelle durée prévoir ?
Le temps de visite est globalement court. Même en prenant son temps, il est peu probable qu’il dépasse la demi-heure même si, évidemment, on peut flâner sur place autant qu’on veut.
Ce gain de temps permet donc, soit de visiter d’autres sites dans cette zone de l’île (Los Hervideros par exemple), soit d’aller prendre un verre et/ou manger un morceau face à la mer à El Golfo, à 600 mètres de là.
Comment parfaire l’expérience ?
El Golfo est un village doté de nombreux petits bars et restaurants, qui ont tous les pieds dans l’eau. Nous avons testé le restaurant Bogavente et nous le recommandons fortement : terrasse exceptionnelle, cuisine délicieuse, service sympa, prix contenus (20 à 40 euros le repas complet). Du coup, le rapport qualité-prix est excellent.
Sangria au resto Bogavente
Le resto Bogavente
Localisation
Charco de los Clicos est situé dans le sud-ouest de l’île : à 15 minutes de Playa Blanca, à 25 minutes de Puerto del Carmen, à 30 minutes d’Arrecife et de Teguise.
Charco de los Clicos et El Golfo en images
LAS GRIETAS
Las Grietas signifie les fissures en espagnol. Lorsqu’on arpente les failles de ce site très nature et atypique, on ressent une atmosphère particulière, emprunte de mystère.
Las Grietas
La première fissure est aussi haute qu’étroite.
Par endroits, elle dépasse parfois les cinq mètres de haut alors qu’en largeur, elle se resserre considérablement, laissant péniblement passer les humains.
Au fil de la progression, il faut donc carrément se contorsionner pour pouvoir franchir certaines zones, ce qui procure une petite sensation d’aventure.
Les rayons du soleil se fraient un chemin comme ils peuvent jusqu’au fond de ces petites failles, mettant en valeur les stries naturelles des parois.
Au fil de la journée et de l’évolution de la lumière, les couleurs peuvent varier, rendant le site particulièrement photogénique (même si, le jour de notre visite, la lumière était le plus souvent voilée).
L’un des gros avantages du site, c’est qu’il a su rester authentique. Car contrairement à bien d’autres lieux à visiter sur Lanzarote, il n’y a aucun aménagement, aucun guichet, aucune barrière, aucune contrainte : le site a su rester 100% nature, on peut se balader où l’on veut, comme on veut, quand on veut, ce qui change de certaines visites très (trop ?) encadrées sur l’île. Une raison de plus pour aller le visiter.
Comment ce site atypique s’est-il créé ?
Les fissures dégoulinent des flancs d’un volcan, la Montaña Blanca. Elles sont tout simplement le fruit de l’érosion ainsi que de l’action du vent et de la pluie sur la lave solidifiée, au fil du temps.
Conseils pratiques
Le prix
L’entrée est gratuite, le site est en accès libre.
Commodités
Un assez grand parking naturel gratuit est disponible sur le bord de la route (la LZ-35).
A partir de là, il faut marcher sur le chemin pendant quelques minutes pour arriver à la première fissure.
Quelques généralités
Chaussures : il est préférable de porter des chaussures fermées car certains endroits sont assez glissants au fond des fissures, même en chaussures de rando. Alors en tongs…
Fréquentation : s’il y a un peu trop de monde à votre goût lorsque vous arrivez dans la première fissure, ne vous y engagez pas et rendez-vous directement dans la deuxième ou la troisième, situées juste derrière : elles sont sensiblement moins fréquentés alors que tout le monde se précipite sur la première.
Le vent : éviter de visiter le site par temps venteux car le sable voltige dans les fissures, ce qui peut devenir gênant.
S’y rendre en début ou en fin de journée : il y a moins de monde, et la lumière est plus photogénique.
Quelle durée prévoir ?
Le site se visite assez rapidement. 45 minutes voire une heure seront largement suffisantes pour la plupart des visiteurs et visiteuses, en incluant les 15 minutes de marche aller – retour, du parking aux fissures.
Localisation
Las Grietas jouit d’un emplacement plus ou moins central sur l’île, légèrement sud, ce qui lui permet d’être accessible assez rapidement de presque tous les endroits de l’île.
Ainsi, Puerto del Carmen et Arrecife sont à 10 minutes, Teguise à 15 minutes et Playa Blanca à 25 minutes.
Las Grietas en images
LE MIRADOR DEL RIO
Le Mirador del Rio est un belvédère situé au sommet d’une falaise, 500 mètres au-dessus de la mer. Sa terrasse panoramique offre une vue à couper le souffle sur la jolie petite île voisine de la Graciosa et sur El Rio, ce petit bras de mer qui la sépare de Lanzarote.
L’ile de la Graciosa vue depuis le mirador del Rio
La Graciosa est une toute petite île volcanique sauvage, peu habitée, et dont les plages de sable blanc se détachent parfaitement sur la mer d’un bleu profond. La vue panoramique à 180° a un côté sidérant, que les photos ne peuvent restituer.
Malgré ses dimensions réduites (8 km de long par 4 km de large), l’île de la Graciosa compte sur ses terres pas moins de cinq volcans.
Le volcan Montaña Amarilla, sur La Graciosa
Situé tout au nord de Lanzarote, le mirador del Rio fait partie de l’œuvre de César Manrique, le fameux artiste à la fois local et international. Ce site s’inscrit dans son travail sur l’intégration de l’art dans la nature. A Lanzarote, ce lieu magnifique est incontournable.
A l’intérieur de cette œuvre architecturale renommée et parfaitement intégrée à l’environnement, on trouve une sculpture de Manrique, un bar-restaurant dont les tables donnent sur des fenêtres panoramiques hypnotiques, ou encore un escalier en colimaçon réputé…
Vue sur les volcans de Lanzarote
Infos pratiques
Prix et horaires d’ouverture
Le prix : 8,50 euros par adulte et 4,25 euros par enfant.
Horaires d’ouverture : 10h00 – 16h40
La cafétéria et le magasin ferment à 16h50.
Quand faut-il visiter le site ?
Idéalement, il faut s’y rendre par beau temps. Si la météo n’est pas optimale, il est préférable d’attendre le lendemain car c’est par beau temps que la vue est vraiment exceptionnelle.
Commodités
Il y a un parking gratuit à cent mètres du mirador.
A l’intérieur de ce dernier, il y a toutes les commodités : toilettes, magasin de souvenirs, bar, restaurant…
Peut-on faire l’impasse sur le mirador del Rio ?
Pour être honnête, oui ! En effet, bien que le Mirador del Rio nous semble incontournable, si seule la vue vous intéresse, alors sachez que vous pouvez très bien faire l’impasse sur le mirador : il y a différents points de vues quasi-identiques et entièrement gratuits accessibles depuis la route LZ-202, situés juste à gauche du mirador.
Il y a même un autre mirador, le Mirador de Guinate qui lui est gratuit, situé deux kilomètres après le Mirador del Rio. Après une descente en virages, on se retrouve sur une petite route trop étroite pour que deux véhicules puissent se croiser. Il faut alors guetter une petite impasse sur la droite. Là, on se gare sur un parking gratuit. Et ici aussi, de cet autre mirador, la vue est somptueuse.
La vue sur La Graciosa depuis le mirador de Guinate
Faire une rando jusqu’au Mirador del Rio
Un chemin de randonnée comportant des vues éblouissantes existe entre Orzola et le Mirador del Rio.
Nous ne l’avons pas testée mais pour plus d’infos, et pour télécharger la trace GPX : VisoRando Lanzarote
Que voir aux alentours ?
Le plus beau site à visiter alentour est justement la petite île de la Graciosa.
Pour s’y rendre, il faut prendre le bateau depuis la petite ville d’Orzola, située à 3 kilomètres du Mirador del Rio à vol d’oiseau, mais à 10 kilomètres par la route !
Deux compagnies assurent la traversée, Lineas Maritimas Romeo et Biosfera Express. Elles alternent les départs, ce qui offre aux touristes une multitude d’horaires quotidiens.
Durée de la traversée : 25 minutes.
Prix de la traversée : 60 euros en moyenne (le tarif varie fortement suivant la saison : entre 30 et 120 euros l’aller-retour).
Attention : les ferries ne prennent pas les voitures. Il faut en louer une sur l’île de La Graciosa ou, mieux encore, un vélo (électrique ou pas mais attention, il y a du dénivelé et du sable).
Localisation
Le Mirador del Rio est situé à l’extrême nord de l’île.
Il est situé à 15 minutes d’Haria, à 35 minutes de Teguise et Arrecife ou encore à 45 minutes de Puerto del Carmen.
LE TUNNEL DE LAVE
Pour commencer, il faut remonter à l’éruption du mont Corona, il y a plus de 4000 ans. Le volcan cracha un tel volume de lave qu’elle atteignit une épaisseur de 400 mètres !
Pendant que la croûte extérieure de l’un des torrents de lave séchait, la roche en fusion continuait à s’écouler à l’intérieur. Bien plus tard, quand la source de lave se tarit à la fin de l’éruption, elle laissa la place à cet immense tube volcanique : 8 kilomètres de long, dont plus d’un kilomètre est entièrement immergé sous l’océan.
Deux portions de ce tunnel peut être visitées : légèrement à l’intérieur des terres, La Cueva de los Verdes et à proximité de la mer, Los Jameos del Agua. Voici une description détaillée de ces deux merveilles de la nature.
La Cueva de los Verdes
Cette première portion du tube de lave est aménagée pour qu’on puisse la visiter à pied (la grotte ne peut pas se visiter seul et sans guide).
Le groupe au début de la visite
La longueur du tunnel est d’environ un kilomètre, sa hauteur atteint au maximum les 50 mètres et sa largeur les 15 mètres.
Mais à l’inverse, on doit se baisser par endroits pour pouvoir traverser les parties les plus étroites du couloir.
L’aménagement de ce couloir de lave fut confié en 1960 à Jesús Soto, un artiste vénézuelo-français. Il y apporta le moins de modifications possible afin de conserver au maximum l’ambiance naturelle des lieux. Ses aménagements furent donc minimalistes : il conçut un chemin praticable pour les visiteurs (aplanissement du sol, création de quelques escaliers, sécurisation des lieux), et il disposa un éclairage coloré de manière optimale.
Il voulait que ce site sauvage et atypique conserve tout son naturel et toute son authenticité, en lui conférant une ambiance mystérieuse dans un cadre féérique. Et force est de constater qu’une fois à l’intérieur, la magie opère.
Au fil de la progression du groupe, on peut observer les différentes strates de lave ainsi que ses différentes couleurs.
Au-dessus de nos têtes, on aperçoit de minuscules stalactites : ce sont les milliers de gouttelettes qu’elle a laissées sur les parois de la voûte en se solidifiant.
C’est à ce niveau-là que se situe un auditorium, dont les qualités acoustiques sont paraît-il exceptionnelles.
En fin de visite arrive le clou du spectacle.
Le tube de lave est mis en valeur par l’éclairage à cet endroit-là, et à nos pieds se trouve un gouffre tout aussi bien éclairé.
Mais quand la guide demande à un visiteur de jeter un caillou dans cette crevasse, surprise : c’est en réalité un lac dont la surface est au niveau de nos pieds.
Il était si calme qu’il s’était transformé en véritable miroir, et on croyait vraiment qu’il y avait un gouffre sous nos pieds à la place de ce petit lac intérieur.
Ce trompe-l’œil naturel est sidérant et le lieu est de toute beauté.
La visite se termine sur cette partie bluffante du tunnel, le temps de remonter à la surface de la Terre !
Infos pratiques
Horaires d’ouverture
Le site est ouvert de 9h30 à 16h15 tous les jours (365/365)
Attention
Il est obligatoire de réserver en ligne. Sans ça, on ne peut pas entrer.
Aucun billet n'est vendu au guichet.
Il faut s'y prendre un peu à l'avance, surtout en haute saison.
Adultes : 16 euros par personne (11,20 euros si handicap)
Enfants (de 7 à 12 ans) : 8 euros (5,60 euros si handicap)
Enfants (moins de 7 ans) : gratuit.
La sortie de la galerie
Durée de la visite
Elle dure 45 à 50 minutes. On ne peut pas trop flâner en route car les groupes se suivent de près, c’est un peu l’usine…
Services
Stationnement : il y a un vaste parking gratuit à proximité du site.
Toilettes : il est également doté de toilettes (avec tables à langer) mais à l’entrée du tunnel. Il faut donc prendre ses précautions avant de descendre dans les entrailles de la terre !
Restauration : il n’y a rien à manger ni à boire sur place.
Accessibilité
Personnes à mobilité réduite : en raison de sa configuration (certains passages sont très étroits ou très bas), le site n’est pas accessible aux personnes à mobilité réduite.
Claustrophobie : les personnes claustrophobes peuvent se sentir oppressées dans ce site souterrain qui comporte quelques couloirs et escaliers très étroits.
Poussettes : elles ne sont pas admises dans le tunnel.
Animaux de compagnies : ils ne sont pas admis non plus, à l’exception des chiens d’assistance.
Localisation
La Cueva de los Verdes est située tout au nord-ouest de l’île, en bordure de la LZ-205, et à un kilomètres de Los Jameos del Agua.
Pour s’y rendre, il faut 25 minutes depuis Costa Teguise et Teguise, 30 minutes depuis Arrecife ou encore 40 minutes depuis Puerto del Carmen. Et si vous venez de Playa Blanca, à l’extrémité opposée de l’île, alors il vous faudra 1 heure.
La Cueva de los Verdes en images
Los Jameos del Agua
Créé sur un site naturel unique par César Manrique, Los Jameos del Agua est un centre d’art, de culture et de tourisme. Situé dans le même tunnel de lave que la Cueva de los Verdes mais un peu plus loin, il s’agit d’un site étonnant qui met en avant l’insertion harmonieuse de l’art dans la nature, selon les principes chers à l’artiste.
L’action de la nature
Los Jameos del Agua est donc le prolongement naturel du site présenté ci-dessus, La Cueva de los Verdes.
Sur ce second site, une partie de la voûte s’effondra par endroits, créant de grands trous dans le plafond (ce sont ces trous que désigne le mot aborigène Jameos).
Puis l’eau de mer s’infiltra au fil du temps au fond de ce tunnel, créant une sorte de lac intérieur.
Los Jameos del Agua
L’œuvre de César Manrique
L’artiste optimisa de façon exceptionnelle une partie de ce tunnel de lave pour créer les différentes parties de son œuvre.
Il disposa des plantes exubérantes à l’intérieur du couloir volcanique, afin d’augmenter encore la sensation du visiteur de se sentir dans un environnement naturel d’exception.
Puis il conçut un bar et un restaurant improbables au bout du lac intérieur, où l’on peut donc boire un verre ou manger un morceau dans ce décor unique.
A la sortie de ce couloir volcanique se trouve la surprise du chef : une piscine d’une blancheur éblouissante dont les parois arrondies épousent en partie les formes de la lave solidifiée.
Le tunnel de lave qui reprend un peu plus loin comprend un auditorium de 550 places aux qualités acoustiques paraît-il exceptionnelles, et au cadre visuel somptueux. Toujours pour rester fidèle à ses grands principes artistiques, Manrique disposa les sièges en suivant la pente descendante naturelle du sol de lave, ce qui permet aux spectateurs d’avoir une visibilité parfaite.
Et puisque la nature est au centre du génie artistique de Manrique, mentionnons le fameux Munidopsis Polymorpha ! Ce crabe minuscule (un centimètre de long) est endémique de Lanzarote. Après avoir vécu 4000 ans dans la pénombre, il a fini par devenir aveugle et il a perdu peu à peu toutes ses couleurs, pour être totalement blanc aujourd’hui.
Très sensible à la rouille, il a failli disparaître ces dernières années à cause de la présence dans le lac souterrain de nombreuses pièces de monnaie jetées par les touristes. Ce qu’il est désormais interdit de faire.
Enfin, une Maison des Volcans a été érigée sur le site, au-dessus du tunnel de lave. Il s’agit d’un musée dédié à la volcanologie de l’île.
Infos pratiques
Horaires d’ouverture et prix
Ouverture : 10h00 – 17h15 tous les jours
Pour le restaurant : 12h00 – 16h00 tous les jours, 19h00 – 21h00 le mercredi et le vendredi
Les prix (2025) : 16 euros par adulte (11,20 euros si handicap) – 8,25 euros par enfant de 7 à 12 ans (5,60 euros si handicap) – Gratuit aux moins de 7 ans
Services
Stationnement : il y a un vaste parking gratuit à proximité du site.
Restauration : un bar-restaurant fait face au lac.
Toilettes : le site est doté de toilettes.
Baignade interdite, que ce soit dans le lac intérieur ou la piscine extérieure.
Gardez votre monnaie sur vous !
Ou du moins, ne la jetez pas dans le lac intérieur : c’est désormais interdit afin de protéger les petits crabes blancs endémiques de l’île, qui ont failli disparaître par le passé à cause de cette pratique aussi répandue qu’inutile…
Ce lac héberge d’ailleurs 76 autres espèces endémiques, elles aussi à protéger…
Localisation
Los Jameos del Agua est situé tout au nord-ouest de l’île, en bordure de la LZ-1, et à un kilomètre de La Cueva de los Verdes.
Pour s’y rendre, il faut 25 minutes depuis Costa Teguise et Teguise, 30 minutes depuis Arrecife ou encore 40 minutes depuis Puerto del Carmen. Et si vous venez de Playa Blanca, à l’extrémité opposée de l’île, alors il vous faudra 1 heure.
STRATIFIED CITY
Stratified City est un site qui permet d’admirer de somptueux paysages naturels, composés de formations rocheuses aux formes tourmentées sur fond de volcans.
Les formations rocheuses de Stratified City
Notre visite sur ce site étonnant s’est déroulée un jour où la lumière du soleil jouait à cache-cache entre les nuages. Pas l’idéal pour les photos, j’ai donc décidé d’y revenir le lendemain matin très tôt, au lever du soleil, pour essayer de faire de meilleures images. Je me suis alors retrouvé tout seul pendant plus d’une heure face à des panoramas de toute beauté.
Stratified City et le volcan Montaña de Guenia
Quand le soleil levant éclaire le site de sa lumière chaude, le paysage s’enflamme. Les différentes formations rocheuses aux formes énigmatiques (colonnes, arches et petites grottes) se mettent alors à rougeoyer. Ce panorama est d’une beauté sauvage qui ne laisse pas insensibles les amoureux.ses de la nature.
Le volcan Montaña de Guenia
Comment ce site atypique s’est-il créé ?
A l’origine, ce site, également appelé Los Roferos, était une carrière d’extraction de roches, celles avec lesquelles sont construites les maisons de l’île. Au fil du temps, la carrière a fini par péricliter et être abandonnée. L’activité minière avait déjà commencé à creuser ces formations rocheuses, et la nature a fini le travail grâce à la pluie et au vent, ainsi qu’à son activité permanente d’érosion.
Le volcan Montaña de Tinaguache, sous une arche de Stratified City
Se balader au milieu de ces curieuses formations rocheuses face à des volcans majestueux laisse un souvenir impérissable.
Le volcan Montaña de Tinaguache
Conseils pratiques
Pour les photographes
Le site est déjà photogénique sous la lumière brute de la mi-journée mais pour le photographier dans les meilleures conditions, il faut impérativement venir au lever ou au coucher du soleil. C’est à ces moments-là, pendant les fameuses golden hours, qu’il se présente sous son plus beau jour.
En arrivant, garez bien votre voiture côté route et non pas coté formations rocheuses. Sinon, en fonction des photos que vous prendrez, vous risqueriez d’avoir votre véhicule dans votre champ de vision…
La boulette : garer sa voiture en plein dans le champ de la photo
Quand visiter le site ?
Le conseil précédent vaut également pour tous les visiteurs : le meilleur moment pour admirer les lieux, ce sont les premières et les dernières lueurs du jour, car ce sont les deux moments de la journée où les couleurs sont de loin les plus belles.
L’autre avantage, c’est qu’à ces moments-là, surtout tôt le matin, le site est vide de touristes : on peut alors profiter des lieux tout seul.
Commodités
Un parking naturel borde le site, le long de la route.
Il n’y a pas d’autres commodités.
Le prix
L’entrée est gratuite, le site est en accès libre.
Quelle durée prévoir ?
Le site se visite assez rapidement. On peut y passer quelques minutes comme une bonne heure, voire plus si l’on veut faire le tour de toutes les formations rocheuses, en prenant le temps de les photographier et de les admirer.
Les différents noms du site
Vous pouvez trouver différents noms qui désignent tous ce seul et même site : Stratified City, Ciudada Estratificada, Los Roferos (qui vient de rofe, le nom des pierres qui étaient extraites du site), Antigua Rofera de Teseguite…
Accès
Stratified City se situe juste au bord de la route (la LZ-404). Lorsqu’on arrive à hauteur du site, on ne peut pas le rater car on aperçoit les formations rocheuses depuis la voiture : on est arrivé.
Localisation
Le site se trouve dans l’ouest de l’île et il est accessible relativement rapidement depuis à peu près tous les points de l’île : l’une des villes les plus éloignées du site, Playa Blanca, n’est qu’à 45 minutes.
Pour les autres villes principales, Puerto del Carmen est à 25 minutes, Arrecife à 20 minutes, Haria à 15 minutes et Teguise à 5 minutes.
Stratified City en images
LA GERIA
La Geria est une vallée viticole du centre de Lanzarote, classée Réserve de Biosphère par l’Unesco, qui présente des paysages uniques au monde.
La vigne de la Geria cernée par les volcans
La vigne y est cultivée depuis trois siècle avec un savoir-faire endémique à l’île. Après les éruptions de Timanfaya en 1730, les viticulteurs ont commencé à faire de grands trous circulaires dans le sol. Au centre de chaque trou, ils ont creusé suffisamment en profondeur pour atteindre la terre qui avait été recouverte par la lave. Ils ont alors planté leurs ceps de vigne à ce niveau-là, pour qu’ils prennent racine dans la terre fertile.
Mais ce n’est par tout. Car pour parfaire leur œuvre, ils ont construit patiemment des murets semi-circulaires en roches volcaniques (les zocos) sur le rebord de chaque trou, afin de protéger les ceps du vent. L’ingéniosité de ce mode d’agriculture réside enfin dans la pente des trous, qui permet de faire dégouliner la rosée du matin jusqu’aux pieds de vigne afin de les alimenter en eau. Et là, le picòn, cette fameuse cendre volcanique qui recouvre le sol, présente la particularité de conserver l’humidité, pour le plus grand bénéfice de la vigne.
La répétition de ces anneaux à perte de vue a un impact visuel qui ne laisse pas les visiteurs insensibles. Le contraste des villages blancs sur la terre volcanique noire et l’omniprésence des volcans en arrière-plan ajoutent à la magie de ces paysages inimitables.
Infos pratiques
Pour les photographes
Le point fort des paysages de la Geria, c’est l’impact visuel de ce graphisme viticole. Pour optimiser les images, l’idéal consiste à utiliser un drone (dans la limite des autorisations de vols évidemment) car c’est vus du ciel que ces paysages sont le plus impressionnant.
La route des vins : caves et bodegas
La route des vins de la Geria est la LZ-30, qui relie Mogaza à Uga. Elle est bordée de nombreuses caves et bodegas, ainsi bien sûr que de ces paysages de vignes si typiques de l’île. Des visites, des dégustations et des ventes de ces vins locaux y sont organisées : si vous cherchiez une idée de cadeau…
Voici un lien vers l’une des caves les plus réputées de l’île : El Grifo.
Que voir aux alentours ?
Quand on visite la Geria, on peut prolonger le plaisir par un petit détour vers la grotte de Los Naturalistas, longue de 1600 mètres.
Les infos sur le web étant rares, voici comment s’y rendre : sur la route des vins (la LZ-30), lorsqu’on arrive dans le petit village de Masdache (à environ 5 kilomètres de Mogaza et 10 kilomètres de Uga), il faut prendre la LZ-58 en direction du nord (tourner à droite si l’on vient de Mogaza, et à gauche si l’on vient de Uga). La grotte est située deux kilomètres plus loin, sur la gauche. Coordonnées GPS : 29.01200,-13.65966
Localisation
La Geria est située dans le centre de l’île.
Puerto del Carmen est à 15 minutes, Playa Blanca et Arrecife sont à 20 minutes.
La Geria en images
LA MONTAÑA COLORADA
La randonnée de la Montaña Colorada est l’une de celles qu’il ne faut pas rater à Lanzarote. En réalité, c’est plus une balade qu’une véritable randonnée, elle est donc de niveau très facile. Il s’agit de faire à pied le tour d’un volcan, qui offre de jolis paysages tout au long du parcours.
Le départ de la balade est facile à trouver : il se trouve au bout du parking et aux pieds du volcan, on ne peut pas se tromper.
Un panneau montrant le plan détaillé de la rando se trouve là, sur lequel on distingue d’ailleurs très bien le flanc rouge du volcan.
Le panneau du départ
A partir de là, il suffit de suivre un petit chemin balisé qui est jalonné de quinze panneau explicatifs. Ils donnent une foule d’informations relatives au site : les différentes curiosités visibles tout au long du parcours, l’activité volcanique ou encore, la culture de la vigne à flanc de volcan. Tout y est pour mieux s’imprégner des lieux.
Assez rapidement après le départ, on arrive au flanc sud-est du volcan : c’est ce côté-là qui est rougeâtre et qui fait la réputation du site ainsi que de sa courte randonnée.
La Montaña Colorada, ou le volcan rouge
Tout au long du parcours, on aperçoit au loin une multitude d’autres volcans, posés au milieu des roches volcaniques.
Les volcans autour de la Montaña Colorada
Cette petite rando est une jolie balade qui comporte un seul inconvénient : les visiteurs ne sont pas autorisés à sortir du sentier dans un but de préservation de l’environnement, lequel est fragile par ici.
Le tour de la Montaña Colorada
Ce type d’interdiction vaut pour de nombreux sites à Lanzarote et cela a parfois un petit côté frustrant.
Par exemple, il n’est pas possible de s’approcher de la fameuse Bomba Volcanica Gigantesca, cet énorme rocher volcanique qui fut projeté à quelques centaines de mètres de hauteur avant de s’écraser au sol.
Ses dimensions :
4 m de large
5 m de haut (sans compter la partie enfouie dans la cendre volcanique)
Nombreux sont ceux qui sortent du sentier malgré l’interdiction, et piétinent les zones prohibées pour aller photographier cette fameuse Bombe avec le volcan rouge en arrière-plan.
La fameuse Bombe Volcanique Gigantesque
En conclusion, la randonnée de la Montaña Colorada est à faire absolument parce qu’elle est belle, facile et rapide. Cela ne vaut donc vraiment pas la peine de faire l’impasse dessus…
Infos pratiques
Le profil de la rando
Distance : 3 km
Dénivelé : 50 mètres
Durée : 1 heure à 1h 30
Niveau : très facile
Commodités
Un parking de terre est situé aux pieds du volcan. Le départ est au bout du parking.
Le parking vu depuis la Montaña Colorada
Il n’y a aucune autre commodité sur place, donc prévoyez tout ce dont vous avez besoin : de l’eau, à manger, casquette, crème solaire etc.
Quand s’y rendre ?
C’est au lever du soleil que la face rouge du volcan bénéficie de la plus belle lumière. En fin de journée, il est à l’ombre, il est donc préférable de venir marcher ici le matin.
En haute saison (juillet – août), le parcours peut être assez fréquenté. Aussi, plus on fait cette rando tôt, moins on a de chances de croiser du monde. Le reste de l’année, le site est plus agréable car il n’est pas trop fréquenté.
Comment faire une visite rapide ?
Si vous manquez de temps, vous pouvez vous contenter de rejoindre le versant rouge du volcan pour l’admirer, puis faire demi-tour.
Pour cela, il faut compter une demi-heure environ, cette durée étant évidemment variable en fonction du rythme de marche de chacun.
Mais surtout, si vous êtes pressé.e, ne vous trompez pas de sens ! Depuis le parking, il faut faire le tour dans le sens des panneaux (sens contraire des aiguilles d’une montre). Sinon, ce sera beaucoup plus long !
Que voir alentour ?
En quittant la Montaña Colorada, il y a une autre petite randonnée à ne pas rater à un kilomètre de là : la randonnée de la Montaña Cuervo.
Le principe est le même, c’est-à-dire qu’on fait le tour du volcan. Mais le gros avantage de cette rando-là, c’est qu’on peut pénétrer dans le cratère, qui vaut le coup d’œil.
La Montaña Cuervo
Localisation
La Montaña Colorada est située en plein cœur du parc national des volcans de Lanzarote. Ce qui en fait un site rapidement accessible en voiture, où que l’on se trouve sur l’île (le plus souvent entre 15 et 30 minutes).
LE JARDIN DE CACTUS
Contrairement aux sites présentés ci-dessus, le jardin de cactus de Lanzarote n’est pas un site naturel à proprement parler.
Mais cette œuvre végétale de César Manrique s’intègre si parfaitement aux paysages naturels de l’île qu’elle a forcément sa place dans cet article.
Avec ces 4500 spécimens de cactus issus de 1400 espèces différentes, et provenant des cinq continents, César Manrique a réussi le tour de force de faire de ce jardin exceptionnel l’un des plus réputés de la planète.
Le jardin de cactus et le volcan Montaña Tinamala
Le jardin de cactus et le volcan Montaña Cobrada
Le sol est recouvert de picòn, cette fameuse cendre volcanique, et comporte quelques petits bassins où flottent des nénuphars et nagent de gros poissons rouges. Priorité de César Manrique, ce jardin magistral, qui constitue une véritable œuvre d’art, s’intègre parfaitement dans son environnement naturel et volcanique.
Dans ce sanctuaire paisible règnent le calme et la sérénité. Les cactus prennent toutes les formes possibles, mais aussi toutes les couleurs imaginables lorsqu’ils sont en fleurs.
Il faut déambuler tranquillement dans ces allées pour mieux s’imprégner de l’atmosphère poétique créée par ces cactées en tous genres.
Au fond du jardin, un vieux moulin domine le site. Parmi les différentes variétés de cactus qui prospèrent à ses pieds, mentionnons le coussin de belle-mère, au nom si explicite…
Le fameux coussin de belle-mère…
Infos pratiques
Entrée : horaires et prix
Le jardin de cactus est ouvert tous les jours de 10h00 à 17h00 (dernière entrée à 16h30), 365 jours par an.
Adultes : 8,50 euros – Adultes en situation de handicap : 6 euros
Enfants : 4,25 euros – Enfants en situation de handicap : 3 euros
Commodités
Le site est doté d’un vaste parking.
A l’intérieur, il y a une cafétéria qui sert à manger et à boire à des tarifs corrects : voir le menu.
A noter que deux œuvres de Manrique décorent les toilettes, pour distinguer celles des femmes de celles des hommes.
L’entrée des toilettes hommes…
… et celle des toilettes femmes.
Localisation
Le jardin de cactus est situé dans l’ouest de l’île à Guatiza, qui dépend de la municipalité de Teguise, bien que la ville soit située à 15 minutes de là.
Costa Teguise est également à 15 minutes, Arrecife à 20 minutes, Puerto del Carmen à 30 minutes.
Le jardin de cactus a été conçu en amphithéâtre
Le jardin de cactus en images
LES SITES LES PLUS SURPRENANTS DE L’ÎLE
La forte activité volcanique de Lanzarote a façonné des paysages naturels étonnants aux quatre coins de l’île. Cette dernière étant relativement petite, il est assez facile d’explorer tous ces sites en quelques jours seulement, sans jamais avoir à se dépêcher.
Le prix du billet n’est pas cher hors saison, le vol est rapide depuis l’Europe, avec laquelle il n’y a quasiment pas de décalage horaire (une heure), le climat est doux toute l’année…
Conclusion : foncez sur Lanzarote, vous ne le regretterez pas…
La randonnée de la Montaña Colorada est l’une de celles qu’il ne faut pas rater à Lanzarote. En réalité, c’est plus une balade qu’une véritable randonnée, elle est donc de niveau très facile. Il s’agit de faire à pied le tour d’un volcan, qui offre de jolis paysages tout le long du parcours.
Le sentier de la Montaña Colorada (au fond, la Montaña Negra)
Le départ de la balade est facile à trouver : il se trouve au bout du parking et aux pieds du volcan, on ne peut pas se tromper.
Un panneau montrant le plan détaillé de la rando se trouve là, sur lequel on distingue d’ailleurs très bien le flanc rouge du volcan.
Le panneau du départ
A partir de là, il suffit de suivre un petit chemin balisé qui est jalonné de quinze panneau explicatifs. Ils donnent une foule d’informations relatives au site : les différentes curiosités visibles tout au long du parcours, l’activité volcanique ou encore, la culture de la vigne à flanc de volcan. Tout y est pour mieux s’imprégner des lieux.
Assez rapidement après le départ, on arrive au flanc sud-est du volcan : c’est ce côté-là qui est rougeâtre et qui fait la réputation du site ainsi que de sa courte randonnée.
La Montaña Colorada, ou le volcan rouge
Tout au long du parcours, on aperçoit au loin une multitude d’autres volcans, posés au milieu des roches volcaniques.
Les volcans autour de la Montaña Colorada
Parmi eux, la Montaña Negra. Il s’agit du troisième plus haut sommet de l’île (518 m) et il offre la possibilité, lui aussi, de randonner sur son pourtour.
Lichens et Montaña Negra
Cette petite rando est une jolie balade qui comporte un seul inconvénient : les visiteurs ne sont pas autorisés à sortir du sentier dans un but de préservation de l’environnement, lequel est fragile par ici.
Le tour de la Montaña Colorada
Ce type d’interdiction vaut pour de nombreux sites à Lanzarote et cela a parfois un petit côté frustrant.
Par exemple, il n’est pas possible de s’approcher de la fameuse Bomba Volcanica Gigantesca, cet énorme rocher volcanique qui fut projeté à quelques centaines de mètres de hauteur avant de s’écraser au sol.
Ses dimensions :
4 m de large
5 m de haut (sans compter la partie enfouie dans la cendre volcanique)
Nombreux sont ceux qui sortent du sentier malgré l’interdiction, et piétinent les zones prohibées pour aller photographier cette fameuse Bombe avec le volcan rouge en arrière-plan.
La fameuse Bombe Volcanique Gigantesque
En conclusion, la randonnée de la Montaña Colorada est à faire absolument parce qu’elle est belle, facile et rapide. Cela ne vaut donc vraiment pas la peine de faire l’impasse dessus…
Le profil de la rando
Distance : 3 km
Dénivelé : 50 mètres
Durée : 1 heure à 1h 30
Niveau : très facile
L’accès à la Montaña Colorada
La Montaña Colorada est située en plein cœur du parc national des volcans de Lanzarote. Ce qui en fait un site rapidement accessible en voiture, où que l’on se trouve sur l’île (le plus souvent entre 15 et 30 minutes).
Un parking de terre est situé aux pieds du volcan. Le départ est au bout du parking.
Le parking vu depuis la Montaña Colorada
Si vous arrivez du sud-ouest (via la route LZ 30), alors vous traverserez la très pittoresque zone viticole de la Geria, qui présente une particularité notable : la vigne est plantée au centre de grands trous creusés dans la cendre volcanique.
C’est au lever du soleil que la face rouge du volcan bénéficie de la plus belle lumière. En fin de journée, il est à l’ombre, il est donc préférable de venir marcher ici le matin.
En haute saison (juillet – août), le parcours peut être assez fréquenté. Aussi, plus on fait cette rando tôt, moins on a de chances de croiser du monde. Le reste de l’année, le site est plus agréable car il n’est pas trop fréquenté.
Comment faire une visite rapide ?
Si vous manquez de temps, vous pouvez vous contenter de rejoindre le versant rouge du volcan pour l’admirer, puis faire demi-tour.
Pour cela, il faut compter une demi-heure environ, cette durée étant évidemment variable en fonction du rythme de marche de chacun.
Mais surtout, si vous êtes pressé.e, ne vous trompez pas de sens ! Depuis le parking, il faut faire le tour dans le sens des panneaux (sens contraire des aiguilles d’une montre). Sinon, ce sera beaucoup plus long !
Commodités
Il n’y a aucune commodité sur place, donc prévoyez tout ce dont vous avez besoin : de l’eau, à manger, casquette, crème solaire etc.
La randonnée de la Montaña Cuervo
En quittant la Montaña Colorada, il y a une autre petite randonnée à ne pas rater à un kilomètre de là : la randonnée de la Montaña Cuervo.
Le principe est le même, c’est-à-dire qu’on fait le tour du volcan. Mais le gros avantage de cette rando-là, c’est qu’on peut pénétrer dans le cratère, qui vaut le coup d’œil.
Du haut de ses 1885 mètres d’altitude, le sommet du Puy de Sancy offre une vue panoramique à couper le souffle sur près de 15% du territoire français, paraît-il ! Ce qui en fait une randonnée incontournable, celle qu’il faut avoir faite.Si vous passez dans le coin, ne manquez pas l’occasion d’aller faire un tour tout là-haut, sur le toit du Massif Central…
Si ce volcan éteint a pris avec le temps une apparence plus anodine de simple montagne, les superbes cônes éruptifs qui l’entourent rappellent aux visiteurs le passé géologique intense de la région.
L’itinéraire détaillé dans cet article part de la station de ski du Mont-Dore, mais il y a trois autres départs possibles :
Super-Besse
Chastreix-Sancy
La vallée de Chaudefour.
Après avoir longé le bas de la station, on entre dans une jolie forêt à flanc de montagne.
Si le sentier qui serpente entre les arbres par ici est relativement pentu, ce n’est rien à côté de la partie suivante : le chemin qui monte alors, et qui fait office de couloir de ski l’hiver, est lui beaucoup plus abrupt. Mais il n’est pas très long, quelques centaines de mètres seulement. Quand la pente s’adoucit enfin, on se retrouve alors sur un petit sentier à flanc de volcan.
La vue est souvent considérée comme superbe tout au long de cette rando. Mais les conditions de montagne ne permettent pas toujours de vérifier cette réputation : nous faisons partie des randonneurs et randonneuses qui ont marché dans les nuages pendant toute la première partie du parcours. Pourtant, l’ascension dans une telle brume confère à la rando une atmosphère particulière, typique de la montagne.
Quand on sort enfin des nuages, on se retrouve au beau milieu des pistes de ski, avec une vue de plus en plus belle sur la nature qui nous entoure.
On aperçoit très vite les premiers volcans qui sont posés là, majestueux.
Ici, le parcours est beaucoup moins pentu que dans la première partie de la randonnée.
Aux pieds du Puy de Sancy
Dans cette partie finale de l’ascension se succèdent les paysages époustouflants sur la vallée et ses volcans.
Si l’on effectue la montée dans les nuages avec une vue bouchée, il ne faut pas trop s’inquiéter car on a de bonnes chances d’avoir droit plus haut à cette vue exceptionnelle sur la mer de nuages. Elle procure alors la sensation forte de randonner en haute montagne.
Émotions fortes au-dessus des nuages
Une fois au sommet, les émotions visuelles sont toujours intenses avec un panorama impressionnant sur les volcans qui émergent des nuages. Les puys, ces fameux monstres façonnés par les forces la nature, nous semblent tout petits vus d’ici.
La vue à 360° est belle de tous les côtés. Une table d’orientation permet de se repérer.
De l’autre côté du sommet du Puy de Sancy, on attaque la descente par un long escalier. En face arrivent les randonneurs qui font le tour en sens inverse, ou qui viennent du téléphérique.
Attention aux marches verglacées
On arrive très vite à un petit poste d’observation d’où la vue, là aussi, vaut le coup d’œil.
Le lieu est magique, beaucoup en profitent pour casser la croûte face à cette vue imprenable.
La descente se poursuit par un long escalier qui fend le paysage.
Attention, quand il a gelé la nuit (voire en journée), les marches sont verglacées et très glissantes. Il n’est pas rare de retrouver un randonneur ou une randonneuse le cul par terre. Pour être honnêtes, nous l’avons testé par nous-mêmes, nos fesses rougies peuvent en témoigner…
Une fois la descente de l’escalier avalée, une bifurcation vers la gauche permet de prendre la direction du Mont-Dore (à droite, on va vers le téléphérique). On se retrouve alors sur un petit sentier dont les pentes abruptes plongent dans la vallée.
Le chemin descendant serpente une dernière fois entre les volcans avant de rejoindre la vallée.
C’est dans cette phase finale de la descente que nous apercevrons, très loin au-dessus de nos têtes, un groupe de chamois s’enfuyant à l’approche d’un couple de randonneurs, sur une ligne de crête.
Infos pratiques
A l’heure du bilan, le constat est simple. Cette petite randonnée offre des paysages somptueux, et pas seulement depuis le sommet : c’est le cas tout au long du parcours. Elle n’est globalement pas trop difficile même si la première partie, parfois très pentue, peut paraître ardue aux personnes peu habituées à ce type d’effort.
Le profil de la randonnée
(Pour rappel, il s’agit du parcours au départ de la station du Mont-Dore)
Distance : 7,2 km
Dénivelé : 546 m+ et 546 m-
Durée : +/- 3h30
Altitude max : 1885 m
Télécharger la trace GPX
Le parcours est très facile à suivre grâce au balisage présent tout le long de la rando.
Néanmoins, on peut également télécharger gratuitement la trace GPX sur VisuGPX (le lien est situé tout en bas de leur page).
On peut également la télécharger via l’appli Décathlon Outdoor, que nous avons testée et qui s’avère très fonctionnelle.
L’auberge de jeunesse Le Mont Dore (chalet Le Grand Volcan) est située aux pieds des pistes, et à 400 mètres seulement du point de départ de la rando du Puy de Sancy.
Il s’agit d’un grand chalet très agréable posé en pleine nature.
Il est extrêmement variable selon la saison et selon le type d’hébergement (dortoir, chambre…)
A titre d’indication, pour un week-end férié (11 novembre), nous avons réglé 70 euros la nuit pour une chambre double avec sanitaires privatifs, et petit déjeuner inclus.
Liens utiles
Pour avoir un autre aperçu de la rando du Puy de Sancy : Sancy.com
L’office du tourisme Auvergne Volcans Sancy donne de nombreuses infos sur les volcans, les activités outdoor etc.
Le téléphérique vous emmène à 1790 mètres d’altitude. Pour rejoindre le sommet du Puy de Sancy, il faut ensuite emprunter un escalier (+/- 20 minutes d’ascension).
Tarifs 2025 :
L’aller-retour : 20 euros par adulte, 12 euros par enfant
L’aller simple : 15 euros par adulte, 10 euros par enfant
Les chiens sont interdits sur l’ensemble du parcours de cette randonnée, y compris s’ils sont tenus en laisse.
Attention : à l’approche du sommet, en arrivant à l’escalier, attention aux marches : elles peuvent être (très) glissantes en cas de gel ou de neige, ce qui est fréquent à cette altitude.
Fréquentation : cette rando est victime de son succès. Il y avait beaucoup de monde quand nous l’avons faite (un 9 novembre), alors je n’ose pas imaginer ce que cela doit être en plein mois d’août…
Parmi les plus jolies îles des Cyclades, Paros n’est pas la plus réputée… et tant mieux car la conséquence, c’est qu’elle est beaucoup moins fréquentée que certaines de ses voisines, lesquelles sont prises d’assaut. On peut donc y découvrir les plus belles plages, des villages blancs pittoresques et de magnifiques paysages sans la frénésie touristique qui règne ailleurs dans les Cyclades.
A découvrir aussi dans les alentours, l’île d’Antiparos et pour finir, petite escapade à Athènes.
Il y a tellement de choses à faire et à voir à Paros : des plages bien sûr, des petits villages pittoresques, diverses activités nautiques, sans compter une multitude d’églises orthodoxes dans toute leur splendeur. Du coup, c’est un petit paradis pour les visiteurs comme pour les amateurs de photos…
L’église d’Agkeria
Le village d’Aliki
Vu la forte chaleur qui nous tombe dessus en ce mois de juillet, la première urgence en débarquant à Paros consiste à trouver… une plage ! Rien de très culturel certes, mais le summum du point de vue pratique. C’est à la sortie du petit village d’Aliki, au sud-ouest de l’île, que nous trouvons rapidement notre bonheur.
Piso Aliki Beach
Nous ne le savons pas encore mais cette plage est si agréable, notamment grâce à l’ombre des petits arbres qui ont poussé tout au bout, qu’elle deviendra notre repaire jusqu’à la fin du séjour.
A son extrémité, les rochers forment un récif naturel qui permet de faire du snorkeling.
En marchant un peu dans les rochers, on se rend compte que cette plage d’apparence sauvage est située juste à la sortie du village.
Aliki
De là, il n’y a que quelques pas à faire pour découvrir notre première petite église grecque, qui trône sereinement face à la mer. Comme sortie de messe, il doit y avoir pire.
L’église Saint-Nicholas
Paros est extrêmement réputée pour son marbre blanc, qui est le plus translucide qui existe. C’est avec lui que furent sculptés bon nombre de chefs-d’œuvre antiques, dont la Vénus de Milo. Idem pour le tombeau de Napoléon.
Au fil des jours, nous allons faire le tour de cette petite île de 21 kilomètres de long afin d’en découvrir tous les recoins…
Le port de Parikia
Sur la route de Parikia, le littoral est très coloré et sous cette forte chaleur, il est difficile de résister à l’eau translucide qui nous tend les bras.
Les points de vues se succèdent donc, sur cette côte peuplée notamment de moulins fleuris et de petites églises orthodoxes à la blancheur éclatante.
Parikia est le point d’entrée de Paros, puisque c’est dans ce petit port qu’accostent les ferries en provenance du Pirée.
Une ruelle de Parikia
La ville est à la fois agréable et animée sur son front de mer, et calme et pittoresque dans ses ruelles blanches, où vivent paisiblement ses 6000 habitants.
Les ruelles blanches de Parikia
Mais la principale richesse de Parikia est son église dite « aux cent portes ». Sa construction fût lancée en 326 par l’empereur Constantin Ier lui-même, quelques années à peine avant que son nom ne passe à la postérité en étant donné à la cité mythique de Byzance : Constantinople.
Il s’agit de la plus ancienne église orthodoxe encore en activité. Le site contient en réalité trois églises, un cloître et le musée byzantin.
Kite-surf à Pounda
Sans transition : la petite île d’Antiparos est située juste en face de Paros, plein ouest.
Au fond : Antiparos
Un couloir d’un petit kilomètre de large sépare les deux îles. Le vent qui vient les fouetter se renforce en les longeant, et lorsqu’il débouche dans ce couloir, il s’y engouffre avec une puissance décuplée.
C’est donc là, sur ce vaste plan d’eau transformé par les fortes rafales de vent en spot de kite-surf, que les passionnés de glisse se donnent rendez-vous. Débutants s’abstenir.
Cette plage de Pounda, à la fois très fréquentée et très colorée, respire la passion du kite.
Pendant que certains préparent leur voile sur le sable, d’autres rivalisent de prouesses à quelques mètres de là, dans l’eau.
Plonger sur des sites antiques
Pendant longtemps, la très stricte législation grecque ne permettait de pratiquer la plongée sous-marine que sur quelques sites dans tout le pays. Son application sévère visait pourtant un objectif des plus louables : protéger des pilleurs les innombrables vestiges antiques qui jonchent aujourd’hui encore les fonds marins grecs.
Finalement, c’est assez récemment que cette loi s’est enfin assouplie de sorte qu’aujourd’hui, on puisse plonger normalement à la condition d’être supervisé par une école de plongée. Du coup, ces dernières fleurissent dans tout le pays…
C’est ainsi que j’ai eu la chance de plonger au-dessus des ruines d’un village minoen vieux de quelque 5000 ans. Quelle fabuleuse impression que celle qu’on ressent en palmant paisiblement au-dessus des vestiges de ces maisons antiques noyées. Notre guide de palanquée nous montrera les morceaux d’une amphore cachés sous les restes d’un pan de mur.
Les restes d’une amphore antique
Colonisée par les algues et les coquillages, il n’en reste certes plus grand-chose, mais suffisamment pour que nous laissions vagabonder notre imagination sur tous ces trésors antiques qui se cachent toujours au fond de la Mer Égée…
La suite de la plongée nous permet d’observer la faune méditerranéenne habituelle.
Cigale de merVers de feu
La ville blanche : Naoussa
Tout au nord de l’île au fond d’une grande baie, s’étale la jolie petite ville blanche de Naoussa.
Longtemps cantonnée au statut de paisible port de pêche, elle s’est transformée au fil des années en destination touristique en vogue, à tel point que certaines célébrités ont fini par en faire leur lieu de villégiature préféré : Stéphane Bern ou encore Nikos Aliagas, pour ne citer qu’eux.
Outre quelques petits musées et les plages alentour, la principale attraction de la ville réside dans son front de mer qui donne sur le port.
Les quais font face à la multitude de restaurants qui animent ce front de mer, et les pêcheurs n’ont donc qu’à traverser la rue pour vendre aux restaurateurs leurs produits tout juste sortis de l’eau.
L’île d’Antiparos
Longue de douze kilomètres et assez sauvage, cette petite île est particulièrement calme. Son pourtour est agrémenté d’une multitude de plages.
Mais son principal attrait touristique est la vaste grotte dont l’entrée est située sur les hauteurs de l’île. Ses dimensions sont impressionnantes puisqu’elle plonge sous terre à plus de cent mètres de profondeur.
Au fil des millénaires, elle s’est fait coloniser lentement mais sûrement par des milliers de stalactites et stalagmites, parmi lesquelles la plus ancienne stalagmite d’Europe, qui atteint l’âge vénérable de 45 millions d’années.
Ce n’est qu’au XVIIème siècle, alors qu’elle était totalement inconnue jusque-là, que cette merveille de la nature fut rendue célèbre : la tenue d’une messe de Noël dans ce décor surréaliste eut un effet retentissant bien au-delà des frontières grecques.
Athènes
Si notre périple grec est essentiellement axé sur la découverte des Cyclades, c’est parce que l’été n’est pas le meilleur moment pour découvrir Athènes : non seulement la chaleur y est écrasante mais en plus, le nombre de touristes bat des records.
Nous avons donc décidé de passer seulement deux jours dans la Cité d’Athéna, et encore… s’il fait vraiment trop chaud, nous avons prévu un plan B : nous terminerons alors chacune de ces deux journées par un rafraîchissement dans la petite piscine de l’hôtel.
Inutile de dire qu’une fois à Athènes, Victor et Arthur n’ont qu’une seule envie : gravir cette fameuse colline de l’Acropole afin d’en découvrir toutes les richesses dont ils ont l’impression d’avoir toujours entendu parler, dans les livres d’histoire comme dans les dessins animés.
L’été, le bon plan consiste à arriver sur ce fabuleux site antique dès l’ouverture : la forte chaleur ainsi que la foule de touristes n’inondent pas encore les lieux.
La dernière fois que je suis venu à Athènes, le Parthénon était presque laid tellement il était enfoui sous des tonnes d’échafaudages. Il restait alors 18 ans de travaux et j’avais été très frustré à l’époque de ne pas pouvoir l’admirer sans cet habit de ferraille. Aujourd’hui, c’est-à-dire 21 ans plus tard, je me réjouis donc à l’idée de le découvrir enfin dans toute sa splendeur.
Encore raté ! Un vieux panneau confirme que ces travaux ont pris du retard au fil des années. J’essaie donc d’immortaliser comme je peux ce monument mythique aux endroits où il n’y a plus d’échafaudages, plutôt que d’envisager de revenir ici à l’âge de la retraite en espérant que les travaux seront enfin terminés…
Qu’à cela ne tienne, nous allons jeter notre dévolu sur l’autre merveille du site : l’Érechtéion. Car si le Parthénon est bien le symbole mondialement connu de la Grèce Antique, son voisin l’Érechtéion revêt lui aussi une importance majeure : c’est bien lui qui était le véritable sanctuaire de l’Acropole, dédié au culte de la déesse Athéna notamment.
La principale caractéristique de ce temple, ce sont les Caryatides, ces six statues de femmes qui servent de colonnes et semblent avoir la ville à leurs pieds.
Très vite, les flots de touristes commencent à se répandre entre les différentes ruines antiques qui habillent l’Acropole. Nous avons bien profité du site dès son ouverture quand il y avait relativement peu de monde mais maintenant, il est temps de rallier l’étape suivante : l’Agora athénienne.
La Stoa d’Attale dans l’Agora athénienne
Située à deux pas de l’Acropole en contrebas, c’est là que battait le cœur de la cité d’Athènes pendant l’Antiquité. Aujourd’hui, on en visite les ruines dans un vaste écrin de verdure particulièrement agréable. L’Agora romaine est située à deux pas de là.
L’église des Saints-Apôtres (coupole)
Nous terminerons cette visite athénienne par l’un des plus anciens quartiers d’Europe : la Plaka, avec son mélange de vestiges antiques, d’églises byzantines et de bâtiments néoclassiques. C’est dans ce contexte étonnant qu’il est de coutume de flâner, de prendre un verre ou de s’attabler dans l’un des nombreux petits restos qui se font agréablement concurrence.
Infos pratiques
Cyclades : prendre un ferry
Le réseau de ferries a beau être particulièrement développé en Grèce, il comporte néanmoins un certain nombre d’aléas : d’une part, les horaires varient fréquemment à cause de l’état de la mer, voire des mouvements de grèves. D’autre part, les tarifs sont parfois soumis à certaines modifications.
Pour la ligne Athènes – Paros :
Le prix A/R par passager : à partir de 45 euros (105 euros en speedboat)
Le prix A/R, voiture et conducteur : à partir de 215 euros (270 en speedboat)
La durée : 4 heures (2h40 à 3h00 en speedboat)
Les horaires de toutes les liaisons maritimes grecques sont indiquées sur le site : Greek Ferry Schedules.
Attention: les horaires varient parfois, il faut donc les contrôler régulièrement. Idem pour les changements de quais sans prévenir : ceux qui arrivent sur le quai au dernier moment peuvent rater leur bateau qui se trouve finalement à l’autre bout du Pirée. Il existe bien des navette portuaires mais elles sont souvent pleines à ras-bord.
Bon à savoir : quand on a l’avion du retour à prendre à Athènes, il faut éviter d’attendre le dernier moment pour quitter l’île sur laquelle on se trouve. Car avec l’état de la mer qui peut changer rapidement, on risque de se retrouver avec des retards voire des annulations de bateaux… et donc de rater son avion. L’idée consiste donc à prévoir un ou deux jours de battement par sécurité, et d’en profiter pour visiter Athènes par exemple, ou d’autres sites à proximité. Ça permet d’éviter les mauvaises surprises.
Se loger sur Paros
Il y a évidemment beaucoup de possibilités de se loger sur les deux principales villes de l’île, Parikia et Naoussa : appartements, hôtels, campings etc.
Nous avons choisi un hébergement un peu plus en retrait, légèrement dans les terres et avec une vue superbe : Apianes Villas
La vue depuis la terrasse, le matin…… et le soir.
Situé au-dessus du petit village d’Aliki sur la côte sud, à moins de dix minutes de la mer en voiture ou en scooter, le logement fait partie d’une résidence comprenant quelques appartements, et bénéficie d’une petite piscine commune susceptible de ravir les enfants.
Se loger à Athènes
Une fois n’est pas coutume, nous avons logé au Novotel d’Athènes grâce à une promo intéressante. L’hôtel est situé en plein centre-ville et bénéficie d’une vue imprenable sur l’Acropole depuis le toit terrasse, lequel fait aussi office de bar, restaurant et piscine. Après une journée de visite sous un soleil de plomb, quel bonheur de se rafraîchir là avec une telle vue. Novotel Athènes
Le prix : 78 euros par nuit pour 4 personnes fin juillet.
Difficile de résister à une telle offre, d’autant plus que le personnel de l’hôtel s’est avéré d’une rare efficacité pour toutes les demandes de renseignements que nous lui avons adressées.
La vue depuis la terrasse-bar-restaurant-piscine de l’hôtel :
Tarif: 20 euros par adulte (gratuit pour les moins de 18 ans et les personnes handicapées)
Horaires: 8h00-17h00.
Bon à savoir : en été, le site est pris d’assaut par une foule de touristes très compacte. Il faut y aller dès l’ouverture pour en profiter pleinement : il y fait bon et il y a peu de monde jusqu’à 9h30. Après, ça se complique…
Accès – Outre le taxi : métro ligne 2, bus 1-5-15-40-230
Les spots de bivouacs de rêve, ce n’est pas ce qui manque dans les Pyrénées. Mais quand on débute en rando, en bivouac ou les deux, on ne sait pas forcément toujours très bien comment s’y prendre, ni quel itinéraire choisir.
Alors voici une idée de rando globalement facile, qui se termine en apothéose avec un spot de bivouac de rêve. La rando parfaite pour débuter, se tester, ou encore essayer son matériel de rando et de bivouac…
Le départ se fait du plateau du Lienz, au niveau de la fameuse auberge Chez Louisette (alt. 1600 m).
Le plateau du Lienz
On remonte alors une prairie bordée d’arbres.
Au départ du plateau du Lienz
On rejoint assez vite un chemin carrossable, destiné à approvisionner le refuge de la Glère, plus haut.
Le chemin carrossable en direction du refuge
Dans cette première partie de la rando, la végétation est toujours présente de part et d’autre du chemin.
On finit par atteindre une petite zone arborée, après laquelle l’univers devient de plus en plus minéral.
Cette zone rocailleuse et aride débouche au moment où l’on s’y attend le moins sur le lac de la Glère.
Le lac de la Glère, vu depuis le refuge
Ce point de vue est également le site où est posé le refuge de la Glère (voir les infos pratiques, plus bas).
Le refuge de la Glère
A partir de là, le lac de Coume Escure n’est plus qu’à 400 mètres, sur un petit chemin globalement plat voire descendant.
Le lac de Coume Escure
Mais on n’est pas encore tout à fait arrivé : le superbe spot de bivouac se trouve sur la rive d’en face. Il reste donc encore environ 400 mètres à parcourir en contournant ce joli lac, sur un petit chemin qui joue parfois à cache-cache dans la végétation. On peut malgré tout progresser au jugé sans difficulté.
Et puis c’est l’arrivée, face au lac de Coume Escure dominé au loin par le Grand Pic et le Petit Pic de la Glère.
Le lac de Coume Escure…
… et le Grand Pic et le Petit Pic de la Glère
On peut trouver du monde autour de ce lac notamment l’été mais en général, la plupart des randonneurs s’attardent plutôt autour du lac de la Glère, ou des lacs situés un peu plus loin, dans le parc national des Pyrénées. Le lac de Coume Escure est souvent un peu plus épargné que tous ses voisins : c’est son principal atout, au même titre que la vue qu’il offre sur le double pic de la Glère.
Le lac de Coume Escure
Le cadre est très nature, c’est l’endroit idéal où poser la tente.
Coucher du soleil sur le lac de Coume Escure
Même si l’eau est toujours très froide en montagne, difficile de résister à l’appel d’un joli lac après une rando où l’on a eu chaud.
La récompense !
Le spot de bivouac
La plage herbeuse du lac de Coume Escure est relativement petite. Ayant fait cette rando à trois couples d’amis, il y avait néanmoins suffisamment de place pour pouvoir poser là nos trois tentes, face au lac.
Petit bivouac entre amis
Sur ce site face au coucher du soleil, prendre l’apéro entre amis est un pur bonheur.
Pour nous, un bon gueuleton est une notion indissociable du bivouac. Nous n’hésitons donc jamais à alourdir nos sacs pour cet incontournable plaisir du soir. Les puristes de la rando ne nous comprennent pas toujours mais après tout, chacun ses goûts.
Poivrons de Padrón grillés
Le barbecue en rando ? C’est possible.
Alors évidemment, nous ne faisons jamais de feux par temps de canicule ou de sécheresse, et nous les allumons toujours dans des foyers déjà existants.
Car faire un feu sur l’herbe revient à la brûler et à détériorer le sol, ce qui est une pratique à proscrire en rando-bivouac : on aime la nature, on n’est donc pas là pour la détruire.
Au fil de l’apéro et du repas, le soleil décline puis disparaît, modifiant régulièrement les couleurs et la lumière de cette vue paisible sur le lac de Coume Escure.
La nuit tombe sur le lac de Coume Escure
Si le Grand Pic et le Petit Pic de la Glère apparaissent le soir en ombres chinoises au moment où le soleil se couche, il sont éclairés par une jolie lumière chaque matin quand le soleil se lève.
Lever de soleil sur le lac de Coume Escure
Alors que nous prenons le petit déjeuner, les montagnes reprennent des couleurs en face de nous.
Puis vient l’heure de lever le camp. La rando continue.
Le lac de Coume Escure
Remarque : si le spot de bivouac évoqué dans cet article est déjà occupé quand vous arrivez au lac de Coume Escure, vous pouvez tout à fait poser votre tente de l’autre côté du lac, celui par lequel on arrive en venant du refuge de la Glère. Il y a là aussi différents endroits où l’on peut bivouaquer et la vue est un jolie aussi. Le chemin menant du refuge au parc national des Pyrénées passe non loin mais ce plan B reste malgré tout une bonne alternative.
Poursuivre en direction du parc national des Pyrénées
Cette rando n’étant ni très longue, ni très difficile jusqu’au lac de Coume Escure, on peut très bien la poursuivre en direction du parc national des Pyrénées, où se situent de nombreux lacs.
Les lacs de la Glère (à gauche) et de Coume Escure (à droite)
Pour cela, il faut suivre les panneaux situés au niveau du refuge de la Glère, puis le balisage tout au long du chemin.
Le parcours est globalement joli mais pour notre part, nous nous sommes arrêtés aux limites du parc national des Pyrénées le premier jour, juste avant de pouvoir apercevoir les premiers lacs du parc. Nous sommes ensuite retournés au lac de Coume Escure pour y poser nos tentes.
Attention, les règles sont évidemment plus sévères dans le parc national des Pyrénées car il s’agit d’un véritable sanctuaire de montagne. Le but est de préserver cette nature aussi belle que fragile.
La réglementation du parc national
Le retour
Pour retourner au point de départ de la rando (le plateau du Lienz et l’auberge Chez Louisette) après avoir bivouaqué au lac de Coume Escure, il y a deux possibilités : soit revenir par là ou l’on est arrivé, soit finir la boucle (voir les infos pratiques, en fin d’article). Nous avons choisi la deuxième option.
Le lac et le refuge de la Glère
On commence par rejoindre et suivre le chemin du parc national des Pyrénées. Dès le début, et comme la veille pour nous puisque nous sommes déjà passés par là pour aller aux portes du parc national, ça monte.
Le lac de Coume Escure
Après avoir traversé un pierrier, on attaque une longue descente qui va continuer jusqu’à l’arrivée. Il faut traverser un petit ruisseau qui dégouline de la montagne, et dont la largeur peut varier en fonction de la saison. La descente se poursuit dans une sorte de jolie petite prairie encadrée de part et d’autre par de hautes montagnes.
La descente se poursuit dans une zone de gros blocs de pierres, qui n’est pas le passage le plus agréable ni le plus joli de la rando. On arrive un peu plus loin à la cabane de Sardiche. Pour notre part, ce sont des vaches qui nous y ont accueilli.
La cabane de la Sardiche
On arrive ensuite à un joli passage à flanc de montagne, au milieu de la végétation.
A partir de là, il ne reste plus qu’à poursuivre à travers champs et forêts en alternance, jusqu’au plateau de Lienz et au parking Chez Louisette, point de départ et d’arrivée de la rando.
Attention : pour votre timing, si vous choisissez de faire la grande boucle plutôt que l’aller – retour, la deuxième journée (12 km) est beaucoup plus longue que la première (7 km).
Infos pratiques
Le point de départ
Le départ de la rando se fait au plateau du Lienz, au niveau du restaurant Chez Louisette. Un petit parking est situé à proximité, où l’on peut laisser la voiture un ou plusieurs jours selon l’itinéraire choisi, le temps de la rando.
Le parking et le début de la rando
Pour rejoindre ce point de départ depuis Barèges, il y a deux solutions :
En voiture, par une petite route de 4,6 km.
A pied, via un petit chemin de rando : 3 km – 386 m+
La trace GPX
On peut évidemment faire cette randonnée en suivant le chemin carrossable. Pour le retour, si l’on fait la grande boucle, on peut se fier au balisage et aux cairns. Mais si l’on a le moindre doute, le meilleur moyen de ne pas se perdre est encore de télécharger la trace GPX.
Chez Louisette, bien sûr ! Comme évoqué précédemment, c’est le point de départ et d’arrivée de la rando, mais il s’agit également d’une petite auberge de montagne au décor chaleureux, qui propose des plats montagnards avec un excellent rapport qualité – prix. Tout est fait maison. Le site officiel : Chez Louisette.
Pour vous mettre l’eau à la bouche, voici leurs cartes :
Attention : n’oubliez pas de réserver car l’auberge est réputée dans toute la région. Vous pouvez le faire via le site officiel résa Louisette, ou par téléphone au 05.62.92.67.17.
Où dormir ?
A Barèges ! C’est l’endroit le plus proche du départ de la rando et les possibilités d’hébergement sont assez nombreuses, même s’il vaut mieux prévoir de réserver à l’avance.
Nous avons dormi à l’hôtel Alphée, un peu cher (110 euros la chambre double) mais c’est le cas de nombreux hébergements à Barèges.
Point fort : le petit déjeuner, ce qui n’est pas négligeable pour prendre des forces juste avant de partir en randonnée !
Il délivre toutes sortes d’informations sur la région, ses randonnées, son patrimoine etc. Surtout, il permet de s’adresser à des humains plutôt qu’à Internet…
Place Urbain Cazaux 65120 BAREGES
Téléphone +33 (0)5 62 92 16 00
Sites internet utiles
Le site du parc national des Pyrénées est incontournable : conseils pour la randonnée, bivouac et refuges, la faune et la flore, les différentes vallées, tout y est ! Toute la réglementation du parc est accessible ici.
On peut retrouver la randonnée présentée dans cet article en consultant les deux sites suivants :
Le site Rando vallées de Gavarnie présente l’aller simple, avec une petite extension jusqu’au lac Det Mail.
Le site Entre Aure et Lavedan – Randonnées présente la grande boucle (en sens inverse du nôtre, raconté dans cet article), au départ et à l’arrivée du plateau du Lienz.
Recommandations habituelles en montagne
La montagne est un écosystème fragile. Les règles sont donc faites, non pas pour embêter les randonneurs et randonneuses, mais pour préserver la nature. Voici quelques règles de base, d’apparence évidente mais pas suffisamment respectées :
Les déchets : prévoyez des sacs poubelles afin de pouvoir redescendre vos déchets. Ne laissez aucune trace de votre passage dans la nature.
La flore : évitez de sortir des sentiers balisés afin de ne pas abîmer la flore en la piétinant. Ni cueillette, ni prélèvement.
Les lacs : ne vous baignez pas dans les lacs si vous êtes enduit.e.s de crème solaire, car elle abîme le fragile écosystème lacustre. Par exemple, randonnez avec des vêtements longs, un chapeau ou une casquette, ou encore baignez-vous avec un lycra : dans le sac, ce n’est pas bien lourd.
Le feu : pas de feu en période de sécheresse ou de canicule. Si vous en allumez un, faites-le dans un foyer existant afin de ne pas dégrader le sol.
Le bruit : discrétion requise : pas de bruit, par respect de la faune locale et des autres randonneurs.
Bref, le b-a, ba, quoi…
Informations diverses
Les chiens sont autorisés sur le parcours de cette randonnée, à condition qu’ils soient tenus en laisse. Un peu plus loin, dans le parc national des Pyrénées, leur présence est strictement interdite.
La randonnée sur ce parcours est déconseillée l’hiver car la zone est propice aux coulées de neige. Il convient de bien se renseigner auprès de professionnels avertis avant de se risquer à randonner dans la zone lorsqu’il neige.
Si vous avez des questions, n’hésitez pas à les poser dans les commentaires (votre adresse mail sera demandée mais pas publiée, et il faudra compter quelques heures avant la publication de la question et de la réponse).
Pour continuer mon périple, j’ai décidé d’entrer en Turquie non pas par voie terrestre à vélo, mais par la mer en bateau. Je fais donc une courte traversée de Nisyros à l’île voisine de Kos, d’où partent les ferries pour la Turquie. Je ne le sais pas encore mais c’est là que mon voyage va basculer.
En approchant du ferry, je constate que la passerelle pour monter à bord est non seulement très étroite, mais aussi et surtout surélevée d’une bonne trentaine de centimètres au-dessus du quai, au lieu d’être posée dessus. Je rage un peu intérieurement en sachant déjà que je vais galérer dans quelques secondes pour hisser mon vélo de cinquante-quatre kilos sur cette passerelle mal ajustée. Mais cela fait partie de mes petites tracasseries quotidiennes, généralement sans conséquences.
Arrivé devant elle, je soulève l’avant du vélo puis je fais un effort supplémentaire pour faire suivre l’arrière, beaucoup plus lourd et là, d’un seul coup, crac ! Je ressens en une fraction de seconde une forte douleur au genou gauche. Pire, je sens tout de suite que dans ma jambe, quelque chose n’est plus à sa place. J’ai l’impression qu’un os est complètement sorti de son emplacement !
Cette sensation étant aussi douloureuse que désagréable, c’est la peur au ventre que je jette un œil à mon genou. Résultat, il est difforme ! Il a une énorme bosse à gauche et un grand trou inhabituel au milieu : la rotule n’est plus à sa place, elle s’est déboîtée vers l’extérieur de la jambe. La douleur est forte, je ne peux plus ni plier ni tendre la guibole, et il m’est impossible de faire un pas. La passerelle d’accès au navire étant très étroite, mon vélo, avec ses sacoches, en occupe toute la largeur et personne ne peut passer à côté de moi. Ça tombe mal, il y a encore une bonne cinquantaine de passagers derrière moi sur le quai, que j’empêche de monter à bord.
L’arrivée du ferry à Bodrum (Turquie)
Comme je souffre à voix haute, les deux membres d’équipage postés en haut de la passerelle pour accueillir les voyageurs descendent jusqu’à moi. Voulant m’aider, ils me demandent de lâcher le vélo pour le monter eux-mêmes à bord mais ils ne s’attendent pas à ce qu’il soit si lourd. Du coup, ils le font tomber dans les cordages qui bordent la passerelle, et dans lesquels le guidon s’empêtre. Quand ça veut pas…
Dans mon esprit, je me dis qu’il y a bien un toubib, une infirmière ou n’importe quelle personne avec un semblant de formation médicale, qui va venir m’aider et remettre ma rotule douloureuse à sa place, mais non. Alors que la douleur est toujours forte, personne ne se manifeste.
Bloquant toujours les passagers, et la douleur ne diminuant pas d’un iota, je décide d’essayer de la manipuler moi-même. Je la prends donc à deux mains et je la pousse vers sa place vide mais rien ne bouge. A la deuxième tentative, je force un peu plus et là, elle coulisse miraculeusement. Mes ligaments internes, qu’elle avait distendus comme deux élastiques au moment de la luxation, contribuent à la ramener automatiquement à son emplacement normal.
J’ai toujours très mal mais je suis surtout secoué psychologiquement après la vision de ma jambe si déformée. En revanche, au niveau sensations, j’avoue que ça va mieux car je vois bien que tout est désormais à sa place. Et du coup, je peux à nouveau marcher. Comme un canard boiteux, peut-être, mais au moins j’avance, libérant enfin l’accès à bord pour tous ceux qui poireautaient derrière moi.
Je finis de pousser mon vélo jusqu’en haut. Là, une jeune femme d’équipage me montre où le parquer pendant la traversée tout en me demandant comment ça va. Comme je n’ai qu’une seule envie, à savoir filer m’asseoir, je lui réponds que tout va bien alors qu’en fait, tout va mal ! Mais chose incroyable, une quinzaine de minutes plus tard, pendant que le bateau navigue quelque part entre la Grèce et la Turquie, une grande partie de la douleur a disparu. C’est fou qu’elle ait pu monter si haut en une fraction de seconde, puis dégringoler à ce point le quart d’heure suivant. Tant mieux pour moi.
Le port de Bodrum
Peu après, le bateau accoste à Bodrum, station balnéaire ultra fréquentée où le tourisme de masse est roi. C’est exactement ce que je n’aime pas mais à cet instant là, je m’en fous complètement : la seule chose qui compte, c’est mon genou. Notamment, je m’interroge sur l’étendue des dégâts causés par cette luxation. Je suis un peu inquiet car je n’ai pas l’impression d’être en état de faire du vélo. Je commence carrément à me demander si mon périple ne va pas se terminer dans cette ville, l’ancienne Halicarnasse. Alors bien sûr, ce serait un lieu d’arrivée prestigieux pour mon voyage, mais j’aimerais bien pouvoir continuer un peu quand même.
Quelques pierres du mausolée d’Halicarnasse, l’une des Sept Merveilles du Monde, ont servi à construire la forteresse de Bodrum
Initialement, j’avais prévu de rouler un peu pour sortir de la ville avant la tombée de la nuit, puis bivouaquer quelque part dans la nature. Mais là, je sens bien que je dois reposer ce genou récalcitrant. Je décide donc de me poser pour la nuit dans une petite pension bon marché, à l’écart du centre-ville animé que je trouve surfait. Je passe la soirée à noyer ma déception dans la gastronomie locale, en m’empiffrant de kebabs certes gras, mais tellement réconfortants. Demain, en fonction de mes sensations, j’aviserai…
Après avoir passé une partie de la nuit à cogiter, et l’autre partie à essayer de digérer mon repas local, j’ai la bonne surprise, au petit matin, de sentir que la douleur a presque disparu. Elle se réveille dès que je tourne la jambe sur le côté mais si je la garde bien droite, je n’ai plus vraiment mal. C’est une bonne surprise, je vais pouvoir continuer mon voyage.
Je suis globalement rassuré même si, au fond de moi, je sens quand même que mon genou est fragilisé. Je suis donc un peu sceptique mais je reprends la route : je verrai bien en pédalant si ça passe ou si ça casse…
La sortie de Bodrum
A la sortie de la ville, je me retrouve nez-à-nez avec deux sangliers. A mon approche, ils détalent à travers un petit terrain, pentu et recouvert de végétation, au beau milieu des maisons. Dans ce pays où quatre-vingt-dix-huit pour cent de la population est musulmane, je ne m’attendais pas à croiser ce couple de mammifères dotés d’un groin. Renseignements pris, il s’avère qu’ils pullulent dans la nature turque, tout autant d’ailleurs que dans une bonne partie de l’Europe et de l’Asie.
Les premiers kilomètres montent pas mal et je suis heureux de constater que mon genou tient plutôt le coup : je n’ai pas vraiment mal, sauf quand je tords un peu la jambe. Et bien j’ai qu’à ne pas la tordre !
L’itinéraire côtier offre de jolies vues plongeantes sur la mer. Je comprends mieux pourquoi il y a tant de touristes dans les parages.
Les environs de Bodrum
J’arrive assez rapidement sur une quatre-voies. En Turquie, les vélos y sont autorisés, de même que sur les autoroutes. Moi qui suis si attaché aux conditions de sécurité à vélo (par exemple, je fais partie des zéro pour cent de cyclistes environ qui ne grillent pas les feux !), je suis surpris de prendre tant de plaisir à pédaler sur ces routes à grande vitesse. Les voitures foncent, un certain nombre d’entre elles pulvérisant allègrement la limitation à cent dix. Les bus et les poids lourds ne sont pas en reste car ils me doublent également en roulant vite. Leur moteur me hurle dans les oreilles et leur pot d’échappement me crache dans les poumons. Mais malgré tout, comme la bande d’arrêt d’urgence sur laquelle je roule est plutôt large et que je surveille dans mon rétro tous les véhicules en approche, j’ai plutôt tendance à m’éclater ici.
Quand un poids lourd me double, voire plusieurs à la suite, ils m’emportent dans leur sillage grâce à l’appel d’air qu’ils créent derrière eux. Cela me fait accélérer considérablement, a fortiori dans les descentes, et je me retrouve à rouler à des vitesses bien supérieures à celles que j’atteindrais à la seule force des mollets. Cette quatre-voies a décidément un petit côté grisant.
Par contre, il y a quelques portions sur lesquelles la largeur de la bande est très réduite voire inexistante et dans ces endroits, je me retrouve à rouler avec voitures et camions sur la file de droite. Ça, ce n’est plus du tout une partie de plaisir. Cela me vaut un ou deux coups de klaxon mais globalement, la cohabitation se passe bien car quasiment aucun véhicule ne me frôle.
Mais je prends vite conscience que sur cette quatre-voies, il n’y a aucun paysage à voir, aucun village à traverser ni aucune rencontre à faire. Alors je décide d’en sortir pour aller voir de plus près à quoi ressemble la Turquie profonde.
Petite route de montagne (sud-ouest de la Turquie)
Dans cette région paisible de la Turquie, la petite route de montagne qui défile sous mes pneus est bordée de fleurs. Les voitures sont rares et le silence règne, c’est tout le contraire de la quatre-voies d’où je viens.
Après quelques montées, j’arrive dans la petite ville de Milas, que je traverse assez rapidement. Elle est posée dans une vallée encaissée, aux pieds de montagnes dont les flancs sont défigurés par les carrières de marbre. Ce dernier a servi il y a bien longtemps à la construction des nombreux monuments antiques de la région.
A la sortie de la ville gît paisiblement un joli lac bleu. Je décide de faire un petit détour pour aller le voir de plus près. Sur ses berges, quelques habitants du coin sont venus poser leur table de camping pour pique-niquer en famille.
Le lac de Milas
Je poserais bien ma tente par là, face à ce joli paysage lacustre mais sans que ce soit la grande foule, il y a quand même des gens un peu partout. Je quitte donc le lac pour planter ma tente quelques kilomètres plus loin.
Vient l’heure de faire le bilan de la journée. J’ai roulé modérément, soixante-et-un kilomètres précisément mais avec quand même huit cents mètres de dénivelé positif, ce qui n’est pas rien avec un vélo toujours aussi lourd, mais avec en prime un genou en vrac, désormais. Mais ce genou justement, il ne m’a pas trop fait souffrir, finalement. Par contre, il a pas mal gonflé et je n’aime pas trop ça.
Après une nuit passée dans le silence des montagnes, j’attaque la journée suivante avec de grosses montées. Bien que pas encore réveillé, mon genou tient toujours le choc.
Au fil de la journée, la chaleur devient de plus en plus intense. A l’entrée d’un village, je m’arrête pour discuter avec un habitant devant son hangar. Il s’appelle Ashkan, il est menuisier et il me fait visiter son atelier.
Ashkan dans son atelier
Je ne sais pas si j’ai la tête du type qui souffre à pédaler dans les montagnes en plein cagnard mais quand je pars, Ashkan envoie son fils Inan m’offrir une grande bouteille d’eau fraîche : un moment d’allégresse pure pour un cyclotouriste en surchauffe. J’avais déjà entendu parler de l’hospitalité turque mais à ce moment précis, elle devient réalité.
Inan m’offre une grande bouteille d’eau fraîche
Je poursuis ma route mais quand j’arrive dans la ville de Yatagan, mon genou est proche de l’obésité. Pourtant, je n’ai roulé que trente-huit kilomètres aujourd’hui, mais sous un soleil qui m’a fait fondre et surtout, avec près de neuf cents mètres de dénivelé positif. J’ai notamment dû forcer pas mal pour grimper plusieurs pentes entre 10 et 15%. Cet effort de pédalage soutenu voire intense, à l’évidence, mon genou ne l’a pas adoré : il est devenu énorme.
Je décide de m’arrêter dans cette ville inconnue pour reposer mon genou pendant quelques jours.
Je vais également le glacer (avec des petits pois surgelés, n’ayant rien d’autre) et acheter une genouillère dans une pharmacie.
Soixante-douze heures plus tard, mon genou n’a pas dégonflé d’un millimètre. La douleur est faible mais elle est toujours là, notamment sur certains mouvements de la jambe. Entretemps, j’ai appris qu’avec ce type de blessures, il y avait une récidive pour plus d’une personne sur deux. C’est énorme. Or, j’ai encore des montagnes à grimper et dès ma prochaine étape, mon GPS vélo m’annonce qu’une côte à 24% m’attend ! C’est monstrueux. Je ne pourrai sans doute pas la monter, chargé comme un âne, il faudra donc que je pousse le vélo. Mais c’est justement en le poussant, sur une passerelle pourtant beaucoup moins pentue, que ma rotule s’est fait la malle : cela ressemble à des conditions idéales de récidive.
Et puis globalement, je me rends bien compte que je ne peux pas forcer normalement en pédalant. Alors avec toutes ces montagnes qui m’attendent, il va bien falloir que je me rende à l’évidence : la suite de mon périple est compromise.
Dans la campagne turque
Je passe des heures à réfléchir à ce que je dois faire ou pas, à ce qui est prudent ou imprudent, et à la récidive qui me pend au nez si je m’engage dans les montagnes de la région. Mon genou est toujours très enflé, je le sens vraiment fragilisé, la suite du parcours est très sportive, trop sans doute, et la luxation de ma rotule a été un moment extrêmement désagréable que je n’ai absolument pas envie de revivre.
Après trois jours de repos passés tout seul dans une petite chambre d’hôtel miteuse à Yatagan, à réfléchir dans tous les sens à la suite que je dois donner à mon périple, je finis par prendre ma décision : je vais faire demi-tour et rentrer à la maison. Le coup est rude et quelques gouttes s’échappent de mes yeux, les nerfs me lâchant brutalement. C’était le voyage d’une vie, je regrette tellement qu’il se termine ainsi.
Mais très vite, les belles images des endroits que j’ai traversés depuis le départ me reviennent à l’esprit. La douceur de vivre en Italie, les beauté de la côte et des forêts croates, les superbes montagnes albanaises, le volcan impressionnant en Grèce… Je repense aussi à tous les gens amicaux et si bienveillants que j’ai rencontrés depuis le premier jour. Je n’avais jamais vraiment repensé à tout ça en pédalant quotidiennement car finalement, ce qui m’intéressait chaque fois que je roulais, c’était ce qui m’attendait le jour même ou le lendemain, et non pas ce que j’avais déjà vécu.
Toutes ces images me réconfortent et me font prendre conscience que, même si aujourd’hui, tout se termine en eau de boudin, j’ai quand même eu la chance de vivre une aventure exceptionnelle. J’ai atteint mon objectif initial, Athènes, et je l’ai même dépassé puisque je suis arrivé jusqu’ici, en Turquie. Simplement, je ne vais finalement pas pouvoir pousser jusqu’en Cappadoce, ni rentrer chez moi à vélo.
Pour le retour justement, le plus simple consisterait à prendre l’avion. Mais j’ai traversé toute l’Europe pendant plus de deux mois pour arriver jusqu’ici en Asie, en utilisant uniquement mon vélo. C’est-à-dire un moyen de transport respectueux de l’environnement. Je ne peux quand même pas décemment polluer un tel voyage en prenant maintenant un vol pour rentrer à la maison.
Je rentrerai donc en bateau, en voiture de location et, quand il n’y aura aucune autre possibilité, j’avancerai à vélo. Alors bien sûr, la voiture polluera un peu mais ce ne sera que sur de courtes distances et il n’y aura de toute façon aucune commune mesure avec l’avion. Ce retour prendra du coup beaucoup plus longtemps, environ deux semaines au lieu de deux ou trois heures par les airs, et il me coûtera au total beaucoup plus cher qu’un vol en aller simple. Mais au moins, mon bilan carbone restera honorable et je serai fier de mon voyage jusqu’au bout. Et puis, ces quinze jours de retour me serviront de transition vers le retour à la vie normale…
La mosquée Rüya Gibye
Pour commencer, je n’ai pas vraiment le choix : je vais devoir retourner à Bodrum à vélo.
La campagne turque, pendant le chemin du retour
Je prends donc le même chemin qu’à l’aller et je repasse devant les mêmes paysages : des forêts verdoyantes, la mer d’un bleu intense…
Après les quelques dizaines de nuits que j’ai eu la chance de passer sous la tente au cours des dernières semaines, c’est maintenant l’heure de mon dernier bivouac.
Avec un dénivelé globalement descendant malgré quelques pentes raides, ma patte folle tiendra le coup jusqu’à Bodrum.
Le chemin du retour :
Traversée Bodrum (Turquie) – Île de Kos ( Grèce)
L’île de Kos
Traversée Kos – Athènes
Athènes
Traversée Patras (Grèce) – Ancône ( Italie), après la jonction Athènes – Patras en voiture de location
Ancône
Traversée Gênes (Italie) – Barcelone (Espagne), après la jonction Ancône – Gênes en voiture de location
De Gênes à Barcelone
Retour à Bordeaux en voiture
Voiture de location neuve et dernière galère du périple : crevaison à Tarrega !
Infos pratiques
Les automobilistes turcs et les cyclistes
Comme dans tous les pays précédents que j’ai traversés, je n’ai pas rencontré le moindre problème de sécurité avec les automobilistes turcs. Je n’ai jamais vraiment croisé de chauffards. Il y a bien eu quelques bolides qui fonçaient sur les quatre-voies limitées à cent dix kilomètres heure, mais ils passaient toujours loin de moi et ne me mettaient donc jamais en danger. Sur les petites routes de campagne et de montagne ainsi que dans les villes et villages, les voitures faisaient là aussi toujours très attention à moi. D’après ce que j’en ai vu, les routes turques m’ont donc paru très sûres pour les cyclistes.
Les itinéraires Eurovélo
Les itinéraires Eurovélo ont fait leurs preuves depuis longtemps. Au nombre de dix-sept à ce jour, ils sillonnent l’Europe du Cap Nord à Malte, et de l’Irlande occidentale aux confins de l’Orient.
L’esprit est de constituer un réseau cohérent de grands itinéraires cyclables européens, en connectant les capitales et les grandes villes du continent. Le patrimoine naturel et culturel est mis en valeur tout en favorisant le tourisme durable.
L’un des principes de base d’Eurovélo, c’est de toujours prendre en compte la sécurité des usagers. Ainsi, les routes doivent être balisées et continues. Elles doivent également éviter les routes à fort trafic. Elles combinent donc pistes cyclables et routes secondaires, voire chemins balisés.
Le réseau Eurovélo
La Turquie est très peu concernée par le réseau Eurovélo. Elle ne compte en effet que deux petites portions d’itinéraires sur son territoire : l’une est située dans la partie européenne du pays (au nord-ouest d’Istanbul), et l’autre se trouve autour d’Izmir. Lien vers le réseau Eurovélo en Turquie
Mais si j’évoque quand même ce vaste réseau cyclable ici, c’est parce que les nombreux itinéraires qu’il comporte à travers le continent peuvent s’avérer utiles pour pédaler jusqu’en Turquie, quel que soit le pays européen d’où l’on vient.
Se rendre à Bodrum en bateau, depuis la Grèce
Il est facile de se rendre à Bodrum en bateau depuis la petite île grecque voisine de Kos puisque plusieurs compagnies assurent la traversée. On trouve donc normalement des ferries tous les jours.
Prix : il varie selon la saison et la compagnie mais il tourne autour de 30 euros pour un piéton adulte. Le transport du vélo est gratuit (demander confirmation à l’achat du billet).
Durée : environ 30 minutes.
Attention : si en basse saison on peut en général acheter son billet au dernier moment, en haute saison il est préférable de réserver à l’avance.
Douane : cette traversée inclut un passage de frontière (Grèce – Turquie), ce qui signifie qu’il faut prévoir le temps de passage de la douane. Mais surtout, les voyageurs à vélo s’exposent à la confiscation des couteaux, cartouches de gaz etc. D’après ma propre expérience, les douaniers ne sont pas très regardants : à l’aller, ils m’ont laissé passer sans me contrôler et au retour, ils m’ont contrôlé mais sans rien confisquer. En revanche, lors d’une autre traversée (en Italie), on m’a confisqué toutes mes cartouches de gaz, donc c’est une situation rageante qui peut toujours se produire quand on passe une douane…
Prix : très variable, de moins de 10 euros à près de 20 euros pour un piéton selon la saison, la compagnie, le type de navire etc. Gratuité pour le vélo.
Durée : de 45 mn à 1h45, selon le type de navire.
Fréquence : en basse saison, il n’y a que deux traversées par semaine (à vérifier, cette fréquence pouvant changer).
Attention : en haute saison, il est plus prudent de réserver son billet à l’avance.
J’ai pris tout mon temps pour profiter au maximum de ma dernière journée en Albanie. La conséquence immédiate, c’est qu’il est déjà tard lorsque je passe la frontière grecque, et qu’il ne me reste plus beaucoup de temps pour trouver un spot de bivouac avant la tombée de la nuit.
En plus, je me trouve dans une partie très montagneuse de la Grèce. D’un côté de la route, il y a la montagne, de l’autre, le ravin et partout, le terrain est à la fois très boisé et trop pentu pour poser ma tente dans les parages.
Mais comme toujours, à force de rouler, je finis par trouver un petit chemin en bord de route, au bout duquel quelques arbres pourront cacher ma tente de la vue des rares voitures qui passent par ici.
Le lendemain, je rencontre une galère que je n’ai absolument pas anticipée : la soif.
Après un bivouac non loin de la ville de Ioannina, je donne mes premiers coups de pédales de bon matin, dans de jolis paysages de montagne et dans l’insouciance totale : comme toujours depuis quarante jours que j’ai quitté la France, je trouverai bien de l’eau en chemin.
Au fil des heures, le soleil chauffe de plus en plus et le problème qui se pose, auquel je n’avais pas pensé un seul instant, c’est que mon itinéraire ne me fait pas traverser le moindre village. Habituellement, je rencontre presque tous les jours des habitants qui acceptent gentiment de remplir mes gourdes, sinon, j’attends de trouver une fontaine sur mon chemin. Et en dernier recours, il me suffit d’acheter des bouteilles d’eau dans la première petite épicerie que je croise, ce que je n’ai fait qu’une seule fois jusque là.
Mais aujourd’hui, mes bidons sont vides et autour moi, rien ! Pas un village, pas un habitant, pas une fontaine, pas une épicerie. En d’autres termes, je suis à sec. En plus, il fait chaud et je transpire dans les montées, bref, je suis assoiffé. A midi, je dévore la tomate, le demi-concombre et l’orange qu’il me reste afin de m’hydrater un peu, puis j’étudie la carte du coin sur mon GPS pour essayer de trouver un village proche. En vain, il n’y a pas âme qui vive dans les parages.
Personne à des kilomètres à la ronde
Je suis au pays de la mythologie grecque et puisque j’ai le gosier si sec, je ne peux m’empêcher de penser aux Danaïdes, ces cinquante sœurs qui furent condamnées à verser éternellement de l’eau dans un vase sans fond : quel gâchis !
Mais comme souvent depuis le début du périple, je fais une rencontre providentielle. Une fourgonnette des services de l’autoroute voisine passe à un croisement, assez loin devant moi. Elle s’arrête un peu plus loin, fait demi-tour et revient vers moi avant de s’arrêter à ma hauteur. Le conducteur, avec son gilet jaune de l’autoroute, me demande où je vais. Je lui explique mon trajet mais il n’a pas vraiment l’air de me croire. Il est persuadé que je veux emprunter l’autoroute à vélo. Il essaie de m’en dissuader en m’expliquant que c’est interdit et que surtout, c’est dangereux. N’ayant plus huit ans depuis longtemps, je suis au courant de tout cela et je n’ai en effet pas prévu d’aller me faire aplatir aujourd’hui par un bolide à quatre roues. Malgré son insistance plutôt lourde, il est franchement sympa.
Au moment où il s’en va, je lui demande s’il y a un village dans le coin où je pourrais acheter de l’eau. Il me répond que non, qu’on est loin de tout ici et qu’il n’y a rien. Il retourne à sa fourgonnette, me laissant K-O debout après une info aussi sèche. Mais il en ressort avec deux petites bouteilles d’eau de vingt-cinq centilitres chacune, qu’il me tend dans un grand sourire.
Le sauveur de l’autoroute !
Quand on vit quotidiennement avec l’eau courante et qu’on a l’habitude d’ouvrir un robinet pour que l’eau coule à flots, on n’a pas idée de ce que peut représenter un petit demi-litre d’apparence aussi ridicule. Mais pour qui vit dans la nature et se retrouve assoiffé pendant des heures, en plein cagnard et en plein effort, comme moi aujourd’hui, alors ces deux micro-bouteilles valent tout l’or du monde. Il y a cinq minutes à peine, j’étais au fond du trou et là, d’un seul coup, je suis le plus heureux des hommes. La vie est belle.
Je descends la première bouteille cul-sec et je garde la seconde pour le bivouac du soir : j’aurai besoin d’un peu d’eau pour préparer mon dîner grâce à un sachet lyophilisé que je garde toujours en réserve, dans la perspective d’un jour où je n’aurais rien à manger. Je réalise alors que ces deux bouteilles sont à la fois beaucoup et trop peu. Elles me sauvent momentanément mais elles sont insuffisantes quand même.
Une petite fabricante de miel grecque
La chance me fait alors passer devant une maison isolée dont je me demande ce qu’elle peut bien faire là, si loin de tout. Son habitant jardine à proximité de la porte d’entrée. J’ouvre le dialogue par un kalimera amical (bonjour) censé briser la glace et le mettre en confiance. Il me répond la même chose mais sur le ton d’un ours hostile, avant de tenter de se réfugier dans sa maison. Je réalise alors que, habitant dans un endroit aussi reculé, il est légitime qu’il se méfie du premier type qui passe par là, a fortiori lorsqu’il s’agit d’un voyageur un peu cradingue comme moi.
Je lui demande alors très vite, juste avant qu’il ne passe le seuil de la porte, s’il peut me dépanner en eau. Il répond en râlant fort, me tourne le dos et rentre chez lui brusquement en claquant la porte. J’attends là un instant car je crois avoir compris qu’il va revenir quand même, et je profite de ces quelques secondes pour sortir une petite tour Eiffel bleue de mes sacoches : on ne sait jamais, ça peut toujours servir.
Le type revient alors, muni d’une grande bouteille d’eau de deux litres mais en arborant une tête de tueur : il me fait comprendre que s’il me donne cette eau, c’est juste pour que je dégage le plus vite possible. Mais moi, en voyant cette immense bouteille, qui prend sous ce cagnard autant de valeur qu’un ticket de loto gagnant, je pars tout seul dans un grand éclat de rire, sans doute un peu nerveux. Puis je couvre mon sauveur, le deuxième en vingt minutes à peine, de plusieurs efkaristo consécutifs (merci). Et bien sûr, je lui tends la petite tour Eiffel.
C’est fou l’impact de ce petit objet bleu sur les gens à qui je l’offre. Chaque fois, ils rient à tue-tête lorsqu’ils prennent la petite tour dans leurs mains. Mais avec ce grec, c’est différent. Il y a deux secondes, il semblait prêt à m’égorger et là, il se met subitement à rire avec moi comme si j’étais son vieux pote ! Ce petit cadeau l’a mis en confiance. Du coup, ce taiseux devient intarissable et n’arrête plus de me questionner sur mon voyage. Mais je finis par m’éclipser quand même, trop content de ces deux rencontres successives qui m’ont sorti d’une sale situation.
Il n’y a pas âme qui vive dans ce coin du pays.
Douceur de vivre à la grecque
La journée ayant été difficile physiquement à cause du gros dénivelé, de la chaleur et de la soif, je décide d’arrêter de pédaler un peu plus tôt que d’habitude, pour me reposer. Je vais poser ma tente dans les parages et profiter tranquillement de la soirée, quelque part dans la nature.
Je trouve assez rapidement un spot vraiment agréable, qui le serait encore plus si au préalable, un troupeau de vaches n’avait pas déposé tout un bataillon de bouses un peu partout. Les plus sèches sont inodores et ne me posent pas de problème, mais les plus fraîches sont répugnantes. Déjà, elles sont énormes mais surtout, elles sont colonisées chacune par des dizaines de grosses mouches vertes, qui n’ont rien trouvé de mieux à faire que de creuser une multitude de galeries dans cette odorante matière fécale d’origine bovine. C’est bien la première fois de ma vie que je suis amené à observer aussi finement cette manifestation peu ragoûtante de la nature, et j’espère surtout que ce sera la dernière.
Bien sûr, ce n’est pas le sujet le plus élégant à aborder mais cela fait partie du voyage, alors je ne peux pas le censurer non plus.
Une fois ma tente montée, je m’en éloigne un instant en faisant évidemment très attention où je pose les pieds. Je finis par me planter devant un gros buisson. Là, alors que je marque tranquillement mon territoire, j’entends subitement un gros bruissement de feuilles dans la végétation que je suis justement en train d’arroser. Je pense immédiatement à un serpent. Et en effet, un gros reptile surgit juste à côté de mon pied droit mais ce n’est pas celui que je crains : c’est une petite tortue sauvage.
Daisy la tortue
Par chance, elle semble être passée entre les gouttes puisqu’elle est toute sèche. Elle est mignonne comme tout, bien qu’étant furieuse après moi car j’ai marqué un territoire qui n’était pas le mien : c’est le sien. Je la baptise Daisy, du nom de sa congénère que nous avions à la maison quand j’étais petit. Puis je retourne à ma tente, lui rendant ses terres.
Croiser ce petit animal sur ma route est assez symbolique car nous présentons quelques similitudes, lui et moi. Nous n’avançons pas bien vite, et nous emportons tous les deux notre maison avec nous : la tortue sur son dos et moi dans mes sacoches de vélo.
L’avantage quand on roule à la vitesse de ce petit animal tout pataud, c’est qu’on peut prendre tout son temps, ce qui permet de profiter beaucoup plus du voyage. On n’a aucune contrainte, on peut rester aussi longtemps qu’on veut dans les endroits où l’on se plaît puisque on n’est attendu nulle part. Il suffit juste de profiter du moment présent, que ce soit face au paysage ou le temps d’une rencontre. Savourer ces instants sans se soucier du temps qui file, il s’agit bien d’un luxe qu’on ne possède jamais, dans la vie de tous les jours.
Le territoire de Daisy, sur lequel j’ai donc posé ma tente, est un petit coin de nature calme et paisible qui fait face aux montagnes. Dans une telle quiétude, la petite tortue sauvage et moi allons bien dormir.
En Grèce, le nord du pays n’est globalement pas touristique. Ici, je découvre la Grèce profonde, bien loin de la carte postale classique représentant des petites églises blanches surmontées de coupoles bleues, avec une mer d’azur en toile de fond.
Plus je descends vers le sud, plus les champs fleuris succèdent aux montagnes enneigées. Les fleurs sont omniprésentes, elles remplissent les champs, je n’en ai jamais vu autant. Les paysages en sont tout tachetés, ce qui les enjolive et tant mieux car franchement, sans ce saupoudrage de couleurs, ils seraient beaucoup plus banals. Un vrai petit paradis pour les abeilles.
Dans cette partie du pays, je traverse peu de villages et aucune ville. En conséquence, contrairement à ma traversée de l’Albanie, je ne fais pas beaucoup de rencontres. Mais comme la nature est omniprésente, j’y trouve mon compte quand même.
Ici, il y a un avantage et un inconvénient. L’avantage, c’est que cette nature fleurie est agréable et très propice au bivouac. Mais l’inconvénient, c’est que justement, le bivouac est interdit en Grèce !
Bivouac dans les environs d’Etoliko
Pourquoi cette discrimination à l’encontre des bivouaqueurs ? D’une part, pour protéger la nature du comportement de certains campeurs peu scrupuleux. D’autre part, pour préserver la tranquillité des habitants. Enfin et surtout, pour limiter au maximum les risques d’incendies.
Les contrevenants risquent une amende, et il faut savoir que la police traque de plus en souvent les bivouaqueurs en Grèce, notamment en haute saison.
Pour ma part, si j’ai pris le parti de ne pas respecter cette interdiction, ce dont je ne suis pas spécialement fier malgré mes convictions pro-bivouac, c’est pour plusieurs raisons. Déjà, quand je dors sous la tente, je ne laisse absolument aucune trace de mon passage dans cette nature que j’aime, et j’emporte donc tous mes déchets. Ensuite, je bivouaque toujours discrètement, loin des habitations, afin de ne déranger personne. Enfin et surtout, je n’allume mon réchaud que lorsque la végétation est mouillée, ou lorsqu’il n’y en a pas du tout à proximité. Et en prime, quand il y a déjà des déchets par terre dans la zone où je pose la tente, je les ramasse et je les emporte avec moi pour les jeter dans la première poubelle que je trouve après avoir levé le camp, histoire que les lieux soient plus propres après mon passage qu’avant.
Alors bien sûr, ces précautions ne m’autorisent pas pour autant à bivouaquer dans ce pays et j’en suis bien conscient. Mais quitte à ne pas respecter la règlementation, autant le faire proprement et sans déranger personne.
Un soir, je longe des champs fleuris qui me séparent du lac Amvrakia, au loin. Il a l’air paisible et puisqu’il m’attire comme un aimant, je décide de quitter la route pour prendre un petit chemin dans sa direction, car j’aimerais bien poser ma tente sur la berge.
En direction du lac Amvrakia
Je roule un petit moment avant de trouver un site qui a l’air accueillant pour passer la nuit, à une poignée de mètres de l’eau. Mais une fois la tente posée, je repère deux pêcheurs à quelques centaines de mètres : moi qui aime bien bivouaquer discrètement, ça tombe mal !
La rive du lac Amvrakia
Ma tente ne se voit quasiment pas de loin, toute verte au milieu de la verdure, mais j’aime autant aller les voir pour discuter un peu et voir à qui j’ai affaire. Avec mon appareil photo en bandoulière, je passe vraiment pour le parfait touriste qui n’inspire aucune méfiance.
Avec mes voisins pêcheurs
Ils ont attrapé une poignée de poissons et s’apprêtent à repartir.
Nous discutons un peu avant qu’ils ne rentrent chez eux déguster le fruit de leur pêche. Une fois partis, je me retrouve tout seul sur la berge, à savourer égoïstement la vue sur le lac.
Le lac Amvrakia
Comme souvent après de bonnes journées de pédalage, je me couche tôt, juste après le soleil. C’est le moment que choisissent les crapauds du voisinage pour commencer à hurler. Et quand ils s’y mettent en bande, ils ne font pas dans la discrétion. Quel boucan ! Peu après, les quelques oiseaux qui ont prévu eux aussi de passer la nuit au bord du lac, décident de faire concurrence à mes voisins batraciens. Le cocktail coassements – gazouillis qui en résulte n’est pas le plus mélodieux qui soit mais finalement, il n’est pas désagréable non plus. Surtout, il me rappelle que je suis en pleine nature, et cette musique vaut tellement mieux que les klaxons que j’entendrais si je dormais en ville. En quelques minutes, elle me berce et je m’endors.
Sur la rive du lac Amvrakia
L’une des bonnes surprises du périple, c’est justement le bivouac. J’ai toujours aimé ça mais je n’en fais qu’un ou deux par an, au cours de randonnées en montagnes avec ma femme et nos amis. Là, depuis deux mois et demi que j’ai quitté la France, j’ai déjà passé plusieurs dizaines de nuits sous la tente. Ce n’est pas le fait de bivouaquer en lui-même qui me séduit tant, c’est surtout celui de dormir dans des coins sauvages, souvent vierges de toute présence humaine, excepté la mienne. Je prends un plaisir fou à observer la nature sous toutes ses coutures. Admirer le coucher du soleil tous les soirs, que ce soit depuis une forêt, une crique ou une montagne. Puis me faire bercer par le bruit du vent, de la pluie ou d’une rivière dès que je ferme les yeux, le plus souvent avec quelques cris d’animaux en toile de fond. Ensuite, tous les matins sans exception, c’est le chant des oiseaux qui me réveille dès les premières lueurs, qui apparaissent une vingtaine de minutes avant que le soleil ne pointe le bout de son nez derrière l’horizon. Et enfin, quand je sors de la tente pour prendre mon café, je me trouve au milieu d’un champ tout givré, ou bien sur la rive d’un lac, ou encore face à un paysage doré par la lumière de l’aube.
Ce matin, c’est sous les arbres et face au lac Amvrakia que je me réveille. Une fois le petit déjeuner englouti et mes affaires préparées, j’ai un peu de mal à m’arracher à ce spot si nature. Mais il faut bien poursuivre ma descente vers le sud. Par chance, l’itinéraire que me propose mon GPS vélo me fait emprunter des petits chemins isolés très agréables.
Les champs d’orangers et de citronniers sont de plus en plus nombreux sur le bord de la route, il y en a désormais sur des kilomètres sans interruption. Il n’y a toujours pas un seul touriste et je croise très peu d’habitants. Même si les rencontres, que j’affectionne tant, commencent à me manquer dans ce pays, je dois avouer que je me sens bien, tout seul sur ces chemins déserts.
Champ de fleurs et d’oliviers
La Grèce du nord est décidément une région très peu touristique. Du coup, je finis par arriver à la mer sans avoir jamais croisé personne, ou presque.
Une fois sur le littoral, le soleil tape mais pour compenser, Éole souffle assez fort, ce qui a le double effet de me rafraîchir et d’agiter la mer. Elle est hachée et dans les villages fantômes que je traverse, les vagues se fracassent contre les digues, projetant parfois de grandes gerbes d’eau sur la route, et des embruns sur ma figure.
Je réalise la chance folle que j’ai de vivre des moments si grisants sur mon vélo, face à ces panoramas naturels bruts. Depuis l’Albanie, dont j’ai trouvé les paysages si sauvages, si purs, je passe la plupart de mon temps en pleine nature, que ce soit de jour en pédalant ou de nuit sous ma tente. Lacs et rivières, forêts et fleurs, voilà l’environnement dans lequel je vis quotidiennement depuis quelques semaines maintenant, et je me rends compte que j’aurais bien du mal à m’en passer. J’ai perdu mes repères de citadin depuis longtemps et j’ai un peu l’impression de m’ensauvager.
Au fond, des montagnes aux cimes enneigées surplombent la mer
Je vis au quotidien avec peu de choses et bizarrement, ce dénuement ne me crée aucun manque, un peu comme l’un des illustres représentants de la Grèce antique, Diogène de Sinope, qui décéda d’ailleurs à Corinthe, ma prochaine étape.
La différence, c’est que lui s’était volontairement plongé dans la pauvreté, dans le but de s’affranchir de toute forme de servitude, notamment matérielle. Alors que moi, c’est juste parce que je ne pouvais pas emporter ma maison sur mon vélo ! C’est moins glorieux bien sûr et pourtant, le résultat est étonnamment le même : je me retrouve heureux de la simplicité dans laquelle je vis au quotidien, elle me fait du bien et bizarrement, j’aime cet inconfort. Est-ce cela la vraie liberté, comme l’affirmait Diogène ? Je n’en sais rien mais c’est vrai que cette sobriété de chaque instant, à laquelle je ne suis pas habitué, combinée au fait que je roule depuis quelques milliers de kilomètres sans la moindre contrainte, me convainc que oui : avec mon vélo et ma tente, je me sens libre comme jamais…
A ce stade du périple, je ressens un sentiment de plénitude assez fort. Et dire que je ne suis plus qu’à deux cents kilomètres d’Athènes, ma destination finale. C’est-à-dire à peine deux jours de pédalage si j’accélère un peu, et trois si je prends tout mon temps. Je ne peux pas croire que ce soit déjà l’heure de faire demi-tour : comment un voyage aussi exaltant peut-il déjà approcher de la fin ? J’ai du mal à accepter cette réalité : il y a encore tellement de choses à voir, tellement de moments à vivre par ici. J’en arrive alors à une conclusion qui me semble subitement évidente : il n’est pas question de faire demi-tour maintenant, je vais continuer encore un peu. Pourquoi pas jusqu’en Turquie, puisqu’elle est située juste derrière ? L’idée me rend fou de joie : il y a encore de beaux moments qui m’attendent…
Corinthe
Mais pour l’instant, je dois rejoindre Athènes et pour cela, je vais transiter par Corinthe, dont je veux voir le fameux canal.
Quelques kilomètres avant d’y arriver, je suis coursé par trois chiens alors que je roulais tranquillement sur un petit chemin caillouteux. Il sert à accéder aux quelques fermes qui sont disposées de part et d’autre de ce sentier.
Les trois bêtes sont agressives et elles aboient en boucle. Elles sont de gabarit moyen puisqu’elles culminent entre la taille d’un petit roquet et celle d’un berger allemand.
Je me suis déjà fait courser par des chiens au moins une vingtaine de fois depuis mon départ. C’est inhérent, hélas, au voyage à vélo même si le plus souvent, ces poursuites ne durent pas bien longtemps.
D’un pays à l’autre, ces bestioles sont toutes les mêmes : les mollets qui pédalent les rendant folles, elles éprouvent systématiquement le besoin irrépressible de pourchasser le moindre cycliste qui passe à proximité de leurs mâchoires. Je sais par expérience qu’il est alors inutile d’accélérer pour essayer de les distancer car ces chiens courent bien plus vite que je ne roule, sauf quand je suis en descente, ce qui m’a d’ailleurs déjà sauvé la mise deux ou trois fois.
Mais aujourd’hui, la particularité de ces trois molosses, c’est qu’ils sont plutôt organisés : l’un court à ma gauche, l’autre à ma droite et le troisième juste derrière moi. Et si je ne suis pas aussi terrorisé que le cerf poursuivi par la meute, je dois bien dire que ce harcèlement en règle est assez efficace car je n’en mène pas large.
En général, les chiens qui me pourchassent abandonnent au bout de quelques centaines de mètres puis rentrent chez eux. Pas ces trois là. Au bout d’un kilomètre, celui de droite m’attaque carrément : il me mord tout en galopant mais coup de chance pour moi et manque de pot pour lui, c’est dans la semelle de ma chaussure de randonnée que se plantent ses ratiches aiguisées. La morsure s’avère totalement indolore pour moi mais aussi pour la bête, puisque ses dents n’ont visiblement pas été abîmées par ma semelle pourtant rigide. Désormais surexcité, le canidé continue à me poursuivre en jappant de plus belle. Tout en roulant, je riposte par un grand coup de pied de défense si maladroit qu’il me déséquilibre et manque de me faire tomber. J’effleure à peine son museau.
Hasard ou improbable coordination canine, c’est le moment que choisit son pote de gauche pour me mordre à son tour. Heureusement, il me rate, son museau tapant juste ma chaussure. Je lui donne aussitôt un coup de pied à lui aussi : pas de jaloux. On ne dirait pas comme ça mais ce n’est vraiment pas facile de taper un chien le plus fort possible, quand on pédale vite. En tout cas, mon coup de latte en plein museau ne lui fait ni chaud ni froid, et lui aussi continue la poursuite en me hurlant dessus.
Quelques centaines de mètres plus loin, l’improbable absolu se produit : alors que je me trouve depuis le début sur un chemin de campagne, j’atterris… dans une impasse ! Mais comment une telle malchance est-elle possible ? Le chemin vient en effet mourir dans la cour d’une ferme, grillagée de toutes parts : je n’ai aucune issue.
Je n’arrive pas à y croire mais je n’ai pas le temps d’y penser car je vais être obligé de m’arrêter. En d’autres termes, dans une seconde, je vais poser le pied à terre et les cabots vont se jeter sur mes mollets douillets pour les déchiqueter. Alors que mon adrénaline se propulse à une altitude inconsidérée, je freine de toutes mes forces, ce qui fait déraper mon vélo lourd dans un grand bruit, les cailloux giclant dans tous les sens. Je pose brutalement le pied droit à terre et en attendant l’impact imminent des chicots de mes poursuivants sur mon mollet, mes cordes vocales expulsent de toutes leurs forces mon cri du cœur : « PUTAINS DE CLÉBARDS ! »
Là, l’improbable absolu se produit pour la deuxième fois en quelques secondes : sans doute surpris par tout ce raffut, les trois sauvages rebroussent chemin et rentrent chez eux en trottinant comme si de rien n’était, sans le moindre aboiement ! Je n’arrive pas à y croire, ni à comprendre comment ils peuvent abandonner si facilement après avoir été si agressifs. Mais peu importe, l’essentiel est là : mes mollets sont intacts.
Le danger permanent que représentent les chiens est connu de tous les voyageurs à vélo. Avant le début de mon périple, je savais bien que ce type de mésaventure surviendrait un jour où l’autre. C’est pourquoi, sur les conseils avisés de ma petite femme, je m’étais carrément fait vacciner contre la rage : ne vaut-il pas mieux prévenir que guérir ? Aujourd’hui, je suis entier mais je l’ai échappé belle.
Je remonte sur mon vélo, je fais demi-tour pour sortir de l’impasse et je roule derrière mes agresseurs, mais à distance très respectable. Puis je m’engouffre dans le premier chemin à droite qui me tend les bras. Un peu plus loin, je rejoins une route et là, enfin en sécurité, une petite défaillance physique m’oblige à m’arrêter : après être montée brutalement pendant la poursuite, l’adrénaline est maintenant en chute libre. Je prends ce prétexte pour dévorer une poignée de biscuits au chocolat qui, à défaut de me requinquer physiologiquement, me font un bien fou au moral. Essoré, je reprends la route pour Corinthe, qui n’est plus très loin.
Le canal de Corinthe
Cette ville est connue notamment pour son fameux canal. Il fut creusé à la fin du XIXe siècle afin de relier la mer Ionienne à la mer Égée. Long de six kilomètres, il permet aux navires d’éviter un détour de quatre cents kilomètres tout autour du Péloponnèse. Plus tout jeune donc mais sacrément utile, ce vieil ouvrage.
Observer les plus gros navires qui y naviguent est paraît-il spectaculaire car leur coque frôle les parois. Mais ces gros bâtiments sont rares et il faut être chanceux pour être là au bon moment, la plupart des navires qui passent ici étant de petits bateaux de plaisance. Je tente quand même ma chance, n’étant venu à Corinthe que pour ça, et je rejoins donc l’un des ponts qui franchissent le canal.
Trois heures plus tard, toujours rien : pas le moindre rafiot à l’horizon. La nuit commence à tomber quand enfin, j’entends ronronner un moteur de bateau. Ce n’est pas le monstre des mers que j’espérais, mais c’est mieux que rien.
Un petit bateau franchit le canal
Onze mille navires empruntent ce canal chaque année, soit une trentaine par jour, ce qui fait un bateau tous les trois quarts d’heure : avec une misérable coquille de noix en plus de trois heures d’attente, je n’ai donc pas été verni ! Mais ce n’est pas bien grave, je voulais quand même voir ce site atypique qui est plutôt impressionnant avec ses falaises creusées à la verticale, et qui montre bien à quel point l’humain est capable de faire de grandes choses, quand il veut…
Le canal de Corinthe en quelques chiffres :
- 6 km de long
- 25 m de large
- 52 m de hauteur maximale
- 8 m de profondeur
Le soleil se couche sur le canal
Athènes : objectif final atteint
Il ne me reste plus que soixante-dix kilomètres à rouler jusqu’à la destination finale de mon périple : Athènes. Porté par un moral en béton pour avoir réussi à faire ce voyage à la force des mollets, j’y arrive en quelques coups de pédales.
Bilan : Nice - Athènes à vélo
- 3.000 km parcourus
- 29.000 m de dénivelé positif
- 50 jours
- 8 kg perdus !
Là, une semaine de pause m’attend avec ma petite femme, venue spécialement de France. Après l’effort, le réconfort…
Athènes
Le temple de Poséidon, Cap Sounion
Depuis le temple de Poséidon
Après deux mois en tête-à-tête avec un vélo, une semaine de retrouvailles, ça vous requinque un cyclo-voyageur !
Savourer le plaisir de se retrouver, visiter ensemble ce coin de Grèce, mais aussi me reposer un peu après tous ces kilomètres et surtout toutes ces montagnes à vélo : c’est la belle vie pendant une semaine.
Mais comme toujours, les vacances ont une fin. Ma femme rentre donc en France pendant que je reprends le cours de mon périple, mais en le prolongeant jusqu’à mon nouvel objectif : la Turquie. Et pour y aller, j’ai décidé de transiter par une toute petite île grecque méconnue et, paraît-il, somptueuse : Nisyros.
Nisyros, l’une des plus belles îles de Grèce
Située à une bonne vingtaine d’heures de bateau d’Athènes, son éloignement des côtes grecques dissuade la plupart des touristes de s’y rendre. Ils ne savent pas ce qu’ils perdent car c’est ce qui en fait une île hors des sentiers battus. Et moi, c’est cet isolement qui m’attire comme un aimant.
Villages, plages et montagnes
Le ferry que j’ai pris à Athènes accoste dans le petit port de Mandraki : c’est le principal village de Nisyros.
Une ruelle de Mandraki
Il est calme et la plupart de ses ruelles sont trop étroites pour permettre aux voitures d’y accéder. Ce qui laisse une voie royale aux vélos comme le mien…
Une ruelle de Mandraki
Après avoir flâné là un bon moment, je me dirige vers le haut de la colline qui surplombe le village. C’est là que se trouvent les ruines de la ville ancienne de Nisyros, à l’époque où elle était fortifiée. Le site offre une vue d’ensemble sur le village actuel en contrebas, sur la mer et sur les îles voisines.
Mandraki : le village actuel, en bas, vu depuis le village ancien, en haut
Mais la principale raison de ma venue sur Nisyros, c’est son volcan. Il est situé à l’intérieur de l’île et pour le rejoindre, il faut grimper des côtes très pentues. Sur ma route, je passe d’abord par un autre village, Pali. Il est situé sur la côte.
L’église de Pali
Il s’agit d’un petit village de pêcheurs où le temps s’écoule paisiblement.
En pédalant sur le quai, je passe juste à côté d’un type assis sur une chaise en plein soleil. Impassible malgré son front ruisselant, il démêle son filet de pêche avec une minutie qui force le respect. Je lui lance le kalimera de rigueur (bonjour) auquel il a la même réaction qu’un sourd-muet : aucune.
Heureusement, son employé me répond gentiment, depuis leur chalutier amarré juste à côté. Debout sur le pont, il démêle lui aussi des filets emmêlés et il m’invite à le rejoindre à bord pour discuter. C’est Mohamed. La communication n’est pas très facile car il ne parle que grec et moi pas, mais il est jovial et sa joie est communicative. Il exhibe fièrement leur pêche du jour : deux belles raies et quelques poissons aux couleurs vives.
Mohamed
Quand vient le moment de reprendre ma route pour le volcan, je dis au revoir à Mohamed, qui me répond tout sourire. Mais cette fois, son patron, qui dégouline toujours autant sur sa chaise en plein cagnard, me salue lui aussi : il n’est ni sourd, ni muet.
Avant de bifurquer vers l’intérieur de l’île et son fameux volcan, je fais un petit détour en longeant la côte car je veux voir les plages. Avec leur sable noir, elle ne peuvent nier leur origine volcanique.
Les plages à la sortie de Pali
Peter, un néerlandais rencontré sur le ferry et qui vit sur l’île voisine de Tilos, m’avait expliqué pendant la traversée depuis Athènes que sur les plages de Nisyros débarquaient régulièrement des migrants. La plupart d’entre eux viennent de Syrie et d’Afghanistan par familles entières, fuyant le chaos et les persécutions qui règnent dans leur pays. Ils sont à la recherche d’une vie meilleure sachant que de toute façon, elle ne pourra pas être pire ailleurs.
Peter m’avait raconté qu’on retrouvait régulièrement des effets personnels de ces migrants sur les plages : soit parce qu’ils les abandonnent sur le sable et les galets en arrivant, soit parce que leurs affaires se sont échouées là, portées par la mer après un naufrage…
Derrière chacun de ces objets divers gisant sur la plage se cache un vécu personnel souvent dramatique. Cela me touche d’autant plus que mon propre grand-père fut lui-même un migrant. Ukrainien, il dut fuir son pays, qui appartenait alors à la Russie, après la révolution bolchevique de 1917.
Alors bien sûr, pour venir jusqu’en France, il n’eut quant à lui aucune mer à traverser. Il ne risquait donc pas le naufrage, contrairement à tous ceux qui essaient de débarquer ici, parfois sans succès d’ailleurs, certains terminant leur voyage vers la liberté au fond de la mer Égée.
Mais traverser tout un continent à pied comme le fit mon grand-père, tout seul à l’âge de dix-sept ans, son petit baluchon sur le dos, à travers des forêts peuplées d’animaux sauvages et glacées par l’hiver slave, n’avait pas dû être une partie de plaisir non plus.
Ces tranches de vies dramatiques sont assez similaires finalement, qu’elles nous viennent de la Syrie de Bachar al-Assad, de l’Afghanistan des talibans ou de l’Ukraine des bolcheviks.
La différence, c’est que les temps ont bien changé. Car si mon grand-père eut la chance d’être accueilli à bras ouverts au pays de Voltaire, où il s’intégra ensuite parfaitement, rejoindre des contrées européennes libres est devenu beaucoup plus difficile aujourd’hui pour les migrants car ils y sont, c’est un euphémisme, rarement les bienvenus. L’Histoire est sans pitié.
Je remonte sur mon vélo en tournant désormais le dos à la mer mais avant de rejoindre le volcan, il y a un dernier site que je voudrais découvrir : le village de Nikia.
Sur les hauteurs de l’île
Pour m’y rendre, je dois faire un petit détour en montant les côtes très raides de l’intérieur de l’île, avec des pentes affichant des pourcentages entre 10 et 15%. Ce ne sont pas mes pires ascensions depuis le début du périple puisque j’ai atteint trois fois la barre folle des 20% mais il faut savoir qu’à partir de 10% de pente, le pédalage en côte devient vraiment difficile avec un vélo de cinquante-quatre kilos.
Mon vélo admire la vue
Avec ce soleil qui tabasse, mon front ruisselle désormais autant que celui du patron pêcheur qui démêlait ses filets, tout-à-l’heure sur le quai. Sauf que là, ça me fait beaucoup moins sourire ! Heureusement, les vues plongeantes sur la mer constituent ma récompense.
La vue depuis les montagnes
Je croise de temps en temps des vaches au milieu de la route, mais aussi des chèvres dans les arbres ! Elles y grimpent avec une agilité de singes pour déguster les feuilles. Impossible de les photographier car elles s’enfuient dès qu’elles m’entendent approcher.
Sur ma route, je passe devant un autre village perché : Emporios. Il a été déserté au fil des années pour ne plus compter aujourd’hui qu’une trentaine d’habitants.
Emporios
Peu avant l’entrée du village, au bord de la route, se trouve une petite grotte qui fait office de sauna naturel pour les visiteurs, grâce à l’activité volcanique du sous-sol de Nisyros. En effet, si tout semble normal sur cette île, il se trouve qu’en réalité, rien ne l’est ! Son existence même n’est que le fruit d’une succession d’éruptions volcaniques au fil des millénaires. Actuellement, son sous-sol est encore et toujours bouillant.
Quand j’arrive à Nikia, en haut des montagnes qui dominent la mer, je suis assoiffé et je n’ai qu’une seule envie : m’asseoir à l’ombre de la terrasse d’un café et dévaliser son frigo.
Nikia
Mais avant ça, je dois passer par les petites ruelles du village et là, je dois bien l’avouer : c’est le coup de foudre !
Une ruelle de Nikia
Les petites ruelles paisibles et colorées sont pleines de charme. Il n’y a aucune voiture dans le village, et pour cause : elles sont bien trop larges pour pouvoir s’aventurer dans des ruelles si étroites où seul un vélo peut passer, et encore.
Du coup, moi qui rêvais de m’abreuver comme une bête il y a quelques minutes à peine, je ne peux plus m’empêcher de m’arrêter tous les dix mètres maintenant, pour photographier et filmer l’intérieur du village, repoussant à plus tard ce moment pourtant tant attendu de me rafraîchir…
Dans cette petite bourgade, le clou du spectacle, c’est sa place centrale. Elle est pavée d’une mosaïque qui a la réputation, dans toute la Grèce, d’être l’une des plus belles du pays. Impossible de la photographier en entier car elle est en partie occupée par des tables de restaurants, je ne l’immortalise donc qu’à moitié.
Nikia et sa fameuse mosaïque de cailloux au sol
C’est d’ailleurs à l’une de ces tables que je m’auto-récompense enfin des efforts fournis dans les montagnes, en remplissant mon gosier de boissons fraîches et de salade grecque.
L’avantage quand on a pédalé jusqu’en haut d’une montagne, c’est que la seule chose qui reste à faire ensuite, c’est de redescendre. Après mon repas, l’itinéraire jusqu’au volcan s’avère donc une formalité.
Le volcan
Quand j’y arrive en fin d’après-midi, il est déjà assez tard : le guichet d’entrée est fermé et le passage est libre. Sur le parking, il n’y a plus qu’une seule voiture. C’est celle du gérant du petit snack situé juste après le guichet. Il m’indique que l’entrée est gratuite pour tous ceux qui arrivent ici à pied… ou à vélo ! Mon deux-roues n’ayant pas pollué, je peux entrer gratuitement.
Le cratère Stefanos
Ce volcan est le plus jeune de la mer Égée. Même si sa dernière éruption date de 1888, il n’est pas considéré comme éteint. D’ailleurs, en 1995, la chambre magmatique située juste en dessous a grossi au point de provoquer une crise sismique dans toute la zone.
Au début du petit chemin qui mène tout au fond du cratère, un panneau rappelle que le site est potentiellement dangereux.
Pendant la descente, je savoure le privilège que j’ai de me retrouver entièrement seul sur ce site naturel d’exception.
Le cratère Stephanos, vide de touristes…
Dans ce cratère, la première chose qui attire mon regard, ce sont les couleurs. Les parois sont jaunies par les dépôts de soufre.
Juste avant d’arriver dans le cratère principal, je passe devant Andreas, un cratère beaucoup plus petit.
Andreas, également appelé Mikros Stefanos
Un peu plus loin arrive le moment que j’attends, celui où je peux enfin fouler le sol bouillonnant du cratère principal de Nisyros.
Au fond du cratère
Reliés par de fines cordes, des piquets délimitent les zones auxquelles il est interdit d’accéder, pour des raisons de sécurité évidentes. Car par ici, la terre chauffe, voire surchauffe. Et disons-le carrément : elle bouillonne, elle fume et elle brûle ! Dans ces zones interdites d’accès, l’eau bout en effet en permanence au fond de sortes de petites marmites naturelles.
Une petite marmite naturelle d’eau bouillonnante
Un peu partout, de petites colonnes de fumée s’élèvent dans le ciel, me rappelant elles aussi que je suis bien sur un site naturel d’exception.
Les fumerolles au fond du cratère
Pour les photos, j’ai de la chance : c’est la fin d’après-midi et le soleil, en déclinant, enrobe le volcan de sa lumière chaude et photogénique.
Les parois soufrées du cratère
Je passe un bon moment à arpenter le fond du cratère dans tous les sens mais le soleil, qui poursuit sa descente, va bientôt se cacher derrière les parois de la caldeira et plonger le volcan dans la pénombre. Je décide donc de quitter ce lieu magique, sans doute le plus incroyable depuis le début de mon périple, car maintenant il va bien falloir penser à dormir.
Au fond de la caldeira
Et pour ça, mon idée, c’est de trouver un spot de bivouac discret le plus près possible du site. J’en dégote un assez rapidement et je pose ma tente face au volcan : ce soir, je mangerai en admirant les cratères.
Dormir à quelques dizaines de mètres du cratère
De loin, je guette le départ du patron du snack, qui n’a pas l’air pressé de s’en aller. Lorsqu’il passe enfin en voiture à une trentaine de mètres de moi, sans me voir puisque ma tente est cachée par un monticule de pierres ocres, je me retrouve alors absolument seul sur ce site d’exception. En effet, la caldeira de quatre kilomètres de diamètre est inhabitée, elle ne contient pas la moindre maison. A part la mienne, faite de toile.
Le soleil finit tranquillement de se coucher. La nuit noire, en tombant, fait disparaître ce paysage volcanique jusqu’à demain. Au loin, j’entends l’aboiement d’un chien qui semble provenir du sommet de la caldeira, à un ou deux kilomètres de moi. Le silence qui règne ici est tel que ces aboiements lointains me paraissent tout proches. Puis j’entends de petits bruits de pierres à proximité de la tente. Il y a peu de chances que ce soit un humain, ce doit plutôt être un animal quelconque qui passe par là, comme une vache ou une chèvre.
C’est l’heure de dormir. En fermant les yeux, les images du volcan continuent à défiler en boucle derrière mes paupières. Ce soir, ici, ma sensation de plénitude est totale.
La journée du lendemain commence comme celle de la veille s’est terminée : par la vue sur les cratères et les parois de la caldeira.
Lever de soleil face au volcan
Je dévore rapidement mon petit déjeuner banane – yaourt – granola en réfléchissant tranquillement : je me suis tellement régalé hier au fond de la caldeira que je décide de modifier mes plans. Au lieu de retourner comme prévu à Mandraki, le principal village de l’île où je prendrai bientôt un ferry pour la Turquie, je vais passer la journée à profiter de ce volcan et je dormirai encore au fond de la caldeira ce soir : à l’époque où le tourisme de masse est roi, c’est tellement bon pour une fois de se sentir si seul dans un endroit si exceptionnel, qu’il faut savoir en profiter à fond. Je quitterai donc ce site qui m’émerveille non pas aujourd’hui mais demain.
Une fois le camp levé, je reprends mon vélo en direction du volcan.
Pour commencer la journée, je vais jeter un œil aux autres cratères. Car si le cratère principal de l’île, appelé Stefanos, est le seul que visitent la plupart des touristes qui s’aventurent jusqu’ici, ce volcan atypique comporte six cratères en tout. Je roule donc jusqu’à un petit chemin qui permet d’accéder à ceux que je n’ai pas vus.
Le petit chemin qui mène à Polyvotis
Tout au bout du sentier, je me retrouve subitement face à une profusion de couleurs : les parois ocres de la caldeira surplombent celles toutes jaunes d’un grand cratère. Quelques tâches verdâtres de végétation sous un ciel profondément bleu complètent le paysage.
Le cratère Megalos Polyvotis
C’est le cratère Megalos Polyvotis. Il n’est pas possible de descendre au fond. Le lieu dégage une impression de gigantisme face auquel je me sens minuscule.
Descente à pied vers Megalos Polyvotis
Son petit voisin, Mikros Polyvotis, est moins impressionnant mais dans celui-là, je peux descendre au fond et me balader au milieu de quelques fumerolles.
Le cratère Mikros Polyvotis
Après les deux cratères Stefanos hier, le grand et le petit, et les deux cratères Polyvotis ce matin, il ne me reste plus que les deux derniers cratères du volcan à découvrir : Alexandre et Logothetis. Mais ils ne sont indiqués nulle part. Je me dirige donc vers ce qui me semble être les parois d’un cratère.
Direction les deux derniers cratères
Pour cela, je dois sortir du chemin et je me retrouve alors à marcher dans des amas de pierres rougeâtres, beaucoup moins praticables.
Mon point de repère, ce sont des zones de souffre, visibles de loin car très jaunes. C’est donc vers elles que je me dirige. Là, de près, je distingue nettement mieux la présence de multiples petites bouches de souffre fumantes.
Depuis cet endroit, je domine la plaine de Lakki, le fond plat de la caldeira, avec une vue à 180°.
Sitôt passée la zone de souffre, je me retrouve sur la paroi du cratère, nue. Mais au bout d’une dizaine de mètres à peine, il me semble subitement entendre mes pas résonner. Je frappe le sol du pied pour vérifier et aussitôt, petite frayeur : non seulement ça résonne bel et bien mais en plus, ça tremblote. Ce qui signifie que sous mes pieds, le sol est creux et pas forcément très solide, donc potentiellement écroulable !
Au vu de toutes les fumerolles présentes dans la zone, je sais pertinemment que sous mes pieds, le sous-sol atteint des températures bouillantes. Ne m’appelant pas Mike Horn, je fais immédiatement demi-tour. Je ne pourrai donc pas observer de plus près les deux derniers cratères mais tant pis, ce n’est pas bien grave car j’en ai déjà pris plein les yeux avec les quatre autres. Je redescends tranquillement au milieu des éboulis de pierres colorées.
Depuis hier, je suis fasciné par ce site qui est une démonstration de ce que peuvent faire les forces de la nature lorsqu’elles se déchaînent. Je passe donc le reste de la journée à errer à vélo au fond de cette caldeira où je me plais tant. Le soir venu, je pose ma tente à l’opposé du volcan, dans un petit champ ou paissent quelques vaches.
Dernier bivouac dans la caldeira
Elles ont beau être pacifiques, cela ne les empêche pas de transpercer la nuit par quelques beuglements. Au réveil, je reprends ma route, qui commence par la montée des parois de la caldeira.
Vue sur le fond de la caldeira avec le volcan en arrière-plan
Tout en pédalant, je surveille les chèvres qui se baladent telles des équilibristes sur les parois abruptes de la caldeira au-dessus de moi, car elles projettent régulièrement des cailloux sur ma route.
D’une manière plus générale, les chutes de pierres sont fréquentes par ici et si les plus petites parviennent souvent à débouler sur le bitume, les plus grosses, heureusement, sont bloquées par des protections.
Chutes de pierres
Pour redescendre vers Mandraki, le principal village de Nisyros, je traverse à nouveau les paysages typiques de l’île, qui plongent inlassablement dans la Grande Bleue.
Retour à Mandraki
Mon dernier objectif sur cette île qui ne cesse de m’enchanter depuis que j’ai posé les pieds dessus, c’est de photographier Mandraki au crépuscule, car ce petit village m’avait paru photogénique le jour de mon arrivée.
Je me rends donc au petit monastère Panagia Spiliani qui domine le village, sur lequel il offre une vue plongeante. Les personnes que j’ai rencontrées en montant ici m’ont indiqué qu’à cette heure-ci, le monastère était fermé. Mais quand j’y arrive, il est ouvert. J’entre donc.
Le monastère Panagia Spiliani
En sortant, j’aperçois à quelques mètres en contrebas le pope, en train de fumer discrètement une clope. Il ne m’a pas vu, trop occupé à guetter en dessous de lui si quelqu’un arrive. Quand je le salue d’un kalimera amical (bonjour), il sursaute et cache immédiatement sa cigarette dans son dos, comme un gamin.
Je ne comprends absolument pas pourquoi mais peu importe, nous discutons un moment. Il se débarrasse dès que possible de son petit concentré de nicotine et de goudron en le jetant discrètement par dessus le mur de clôture, construit à flanc de falaise et qui domine la mer. Je fais comme si je n’avais rien vu et je fais comme toujours le petit selfie-souvenir.
Je profite du soleil rougeoyant puis de la nuit qui tombe pour faire les images pour lesquelles je suis venu.
Le monastère Panagia Spiliani domine le village de Mandraki
C’était mon dernier jour sur Nisyros. Avec sa douceur de vivre, sa faible fréquentation touristique, ses vues à couper le souffle et son volcan coloré, cette petite île au côté enchanteur m’aura marqué.
J’en ai fini maintenant avec la Grèce. Demain, je prendrai un bateau pour la Turquie, où rien ne se passera comme prévu. Hélas…
Infos pratiques
Le volcan de Nisyros
Le volcan reçoit la visite de 200 à 1.000 visiteurs environ chaque jour ! Heureusement, il est suffisamment vaste pour qu’on ne s’y bouscule pas et de toute façon, les visiteurs se concentrent sur le créneau 10h00-15h00 environ. En effet, la plupart d’entre eux viennent à la journée seulement, en provenance des îles voisines de Kos et Rhodes.
Le bon plan
Idéalement, il faut donc se rendre au cratère Stefanos en fin de journée :
Lorsque les bus de touristes sont partis, afin de bénéficier de la plus faible fréquentation possible ;
Et 1h00 – 1h30 avant le coucher du soleil, quand la lumière est la plus belle.
Si vous souhaitez également jeter un œil sur les cratères voisins, alors prévoyez d’arriver encore une heure plus tôt, voire deux si vous voulez prendre tout votre temps pour visiter.
Si vous êtes des lève-tôt, vous pouvez également arriver en début de matinée, avant l’arrivée des bus de touristes. Toutefois, la lumière est un peu moins belle le matin que le soir car les parois de la caldeira masquent plus le soleil quand il se lève que quand il se couche (elles sont plus hautes d’un côté que de l’autre).
Le prix : 5 euros ou gratuit !
L’entrée coûte désormais 5 euros par personne (et non plus 3 euros, comme on peut encore le lire un peu partout sur Internet).
Toutefois, elle est gratuite pour tous ceux qui s’y rendent… à vélo ou à pied !
Que faut-il apporter avec soi ?
Une paire de bonnes chaussures : on peut s’en passer mais le sol est boueux et brûlant dans toute la partie humide du cratère, donc de bonnes chaussures sont préférables. Si vous vous posez la question d’y aller en tongs, c’est possible mais déconseillé.
L’été : prévoir une bouteille d’eau ainsi que casquette et crème solaire, car le soleil peut taper très fort.
Commodités
Il y a un parking pour garer la voiture
Il y a également un snack avec terrasse ombragée et toilettes gratuites (accessibles à tout le monde, y compris aux non-clients du snack).
L’excursion à la journée depuis l’île voisine de Kos
En plus de mes deux nuits en bivouac tout seul dans la caldeira, j’ai dormi au Romantzo Hotel, réservé via Booking. Si vous cherchez un hôtel dans le centre de Mandraki, alors le Romantzo ne vous conviendra peut-être pas car il est légèrement excentré (il suffit néanmoins de 5 à 10 minutes de marche à peine pour s’y rendre). Par contre, si vous cherchez le calme, alors il est parfait.
La vue depuis le Romantzo Hotel
La terrasse des chambres
Les prix sont corrects (37 euros hors saison, début mai, lors de ma venue, petit déj’ inclus), la vue sur la mer est agréable, l’accueil est sympa et le petit déjeuner varié.
Trans-Dinarica : l’itinéraire de rêve pour les cyclistes
Je dois commencer par préciser que la Trans-Dinarica… ne passe pas par la Grèce ! Elle passe par les pays des Balkans situés juste au-dessus de la Grèce mais si je l’évoque quand même dans cet article, c’est parce que les cyclo-touristes se rendant en Grèce passent le plus souvent par les Balkans. Alors, si les infos suivantes peuvent les aider à trouver un bel itinéraire…
La Trans-Dinarica est un itinéraire cycliste qui relie les pays des Balkans occidentaux en traversant une superbe chaîne de montagnes, les Alpes Dinariques. Ce parcours a été conçu pour permettre aux cyclo-voyageurs qui s’aventurent par là de découvrir tout le patrimoine local : naturel, culturel, gastronomique…
La Trans-Dinarica en Croatie
Il passe par des villages, des forêts, des montagnes, ou encore par la mer. Il alterne entre routes bitumées très peu fréquentées et chemins de terre en pleine nature. Il traverse des parcs nationaux et des sites classés au patrimoine de l’humanité par l’Unesco.
Bivouac sur le parcours de la Trans-Dinarica
Tout au long du parcours, on découvre le sens de l’hospitalité des habitants des Balkans ainsi que les paysages à couper le souffle de cette superbe région méconnue, en plein cœur de l’Europe. Bref, quand on roule sur la Trans-Dinarica, on en prend plein les yeux et on se sent une âme d’aventurier !
Sur la Trans-Dinarica mais sous la pluie (Bosnie-Herzégovine)
La distance totale de la Trans-Dinarica approche les 6.000 kilomètres, et son dénivelé positif les… 100.000 mètres !
Les pays traversés sont la Slovénie, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, l’Albanie, la Macédoine du Nord, le Kosovo et la Serbie.
La Trans-Dinarica passe par la rivière Drin (Albanie)
Pour se procurer le parcours précis ainsi que sa trace GPS, ce que j’ai fait, il suffit de se connecter au site officiel : Trans-Dinarica.
Bien sûr, ce n’est pas gratuit mais ce n’est pas très cher non plus et surtout, cela vaut tellement le coup : si, comme moi, vous êtes un.e cycliste amoureux.se de la nature, alors le rapport qualité-prix de ces packs est exceptionnel.
On peut se procurer le pack pour les huit pays à un tarif avantageux (à partir de 90 euros), ou bien choisir un pack par pays (de 8 à 23 euros selon le pays). Le lien : se procurer le pack de navigation de la Trans-Dinarica.
L’itinéraire de la Trans-Dinarica (Croatie)
Remarque : aucun lien de ce blog n’est sponsorisé, je ne perçois donc aucune commission, que vous cliquiez ou non !
Sur le parcours de la Trans-Dinarica (Croatie)
En préparant votre périple à vélo, si vous vous interrogez sur la Trans Dinarica, n’hésitez pas à me poser vos questions dans la rubrique « commentaires » (votre @dresse mail ne sera pas publiée, contrairement à votre question qui le sera avec un léger décalage, généralement de quelques heures) : c’est avec plaisir que j’essaierai d’y répondre 🙂
L’Albanie est la sixième étape d’un voyage à vélo effectué en 2025 à travers les Balkans, depuis la France et à destination de la Grèce.
Ce petit pays est surtout réputé pour ses paysages à couper le souffle, que ce soit le long du littoral ou au cœur des montagnes. Mais il compte un autre joyau : la générosité sans faille de ses habitants, qui savent accueillir les voyageurs avec un sens aigu de l’hospitalité.
Récit détaillé de ce voyage en immersion dans l’Albanie profonde…
Chaque fois que j’arrive dans un nouveau pays, la première chose que je fais consiste à apprendre à dire bonjour, merci et au revoir dans la langue locale. Je me suis rendu compte avec le temps que le s’il-te-plaît était souvent superflu car dans de nombreux pays, on ne l’utilise pas, ou que peu. Pour moi, ça fait un mot de moins à apprendre et c’est toujours ça de gagné.
En Albanie, non seulement il me faut apprendre ce nouveau vocabulaire mais en plus, il s’agit de mots à coucher dehors, difficiles à retenir : mirmengjesi, faleminderit et mirupovshim (respectivement bonjour, merci et au revoir selon Google Trad).
Ma première mosquée albanaise
Le premier albanais que je croise est à vélo. En le doublant, je le gratifie donc du mirmengjesi qui convient mais au lieu de me répondre, il me regarde avec des yeux ronds. Même chose avec mon second albanais, qui d’ailleurs est une albanaise. Je commence à douter vaguement de ce bonjour-mirmengjesi mais je ne m’attarde pas trop dessus car l’urgence du moment consiste à trouver un spot de bivouac. Je roule sur une ligne droite de plusieurs kilomètres et la route est bordée par des barrières des deux côtés. Derrière elles, le terrain ne se prête pas au bivouac et de toute façon, il y a régulièrement des maisons et des fermes dispersées un peu partout autour de la route. Impossible pour moi de poser discrètement la tente ici, à la vue de tous.
Pendant ce temps, le ciel se couvre de plus en plus, accélérant la tombée de la nuit. Heureusement, je finis par trouver un petit chemin montant, accessible depuis la route. Je m’y engouffre en poussant mon vélo jusqu’en haut. Là, je surplombe la vallée, au fond de laquelle sont éparpillées quelques fermes, villages et mosquées. Le paysage est cerné par les montagnes.
Ce spot de bivouac est assez basique mais sans trop savoir pourquoi, je m’y sens bien. Pourtant, pendant la nuit qui s’ensuit, je suis d’abord réveillé par le bruit de la pluie sur la tente, puis par les appels lointains du muezzin à la prière. Au petit matin, alors que je dors enfin comme un bienheureux, c’est le chant des oiseaux qui prend la relève de la pluie et du muezzin pour achever de rendre ma nuit entièrement blanche. Qu’importe, comme toujours quand je dors dans la nature, je suis heureux d’être là et de vivre ces moments dont je profite à fond, car je sais bien qu’ils vont passer trop vite.
Premier bivouac en Albanie
Le café chaud me sort vaguement de ma torpeur matinale et le petit déjeuner me remplit la panse, qui n’attendait que ça. Puis mon petit rituel quotidien se poursuit : démonter la tente, ranger toutes mes affaires dans les sacoches et attacher ces dernières sur le vélo. Tous les jours, entre le moment où j’ouvre un œil et celui où je donne le premier coup de pédale, il s’écoule au minimum deux heures si je suis en forme, et jusqu’à trois si le réveil est difficile. Aujourd’hui, c’est plutôt trois.
La mosquée de Fierza
Mon premier albanais du jour, c’est-à-dire le troisième que je rencontre depuis mon arrivée dans le pays hier, ne semble pas comprendre lui non plus mes salutations du matin, que je lui exprime encore et toujours via le fameux mirmengjesi de la veille. Aussi, quand je passe un peu plus tard à la hauteur d’un petit bar dans ma première grosse montée du jour, je m’y arrête pour poser la question qui me titille depuis hier : comment dit-on vraiment bonjour en albanais ?
Je peux échanger avec le patron du bar car, fait plutôt rare dans les montagnes albanaises, il connaît quelques mots de la langue de Shakespeare. Mais bizarrement, il a du mal à me traduire bonjour en albanais. En guise de réponse, il ânonne sans conviction un pershendetia dont la difficile prononciation me glace les oreilles : l’albanais ne comporterait-il donc aucun mot simple ? Pour nous aider, un client attablé juste à côté de nous devant son café fumant nous suggère un rugueux nietnyetta, qui n’est pas plus doux mais qui a au moins le mérite de répondre à cette dernière question : non, l’albanais ne comporte décidément aucun mot simple.
En tout cas, mes deux interlocuteurs sympas ne sont donc pas d’accord sur le mot qui convient pour saluer quelqu’un, et je trouve quand même dingue de ne pas savoir dire bonjour dans sa propre langue. Bref, le patron finit par valider le nietnyetta de son client. J’apprends qu’on peut aussi utiliser le diminutif nyetta mais que c’est un mot local, employé uniquement ici, dans le nord du pays. Adjugé, c’est ainsi que je dirai bonjour aux albanais, désormais, du moins tant que je serai dans le nord. Lorsque je descendrai vers le sud, il sera toujours temps d’apprendre un nouveau mot de vingt-cinq lettres pour dire bonjour en albanais.
La rivière Drin
Une poignée de kilomètres plus loin, j’expérimente ce nouveau mot, nyetta, pour saluer le premier venu. C’est un septuagénaire qui est en train de remplir des bidons de dix litres à une petite source d’eau, laquelle s’écoule de la montagne dont elle jaillit via un vieux tuyau sale.
Un remplisseur de bidons à la source
Le nyetta passe comme une lettre à la poste mais ce qui m’intéresse subitement, avant de remplir mes gourdes, c’est de savoir si cette eau douteuse est potable. Le monsieur m’assure que oui, tout en continuant à remplir ses gros bidons qu’il vendra plus tard, en ville. Modérément attiré par la perspective d’avoir la courante toute la journée à cause de cette eau suspecte, j’hésite à remplir mes bidons. Mais comme ils sont vides et que j’ai soif, je suis bien obligé de faire confiance à cet inconnu, qui détient sans le savoir l’avenir imminent de mes intestins.
Croisière sur la rivière Drin
Dans le coin, les vues plongeantes sur la rivière Drin valent le détour malgré le mauvais temps. Ce petit cours d’eau s’écoule lentement aux pieds des montagnes, entre lesquelles il fait serpenter sa couleur vert-émeraude.
La rivière Drin
Je continue à pédaler pendant un bon moment dans le sens de la montée, jusqu’à ce que je commence à ressentir un début de défaillance physique. Rien à voir avec l’eau que je viens de boire, c’est juste une petite baisse de tension, comme j’en ai régulièrement depuis l’adolescence. Le problème aujourd’hui, c’est que je suis tout seul dans la montagne et que pour l’instant, je dois faire pas mal d’efforts puisque ça monte en permanence. Et ma destination du jour, le minuscule village de Koman, est encore loin. Dans ces cas-là, habituellement je me repose un peu mais ici, ce n’est pas possible. Alors je fais une courte pause et je mange une poignée de biscuits pour reprendre quelques forces. Puis je remonte sur le vélo en ralentissant le rythme et par chance, cela correspond à peu près au moment où les descentes commencent à succéder aux montées.
La rivière Drin
Par ici, de nombreux engins de chantiers cassent littéralement la montagne pour élargir l’étroite route actuelle et la sécuriser. Tout en roulant, je passe à la hauteur d’une équipe d’ouvriers qui se dirigent vers le seul petit resto du coin, car c’est l’heure de leur pause déjeuner. L’un d’entre eux, qui s’avèrera être le rigolo de la bande, m’offre un coup à boire. Ne sachant pas dire non, je dis oui.
L’un de ses collègues ne travaille ici que temporairement car il vit en France, à Lille. Il fait donc office de traducteur. Quand je demande si je peux faire un selfie avec toute l’équipe, le seul qui refuse se propose en contrepartie de prendre la photo du groupe. Une fois l’image dans la boîte, je ne me souviens plus comment on dit merci. Le rigolo me vient en aide et me souffle un mot qui me permet de remercier le photographe, mais qui déclenche aussitôt l’hilarité générale : le lillois m’explique entre deux gloussements que le mot soufflé par le « rigolo » signifie non pas merci, mais dégage ! Bien sûr, la blague est plutôt drôle mais je m’empresse quand même de présenter mes excuses sincères au photographe. Il les accepte avec un sourire minimaliste puis s’éclipse. Je ne le reverrai plus.
Le soir, j’arrive à Koman. Du haut de ses deux cents habitants, le village est bien plus petit que je ne l’imaginais. Je passe la nuit dans un petit hôtel sympa mais miteux, en dormant dans mon sac à viande car les draps ont l’air sale : je ne suis visiblement pas le premier à dormir dedans, et sans doute pas le dernier non plus…
Si je suis venu à Koman, c’est parce que c’est paraît-il l’un des plus beaux coins d’Albanie. Pour la plupart des voyageurs qui viennent jusqu’ici, le but consiste à prendre un bateau sur la rivière Drin jusqu’au village de Fierza, afin d’admirer des paysages qui ont la réputation de ressembler à ceux des fjords norvégiens. Puis il faut ensuite se rendre par la route une cinquantaine de kilomètres plus loin, à Valbona, où la nature est censée offrir là aussi des paysages enchanteurs.
Départ de la croisière sur la Drin River
En haute saison, il y a plusieurs bateaux quotidiens qui circulent sur la rivière Drin pour relier les minuscules villages de Koman et Fierza. Mais nous sommes en basse saison et à cette époque de l’année, il n’y a qu’un seul aller – retour par jour.
Croisière sur la rivière Drin
Il ne s’agit d’ailleurs pas réellement d’une croisière, contrairement aux bateaux qui circulent l’été : l’hiver, il s’agit plutôt d’une petite navette fluviale qui transporte non pas les touristes (je suis le seul à bord) mais les habitants.
Kula, un passager albanais, va débarquer
Elle les dépose au fil des méandres de la rivière, en accostant sur la rive au beau milieu de nulle part et des rochers, dans des endroits où il n’y a pas la moindre maison. Le coin est aussi joli que reculé.
Le temps est couvert et durant les deux heures et demie de traversée, je me précipite sur mon appareil photo dès que le soleil réussit à transpercer les nuages, ce qui est assez rare dans l’ensemble.
Jelosh, le barreur du bateau
Mais lorsque sa lumière nous gratifie de sa présence, elle permet d’admirer l’étonnante couleur verte de l’eau, dans laquelle plongent les hautes montagnes karstiques.
La rivière Drin
Cette petite croisière est régulièrement élue par différents médias du monde entier, généralistes ou spécialisés dans le voyage, comme l’une des plus belles d’Europe. Et l’avantage par rapport à celles des fjords norvégiens, c’est qu’ici, il n’y a pas foule.
Deux heures et demie après avoir appareillé, le petit bateau accoste à Fierza. Il me reste une cinquantaine de kilomètres de vélo jusqu’à l’étape suivante, Valbona.
Mais encore une fois, c’est devenu une habitude depuis le début de mon périple, la météo s’annonce abominable sur mon itinéraire : on attend des chutes de neige en soirée à Valbona, puis pendant au moins trois jours sans discontinuer, avec des températures de moins neuf degrés !
Les pluies abondantes m’en ont bien fait baver pendant une quinzaine de jours entre l’Italie et, surtout, la Bosnie-Herzégovine, à tel point qu’ici, la perspective de ne pas arriver à Valbona avant la tombée de la neige m’effraie un peu, je dois bien l’avouer : il est déjà quatorze heures et j’ai une cinquantaine de kilomètre à parcourir avec beaucoup de dénivelé. C’est un peu trop : si je me retrouve à rouler sur les chemins pierreux difficiles qui m’attendent et que mon téléphone-GPS me lâche à cause de l’humidité (comme évoqué dans l’article la Bosnie-Herzégovine à vélo), je risque de passer un sale quart-d’heure avec des températures aussi froides pendant plusieurs jours, à chercher désespérément mon chemin enfoui sous la neige.
Les environs de Fierza
Pour la troisième fois depuis le début du périple, je me résous donc à modifier mon itinéraire : mais cette fois-ci, je vais carrément faire demi-tour, tant pis pour les beautés de Valbona que je ne verrai donc pas.
Dans l’immédiat, l’urgence consiste à manger un morceau. Puis je digèrerai tranquillement cet après-midi en me baladant à Fierza. Et ce soir, je bivouaquerai non loin du bateau, histoire d’être sur place tôt demain matin quand il appareillera, à sept heures.
Le bateau du retour amarré à Fierza, au petit matin
Les petites tours Eiffel bleues
Après une énième nuit pluvieuse, je me lève avant le soleil pour ne pas rater le bateau puiqu’il n’y en a qu’un seul par jour. Le temps maussade de bout en bout de la traversée ne me permettra pas d’admirer à nouveau la sublime rivière Drin qui, du coup, tire plus aujourd’hui sur le gris que le vert. Heureusement que j’ai pu en profiter un peu hier, entre deux nuages.
De retour à Koman, je roule jusqu’à un petit restaurant qui a l’air fermé, en espérant qu’il pourra quand même me proposer un petit quelque chose à me mettre sous la dent car comme toujours, je suis affamé. Je passe la tête par une porte dérobée et entrouverte située à l’arrière du bâtiment. A l’intérieur, une dame travaille dans la réserve. Elle me confirme que son resto est fermé et qu’il n’ouvrira que dans quelques jours, pour Pâques, qui correspond chaque année à l’arrivée des premiers touristes. Je la remercie quand même et retourne à mon vélo. Là, en entendant son pas léger approcher dans mon dos, je me retourne : elle me fait face, un grand sourire aux lèvres et une part de gâteau entre les mains, qu’elle m’offre généreusement ! Elle l’a sorti du four une heure plus tôt, il est encore tiède et il me remplit de bien-être.
Une albanaise adorable m’offre une part de gâteau
Car l’Albanie, en plus de la beauté folle de ses paysages naturels, possède une deuxième caractéristique qui crève les yeux du premier voyageur venu : l’incroyable sens de l’hospitalité de ses habitants.
A ce stade du récit, je dois apporter une précision (extraite de l’article : la Bosnie-Herzégovine à vélo, l’une des étapes précédentes de ce long voyage) : l’un des objectifs de mon périple, c’était de faire des rencontres. Ayant lu beaucoup de témoignages de voyageurs à vélo selon lesquels ils étaient parfois l’objet d’une grande attention et d’une grande générosité de la part des habitants des Balkans, j’espérais avant mon départ que je connaîtrais le même accueil qu’eux. Et je me disais que si c’était le cas, il faudrait que je puisse remercier ces habitants pour leur hospitalité, mais je ne savais pas comment faire : impossible d’emporter sur mon vélo des bouquets de fleurs où des bouteilles de vin à offrir, comme on le fait lorsqu’on va passer la soirée chez des amis.
J’avais alors pensé à un symbole de la France mondialement connu : la tour Eiffel. J’ai donc acheté sur Internet quelques dizaines de petites tour Eiffel bleues en porte-clés. Pourquoi bleues ? Je n’en sais rien, toujours est-il qu’elles ne sont pas bien lourdes et ne prennent aucune place sur mon vélo. En d’autres termes, le petit cadeau idéal.
Aussi, quand cette dame me donne cette part de gâteau, je m’empresse de lui offrir en retour une petite tour Eiffel bleue, et c’est à grands coups de faleminderit mutuels (merci) entrecoupés de grands éclats de rire que nous nous quittons.
En m’éloignant de Koman, je laisse définitivement derrière moi les paysages de Valbona qui me faisaient pourtant rêver, après avoir lu tant de descriptions féériques de ce site réputé. Je vais donc tourner le dos aux chutes de neige quotidiennes qui vont blanchir ces paysages septentrionaux, pour descendre vers la capitale Tirana. Je voulais à tout prix éviter cette ville plutôt grande pour coller à l’esprit de mon périple, résolument orienté vers la nature, mais le temps est si mauvais à Valbona que je n’ai pas vraiment le choix. Et comme il faut toujours voir le verre à moitié plein, je vais essayer de profiter quand même de mon nouvel itinéraire, qui passe à moitié par la côte et à moitié par les montagnes.
Quelques dizaines de kilomètres plus loin, je m’arrête dans une minuscule épicerie pour acheter de quoi remplir mon estomac. Le patron m’accueille tièdement, ce qui fait figure d’exception chez ce peuple si hospitalier. Mais dès que je déroule mon vocabulaire habituel dans sa propre langue (bonjour, merci et au revoir en albanais), il se déride aussitôt. Et au moment de partir, il m’offre carrément un café, puis une petite bouteille d’eau pour la route. Chassez le naturel, il revient au galop.
A peine remonté sur ma selle, je dois déjà en redescendre, interpellé par un habitant au bord de la route. Il s’appelle Emiliano et parle couramment le français car il vit au Luxembourg.
Emiliano
Il est en train de refaire le mur de clôture de la maison de ses parents avec son père et deux voisins. Il me demande d’emblée si je veux boire quelque chose mais sans attendre ma réponse, il part en courant dans sa maison. Il en ressort trente secondes plus tard pour m’offrir trois canettes : une bière, un coca et une boisson aux fraises.
Incroyables albanais : à ce rythme-là, je serai bientôt en rupture de petites tours Eiffel bleues…
Quand on traverse l’Albanie, il y a une curiosité que l’on remarque très vite : la multitude de petits bunkers qui sont éparpillés un peu partout dans le paysage. Le plus souvent en pleine nature, notamment dans les montagnes car elles représentent 80% du pays, mais aussi dans les villes et les villages. Ils ont été construits dans les années 1970-1980, pendant la dictature qui, à l’époque, avait fait du pays l’équivalent ou presque de ce qu’est la Corée du Nord aujourd’hui : l’un des pays les plus fermés du monde.
La folie paranoïaque du dictateur d’alors, Enver Hoxha, le conduisit à ordonner la construction de quelque 600.000 bunkers à des fins défensives, ce qui est colossal pour un si petit pays. Évidemment, ils n’ont jamais vraiment servi.
L’un des 600.000 petits bunkers albanais qui jalonnent le paysage
La capitale : Tirana
Je poursuis ma route qui passe désormais en partie par la côte. Le littoral albanais a beau être plutôt joli, je ne raffole pas vraiment du bétonnage en règle dont les villes côtières sont victimes. Une multitude d’immeubles y ont été construits sans aucune harmonie, ce qui donne l’impression de stations balnéaires à l’architecture complètement désordonnée.
Le tourisme se développant très vite dans la région, le seul objectif consiste à pouvoir accueillir un maximum d’estivants dans ces villes qui ont définitivement perdu tout charme. Je peux comprendre cette course à l’essor économique, en espérant qu’au moins il profitera aux habitants, mais je trouve cette précipitation regrettable.
La plage à Durrës
En poursuivant ma route vers Tirana, je parviens enfin à me procurer quelques Leks, la monnaie albanaise, ainsi qu’une carte SIM pour pouvoir communiquer normalement avec ma famille restée en France.
L’arrivée dans la capitale albanaise très animée constitue un petit choc pour moi, après avoir passé un bon mois bien au calme en pleine nature, au fil des pays traversés.
Immeuble avec la forme de la tête de Skanderbeg, héros national qui a résisté à l’Empire Ottoman
Après avoir loué une petite chambre chez l’habitante, je file manger un morceau dans un resto, la gastronomie n’étant pas la partie que je déteste le plus dans les voyages. Ma curiosité culinaire me fait pousser la porte d’un attrayant petit restaurant, spécialisé dans la cuisine typique albanaise. La carte que me tend le serveur n’étant traduite dans aucune langue, je n’y comprends rien, c’est pourquoi je lui demande de choisir le repas pour moi, avec pour seule consigne de me dégoter les plats albanais les plus traditionnels possible. Il choisit donc à ma place et je valide sans vraiment savoir ce qui m’attend, mais je lui fais confiance. C’est ainsi que je me retrouve un quart d’heure plus tard avec une banale salade verte accompagnée de tomates, concombre, œuf dur, jambon et mayonnaise en entrée, puis un steak – frites désespérément classique en guise de plat ! Si ça c’est la cuisine typique albanaise, alors en France j’ai souvent mangé albanais sans le savoir !
La Grande Mosquée de Tirana, ou mosquée de Namazgâh
En guise de digestion, une petite marche de quinze minutes à destination de la fameuse mosquée de Namazgâh ne me fait pas de mal. Située dans un quartier animé, elle est assez imposante. Avec ses quatre minarets, c’est le plus bel édifice religieux que je vois depuis le début du périple, à égalité avec l’église Saint-Jovan-Vladimir de Bar et ses grands dômes tout dorés, que j’ai vue au Monténégro.
Après un jour de repos mais aussi de pluie à Tirana, il est temps de repartir. La sortie de la capitale n’est pas facile. A l’heure où les gens vont tous au travail, je me retrouve à rouler au milieu d’une fourmilière de voitures et de bus pendant un long moment avant de pouvoir enfin sortir de la ville. Les files sont parfois si étroites qu’il n’y a pas de place pour rouler à deux de front, y compris pour un vélo. Je dois donc régulièrement m’imposer pour pouvoir passer même si évidemment, je m’incline humblement chaque fois qu’une voiture ou un bus force plus que moi : pour eux, ce n’est pas la priorité qui compte, c’est la solidité du véhicule. Mais globalement, cette cohabitation déséquilibrée entre ces grosses machines de ferraille et mon petit vélo vulnérable se passe bien, la plupart des conducteurs étant très respectueux, et une petite minorité seulement étant excitée et visiblement pressée d’aller travailler. Ces gens stressés, je les laisse filer car contrairement à eux, je suis zen et j’ai tout mon temps.
A la sortie de la ville, je longe une artère importante, elle aussi très fréquentée. Au total, il me faut une bonne vingtaine de kilomètres pour m’extraire enfin de ce trafic dense.
L’incroyable hospitalité albanaise
C’est à ce moment-là que, apercevant les montagnes enneigées au loin, je m’arrête sur le bord de la route pour faire quelques images. Une vieille Mercedes des années 80, qui roule encore mais péniblement, passe à ma hauteur. Elle est si vieille qu’elle a autant de mal que moi à grimper les côtes. Comme tous les albanais que je croise ou presque, son conducteur m’adresse un petit salut amical de la main. Mais lui s’arrête quelques mètres derrière moi, descend de sa voiture et avec un large sourire, m’offre une canette de boisson énergisante ! Je le remercie chaleureusement, il s’excuse de ne pas pouvoir discuter car il est pressé, il remonte vite dans sa Merco déglinguée et redémarre aussitôt. Même pressé, il a pris le temps de s’arrêter pour m’offrir ce qu’il avait sous la main. L’hospitalité albanaise dans toute sa splendeur.
La scène s’est déroulée si vite et cette générosité soudaine m’a tellement pris de court que je n’ai même pas eu le temps de penser à lui offrir une petite tour Eiffel bleue. Je m’en veux un peu. Pas grave, je me rattraperai sur le prochain albanais venu…
Les montagnes enneigées en toile de fond
Un peu plus tard, en début d’après-midi, alors que je traverse un village, un habitant m’interpelle sur le bord de la route. Il se trouve qu’il parle français car c’est un ancien migrant qui a passé cinq ans en France, dont deux en centre de rétention ! Après quoi il a préféré rentrer ici, dans son pays. Avec un tel vécu carcéral, il n’a ramené que des mauvais souvenirs de l’Hexagone. A l’exception d’un, mais pas le moindre : il a emporté dans ses bagages une française qu’il a ensuite épousée, et qui vit désormais ici, avec lui.
Je leur explique que je suis tombé sous le charme de ce pays magnifique et de ses habitants si généreux. Échaudé par les longs mois qu’il a passés en rétention au pays des droits de l’Homme, il se méfie quand même un peu de moi et me rétorque que les français n’aiment pas les albanais car selon lui, nous les prenons tous pour des voleurs et des délinquants ! Je lui réponds que ce n’est pas mon cas, au contraire je suis sous le charme de ce peuple si accueillant. J’ajoute que, si les français mettent selon lui tous les albanais dans le même sac, alors il est en train de faire la même chose avec nous les français : il décrète que tous les français détestent les albanais, ce qui n’est évidemment pas vrai. Ce n’est notamment pas mon cas, de plus, n’a-t-il pas épousé une française qui aime donc un albanais ? Ça a le mérite de le faire sourire. Sa méfiance initiale s’effondre et il devient alors aussi hospitalier que tout bon albanais qui se respecte, en m’offrant rapidement un coup de gnôle ! Il s’agit d’une eau-de-vie de raisin qu’il a faite lui-même selon une méthode traditionnelle locale, sans alambic me dit-il. Je m’attends alors au pire, à savoir un bon vieux digeo qui va bien m’arracher la gorge. Mais à ma grande surprise, son breuvage maison, clair et limpide, s’avère avoir du nez ainsi qu’un vrai goût de fruit, avec une teneur en alcool maîtrisée. Un petit délice. Décidément, ces albanais sont pleins de ressources.
Ainsi revigoré, je reprends la route sans faire trop de zigzags. En fin d’après-midi, je décide d’acheter quelques fruits, en version non liquide ceux-là, d’une part pour reprendre forces et vitamines, et d’autre part pour m’hydrater un peu car mes stocks d’eau sont critiques. Je m’arrête sur le bord de la route, dans une petite cahute qui déborde de fruits et légumes. Contrairement à ceux qui sont étalés dans les rayons de nos supermarchés, ceux-là n’ont pas été récoltés encore verts, afin de finir leur maturation au fond des cales du cargo qui les emmène en France. Ils ont été cultivés dans les champs du coin et n’ont été cueillis qu’une fois entièrement mûrs.
Je choisis deux oranges et au moment de les payer, le commerçant me fait comprendre qu’il me les offre ! C’est très gentil bien sûr mais un peu gênant car c’est quand même son gagne-pain. De plus, je peux bien m’offrir deux malheureuses oranges, a fortiori au prix dérisoire qui est le leur ici.
J’insiste donc un peu pour lui payer son dû mais cela fait perdre son sourire au gars, qui se lève et se met à me crier quelques mots incompréhensibles. Puis il termine sa tirade en exhibant de nouveau ses dents blanches dans un grand sourire éclatant, en me faisant bien comprendre que ces deux oranges sont offertes : ce n’est pas négociable. Devant une telle gentillesse, et cherchant à éviter tout incident diplomatique avec l’Albanie, je m’incline à grands coups de faleminderit (merci).
Encore un albanais au sens de l’hospitalité démesuré
Mes efforts sincères pour prononcer ce mot compliqué le font rire, puis il me crie « méllè, méllè » en me montrant un cageot de pommes rouges. Je comprends vite qu’il veut m’en offrir une, en plus des deux oranges mais je ne peux quand même pas décemment me servir moi-même. Devant mon hésitation, il se lève, tâte quelques pommes puis m’en donne une. Je le remercie en long, en large et en travers puis je lui demande de patienter un court instant, le temps d’aller chercher à mon vélo une petite tour Eiffel couleur Schtroumph.
Et alors que je fouille dans mes sacoches, il déboule avec une deuxième pomme, verte celle-là ! J’arrive enfin à extirper de tout mon bazar le petit symbole de l’Hexagone et le lui offre. Comme toujours quand je donne ce petit bout de France à quelqu’un, nous rions, nous nous remercions et nous nous quittons, le cœur léger.
Collecte de fruits offerts !
Sans doute ne suis-je qu’un grand sensible, ou bien un naïf, ou plus sûrement les deux à la fois, toujours est-il que cette hospitalité albanaise exacerbée, dont je bénéficie désormais plusieurs fois par jour, me touche profondément. Elle me fait plaisir, elle m’émeut, elle me rend heureux. Et en plus, côté pratique, elle me nourrit et m’abreuve ! Ces rencontres quotidiennes, qui sont simples mais assez intenses, me permettent de fraterniser avec de parfait.e.s inconnu.e.s. Ce sentiment improbable est plutôt déstabilisant, mais c’est bien pour vivre ce genre de moments que je fais ce voyage.
Et comme si les magnifiques paysages albanais traversés quotidiennement ne suffisaient pas, le bivouac du soir achève de rendre cette journée parfaite. Je plante ma tente juste au-dessus d’un joli lac bleu, dans un cadre naturel reposant.
Ce petit lac est cerné par les collines sauf à ma droite, où s’offre à moi une vue plongeante sur la vallée, les villages, la mer au fond et le coucher du soleil.
Épuisé par tant de beauté, humaine et naturelle, je me couche. Rideau.
S’il y a des gens avec qui le courant passe vraiment bien depuis le début de ce voyage, ce sont les bergers.
Ghezim, un berger, au milieu de ses brebis
J’en croise beaucoup sur mes petites routes de campagne et depuis mon vélo, j’en aperçois régulièrement au loin qui sont tout seuls dans leur champ, immobiles et impassibles face à leurs brebis. Chaque fois que j’observe cette scène récurrente, je me demande ce qu’ils peuvent bien ressentir en étant aussi isolés à longueur de journée, littéralement figés sur place à attendre que le temps passe, tout en fixant leur bétail sans broncher. J’imagine que chaque seconde qui s’écoule doit leur paraître une éternité mais je n’en sais trop rien, finalement. Peut-être au contraire savourent-ils cette quiétude au milieu de la nature qui les entoure. Et si c’était ça, la vraie vie ?…
Paolo fait redescendre son troupeau de la montagne
Alors évidemment, quand je déboule à proximité d’eux, ils sautent sur l’occasion inespérée que je représente de briser un peu leur solitude, autant que cela brise la mienne, d’ailleurs.
Discussion pastorale en vue…
Les échanges que j’ai avec ces bergers s’avèrent toujours très chaleureux. On discute comme on peut, ne parlant aucune langue commune, si ce n’est la seule langue universelle qui semble exister : le foot ! Ces bergers sont nombreux à me réciter fièrement et sans erreur des noms de joueurs français, qu’ils connaissent par cœur. Les pâtres les plus anciens me parlent de Platini et de ses coéquipiers géniaux des années 1980, avec une mémoire impressionnante : Rocheteau, Giresse, Tigana, Amoros… Tandis que les plus jeunes évoquent plutôt Mbappé, et que la génération intermédiaire m’envoie du Zidane avec nostalgie.
Un berger avec qui je partagerai de grands éclats de rire
C’est assez bluffant de voir à quel point les plus grands sportifs sont susceptibles de marquer des générations entières pendant plusieurs décennies, jusque dans les coins les plus reculés de la planète, comme ici au cœur des montagnes albanaises. Me retrouver confronté à cette universalité brute et originelle du sport, sans ses dérives actuelles, me fait du bien.
Les bergers m’accueillent toujours à bras ouverts…
Bref, avec les bergers, je me sens toujours bien. On rigole ensemble, on se serre la paluche, certains me prennent dans leurs bras au moment de se dire au revoir, comme si on se connaissait depuis toujours alors qu’on vient tout juste de se rencontrer. Mais dans tous les cas, une chose est sûre : ces gens-là sont aussi spontanés que sincères avec moi, et c’est cette authenticité que j’aime chez eux.
Et puis à la fin, nous finissons toujours par retourner chacun à notre solitude, eux au milieu de leur troupeau et moi sur mon vélo. Le chemin continue.
Avec Ghezim
Un pays sale
A propos de chemin, il y a une chose qui saute aux yeux quand on arrive en Albanie : la saleté le long des routes. Le sol est souvent jonché d’ordures que les automobilistes jettent par la fenêtre depuis des années.
Aucun nettoyage ne semble avoir lieu et les déchets s’accumulent donc par terre, y compris dans les endroits les plus natures qui soient.
Cette situation aberrante existe aussi dans les autres pays des Balkans que j’ai traversés, mais dans une moindre mesure. L’Albanie est le gros coup de cœur de mon périple mais je dois bien avouer que la saleté des routes est le gros point noir de ce si beau pays.
Amas exceptionnel d’ordures
Heureusement, la nature albanaise reste globalement somptueuse et tout au long de ma traversée du pays à la force des mollets, je trouve régulièrement des spots de bivouac enchanteurs, perdus en pleine nature dans des endroits où rien ne traîne par terre.
Le bivouac quotidien
La dernière rivière sauvage d’Europe : la Vjosa
Un jour, alors que je me dirige vers la Vjosa (qui se prononce « Viossa »), je m’arrête dans une petite station-service en bord de route pour faire le plein, mais d’eau. Je demande au patron si je peux remplir mes bidons mais c’est la voix de sa femme, juste au-dessus de nos têtes, qui me répond. Il m’invite à la rejoindre à l’étage pour me servir en eau. Mais sitôt arrivé là-haut, elle sort deux minuscules bouteilles de vingt-cinq centilitres du frigo contenant les boissons fraîches pour les clients, alors que je pensais juste remplir mes bidons au robinet des toilettes. Elle m’indique que ce n’est pas possible car selon elle, l’eau du robinet n’est pas bonne ici.
Je me dis que je trouverai de l’eau plus loin mais je décide de lui acheter quand même une petite bouteille car avec son mari, il se sont montrés sympas. Je prends quelques leks et lui demande le prix mais au lieu de me répondre, elle se sert carrément en attrapant quelques pièces dans ma main. Pas les petites pièces jaunes mais les grosses pièces blanches ! Au moment où elle s’apprête à les déposer dans la caisse, je lui demande de me les montrer car cela m’intrigue. Elle refuse ! J’insiste mais elle persiste dans son refus. La scène dure un peu avant qu’elle ne finisse par me les montrer enfin. Il s’avère qu’elle m’a pris cent cinquante leks, soit environ un euro cinquante pour un petit quart de litre d’eau seulement, ce qui ne doit pas être bien loin de l’eau la plus chère du monde, alors qu’elle ne provient quand même pas du fin fond du Sahara. Je lui demande de me rendre mes pièces car il est évident qu’elle abuse mais elle refuse et me contre-propose la micro-bouteille à un euro, ce que je refuse à mon tour. Elle descend alors royalement son prix à soixante centimes, soit une chute du cours de l’eau de 60% en dix secondes ! Je range la bouteille dans son frigo et lui demande une dernière fois mes pièces, qu’elle finit enfin par me rendre. Je la quitte d’un mirupovshim froidement poli (au revoir) puis je redescends.
Le pompiste me tend mes lunettes de soleil, que j’avais oubliées
Alors bien sûr, cela ne m’aurait pas ruiné de payer un euro cinquante pour trois gouttes d’eau, mais c’est le fait qu’elle m’ait pris à ce point pour un pigeon qui m’a dissuadé de le faire.
A peine redescendu, je vois que son mari est en train de lui parler. La discussion est assez vive et par les temps qui courent, je commence à craindre qu’elle ne lui raconte des mensonges sur ce qui vient réellement de se passer là-haut entre elle et moi. Mais quand je le vois la gronder comme une gosse qui vient de faire une bêtise, je comprends qu’elle lui a dit la vérité et qu’il n’est pas d’accord avec sa façon d’accueillir les voyageurs. C’est qu’on ne rigole pas avec le sens de l’accueil dans ce pays. Avec un air dépité et un sourire désolé, il m’emmène jusqu’à un robinet situé entre deux pompes à essence et m’invite à y remplir mes gourdes, ce que je m’empresse de faire. Je le remercie chaleureusement avant de reprendre ma route.
Cette anecdote n’est pas anodine car j’ai dû rencontrer là la seule albanaise dénuée de tout sens de l’hospitalité. L’exception qui confirme la règle, en quelque sorte. Son mari, par contre, s’est montré irréprochable, comme tous les albanais que je rencontre depuis que je sillonne ce beau pays. Il faut quand même préciser que cette dame avait raison sur un point : l’eau de ce robinet n’est vraiment pas bonne. C’est même la plus mauvaise que j’aie jamais bue : une infection ! Pas nocive, heureusement, mais immonde. C’est sûr, je change cette eau à la première occasion.
Pour ce soir, j’avais prévu de me trouver une petite auberge dans le village touristique de Tepelenë, surtout pour avoir la possibilité de prendre une bonne douche.
Mais en chemin, la nature autour de moi est trop tentante, elle semble me tendre les bras pour m’accueillir une nuit supplémentaire.
Alors tant pis pour la douche, elle attendra bien vingt-quatre heures de plus : ce soir j’en profite, je dors encore dehors, je m’y sens tellement chez moi. Mon hôtel pour cette nuit, ce sera la nature.
La rivière Vjosa
Je décide donc de contourner Tepelenë plutôt que de m’y arrêter. Pourtant, le village perché sur les hauteurs jouit d’une belle vue sur la vallée et les montagnes. Mais surtout, il comporte plusieurs sites d’intérêt, notamment la forteresse du célèbre Ali Pacha, ou encore les vestiges du camp dans lequel étaient internés les prisonniers politiques pendant la sombre période communiste. Beaucoup n’en sont jamais revenus.
Le village a donc beau avoir quelques attraits touristiques, la perspective de passer une nouvelle nuit dans la nature sublime de la région m’attire nettement plus que celle de dormir sous un toit au milieu des quatre mille habitants du coin. C’est dingue cette attirance croissante pour la nature au fil du voyage : j’ai de plus en plus l’impression de m’ensauvager…
Le pont suspendu de Tepelenë
Pour quitter cette cité dans laquelle je suis à peine entré, je dois traverser un pont, pittoresque mais d’un autre temps, suspendu au-dessus de la rivière Vjosa. Ce joli cours d’eau a la réputation d’être la dernière rivière sauvage d’Europe, hors Russie occidentale.
Le vieux pont rouillé m’inspire une confiance modérée mais après tout, s’il est là et qu’il est ouvert, c’est bien pour qu’on passe dessus. Alors allons-y.
J’y engage mon vélo et comme le tablier est en légère descente, mon bolide à deux roues prend tout de suite un peu de vitesse. Je dévale ainsi la passerelle, en prenant soin de slalomer entre les quelques lattes de bois qui ont plus ou moins été fixées au sol pour boucher les trous de certaines planches cassées…
Un peu plus loin, alors que je commence à chercher un spot de bivouac autour de moi, j’arrive à un croisement où je me retrouve nez-à-nez avec un sexagénaire local. Il me lance, en italien et dans un grand sourire : « Ciao ragazzo » (« salut garçon »). Je lui demande s’il est « ragazzo italiano », il me répond que non, il est « ragazzo albanese ». Je me présente alors comme un « ragazzo francese » pour clore cette discussion dans la langue de Dante, et il me répond avec les seuls mots qu’il connaît dans celle de Molière : « merci beaucoup » puis « je t’aime » !
Avec le ragazzo albanese
Un peu plus loin, alors que le soleil décline tranquillement en enrobant les paysages de sa lumière dorée du soir, je trouve un petit chemin tout cabossé qui descend à travers les champs. Je l’emprunte et j’ai de la chance, il termine sa course sur les berges de la Vjosa : le spot de bivouac idéal.
Mon spot de bivouac, sur les berges de la rivière Vjosa
Je pose ma tente au milieu des cailloux, face aux montagnes et à la rivière. Son cours tumultueux serpente à travers les gros rochers blancs et polis qui jalonnent son cours. Ici, la nature est sauvage, vivante, exaltée et devant ce spectacle naturel, j’ai l’impression de le devenir à mon tour.
Bivouac sur les berges de la Vjosa
Comme toujours quand je bivouaque, je suis aux première loges pour voir le soleil descendre et rougir pendant que je mange.
Ma petite tente face à la Vjosa
Quand je passe la nuit en pleine nature et que le petit matin arrive, nous nous levons souvent en même temps, le soleil et moi. L’un qui brille de mille feux et l’autre tout vaseux.
Përmet et le vieux pont ottoman
En quittant ce spot de bivouac sur la rivière, je réalise que la fin de mon séjour en Albanie est proche. Trop proche. Je la quitterai sans doute demain. D’ici là, il faut que j’en profite encore au maximum, aussi, je décide de transiter par le village de Përmet : ces derniers jours, plusieurs albanais m’ont conseillé d’aller y faire un tour. Avec ses huit mille habitants, il est situé sur cette fameuse rivière Vjosa.
La Vjosa
Lorsque j’arrive à Permët, je dois commencer par traverser un vieux pont rouillé en totalité, dont la solidité n’est pas la première chose qui saute aux yeux.
L’arrivée à Përmet
Malgré ça, je trouve qu’il a de la gueule avec toutes ces fleurs qui poussent juste à côté, cette rivière verte qui coule en dessous, et ces sommets encore enneigés en arrière-plan. On dirait un pont d’un autre temps, ou un pont du bout du monde. Ou plutôt les deux à la fois.
Mais je le trouve plutôt photogénique avec les montagnes au loin, aussi je prends le temps de l’immortaliser avant de m’engager dessus tout en poussant mon vélo.
Le vieux pont rouillé de Përmet
Je n’ai pas compté le nombre de jours depuis lesquels je ne me suis pas douché. Cela en fait trois ou quatre, je crois. Aussi, je décide d’arrêter là les frais et de prendre une petite chambre d’hôtel, la moins chère du village. C’est non pas son confort qui m’attire, mais juste la douche dont elle est dotée, car elle me permettra de remédier à ce petit déficit d’hygiène. Ce ne sera pas du luxe.
Quand je passe la porte d’entrée du petit hôtel, j’adresse le fameux pershendetia (bonjour) au patron, qui est assis au fond de la salle de restaurant. Il me répond comme un perroquet puis, sans un mot supplémentaire ni le moindre sourire mais avec une générosité typiquement albanaise, il me montre la bouteille de raki qui m’attend patiemment sur le comptoir, juste à côté de moi. Il me fait signe de me servir dans l’un des verres disposés un poil plus loin. C’est à peine le milieu de la matinée car j’ai très peu roulé aujourd’hui, ce n’est donc pas vraiment l’heure d’engloutir un verre d’alcool fort, mais puis-je décemment lui dire non ? Non. Car c’est important de respecter les coutumes locales. Je remplis donc deux verres sans trop me faire prier et je file m’asseoir avec lui tout au fond, à la fois pour lui prendre une chambre et pour trinquer.
Sa femme nous rejoint et me demande d’où je viens. De France. De France ? Mais c’est juste à côté de l’Allemagne, ça, où travaille justement leur fils aîné, me répondent-ils en chœur. Le papa, entre deux gorgées de raki, appelle aussitôt son rejeton en visio et à peine le fiston a-t-il décroché que son père me jette le téléphone entre les mains sans explication !
Un peu surpris, je dégaine comme je peux un guten morgen (bonjour dans la langue de Goethe) tout droit sorti de mes vieux souvenirs de lycée et me voilà donc, sans trop savoir comment, en train de discuter en anglais avec un inconnu albanais qui se trouve en Allemagne. Au bout de cinq minutes, après m’avoir donné quelques conseils sur les sites à visiter autour de Përmet, il s’excuse très poliment de devoir raccrocher mais c’est l’heure pour lui d’aller travailler. Je prends congé du fils, le papa et moi achevons notre verre de raki et la maman me montre ma chambre. Parfois, la vie est simple.
Je passe l’après-midi à me balader un peu dans Përmet. Le midi comme le soir, je déguste des plats typiques albanais dans un petit restaurant que j’ai déniché par hasard et par chance, délicieux et vraiment bon marché. Les deux fois, le patron m’offre son dessert fait maison. Et oui, c’est ça l’Albanie.
Le lendemain matin, je prends la direction d’un site dont tout le monde m’a parlé à Përmet : un vieux pont ottoman situé à une quinzaine de kilomètres. Pour y aller, je dois longer la Vjosa, qui est décidément une belle rivière sauvage que je ne me lasse pas d’admirer. Tantôt verte, tantôt bleue, elle est toisée par des montagnes dont les pentes sont fleuries et les cimes enneigées. Ma route est déserte et c’est tellement grisant de se sentir si seul au monde, tout en roulant tranquillement dans ce décor majestueux.
Le paysage de bord de route
J’arrive assez vite au fameux pont ottoman, le pont de Katiut. Il s’agit d’une vieille arche en pierres relativement bien conservée, construite par les ottomans au XVIIe siècle.
Le vieux pont ottoman de Katiut
Enjambant la rivière Lengarica, il est cerné par les montagnes, dont les plus proches sont transpercées par de petites grottes. L’endroit est pittoresque.
Mais ce joli site très nature est surtout connu pour ses sources thermales aux vertus thérapeutiques réputées. Les gens viennent se délasser et se soigner ici depuis l’Antiquité.
Une petite cascade aux pieds du pont ottoman
Pour rejoindre le principal bassin thermal, il suffit de traverser le pont puis de marcher une cinquantaine de mètres. La température de l’eau est de trente degrés y compris quand il neige, voire plus selon la saison.
Le principal bassin thermal, à proximité de Permët et Bënjë
En se délassant dans cette eau délicieusement tiède, on a une vue imprenable sur le pont d’un côté et les montagnes enneigées de l’autre.
La vue depuis le pont
Le site n’est pas très grand mais le bel écrin naturel dans lequel il est posé le rend particulièrement attrayant. Nous ne sommes que début avril mais il commence déjà à y avoir un peu de monde. L’été, le site, victime de son succès, est paraît-il pris d’assaut.
Le pont de Katiut dans son cadre naturel
Moi qui avais hésité ce matin à faire le petit détour nécessaire pour venir jusqu’ici, je ne regrette vraiment pas d’avoir pédalé ces quelques kilomètres supplémentaires malgré les montées. A bien y réfléchir, c’est l’un des endroits que j’aime le plus depuis le début de mon périple.
La route du pont de Katiut
Je reprends mon chemin sur une petite route où presque aucune voiture ne passe. Seul avec mon vélo, je traverse des paysages où les arbres en pleine floraison font face aux dernières neiges qui habillent encore le sommet des montagnes. Plus pour très longtemps.
Mon itinéraire rejoignant rapidement le cours de la Vjosa, je continue à en prendre plein les yeux.
La Vjosa aux pieds des montagnes
A chaque méandre de la rivière, les paysages changent. Son cours serpente au milieu de forêts plus ou moins denses, continue sa course dans des prairies fleuries puis irrigue quelques champs cultivés, toujours aux pieds des montagnes majestueuses.
La Vjosa
Rouler à vélo dans de tels paysages procure un sentiment de liberté très fort, bien plus que je ne l’aurais imaginé. Mais les plus belles choses ont une fin et à l’approche de la Grèce, je vois le cours de la Vjosa s’éloigner petit à petit.
Une heure ou deux après avoir quitté cette rivière si sauvage, j’atteins la frontière albano-grecque. En un mois passé dans les Balkans, c’est ma sixième et dernière frontière, mais c’est la première que je traverse sans qu’il pleuve ! Sans doute un dernier clin d’œil de ce pays si attachant que je quitte, et qui tient absolument à m’éblouir jusqu’à la dernière seconde. Il n’a pourtant pas besoin de ça puisque je suis totalement conquis depuis longtemps.
A l’heure du bilan, je dois bien dire que l’Albanie m’a profondément marqué. Je me sens même un peu sous le choc de quitter ce pays où la nature est si belle, et dont le peuple est si attachant, si généreux. Mais maintenant je vais entrer en Grèce, où j’espère bien avoir encore de nombreuses occasions de savourer pleinement ce périple qui, pour l’instant, dépasse largement toutes les attentes que j’avais placées en lui avant mon départ, il y a plus d’un mois.
Mirupovshim Shqipëria (au revoir l’Albanie)
Quand j’arrive au poste frontière, le douanier me fait passer avant une famille d’albanais, qui attend pourtant depuis un moment déjà l’autorisation d’entrer en Grèce. Les formalités prennent en effet plus de temps pour les citoyens non membres de l’Union Européenne. Gêné de leur passer ainsi devant, je leur dis tout le bien que je pense de leur pays, pour lequel j’ai eu un énorme coup de cœur au cours des onze jours que je viens d’y passer. Chacun d’entre eux me répond par un sourire à s’en décrocher la mâchoire. Quelques minutes plus tard, côté grec, ils me doubleront en voiture dans une côte que mon vélo et moi peinons à monter, avec un petit coup de klaxon pour m’encourager.
Il faut maintenant que j’apprenne les mots de base dans ce nouveau pays : ici, pershendetya se dit kalimera, faleminderit se dit efkaristo et mirupovshim se dit antio (respectivement bonjour, merci et au revoir).
Le coin du cycliste
Trans Dinarica : l’itinéraire de rêve pour les cyclistes
La Trans Dinarica est un itinéraire cycliste qui relie les pays des Balkans occidentaux en traversant une superbe chaîne de montagnes, les Alpes Dinariques. Ce parcours a été conçu pour permettre aux cyclo-voyageurs qui s’aventurent par là de découvrir tout le patrimoine local : naturel, culturel, gastronomique…
La Trans Dinarica en Croatie
Cet itinéraire passe par des villages, des forêts, des montagnes, ou encore par la mer. Il alterne entre routes bitumées très peu fréquentées et chemins de terre en pleine nature. Il traverse des parcs nationaux et des sites classés au patrimoine de l’humanité par l’Unesco.
Bivouac sur le parcours de la Trans Dinarica
Tout au long du parcours, on découvre l’hospitalité des habitants des Balkans ainsi que les paysages à couper le souffle de cette superbe région méconnue, en plein cœur de l’Europe. Bref, quand on roule sur la Trans Dinarica, on en prend plein les yeux et on se sent une âme d’aventurier !
Sur la Trans Dinarica, sous la pluie (Bosnie-Herzégovine)
La pépite : le site Trans Dinarica
La carte suivante montre sommairement le parcours de la Trans Dinarica (copie d’écran extraite du site Trans Dinarica).
En cliquant pays par pays, ce site propose également de nombreux itinéraires alternatifs : rejoindre le parcours depuis les grandes villes, faire des détours pour aller visiter des sites intéressants à proximité, etc.
A titre d’exemple, c’est l’un de ces détours que j’ai utilisé pour traverser l’île de Pag, qui s’est avérée l’un des plus beaux endroits visités lors de ma « Trans Europa » !
La Trans Dinarica passe par la rivière Drin (Albanie)
Pour se procurer le parcours précis ainsi que sa trace GPS, ce que j’ai fait, il suffit donc de se connecter au site officiel : Trans Dinarica.
Bien sûr, ce n’est pas gratuit mais ce n’est pas très cher non plus et surtout, cela vaut tellement le coup : si, comme moi, vous êtes un.e cycliste amoureux.se de la nature, alors le rapport qualité-prix de ces packs est carrément exceptionnel. On traverse des endroits tellement natures, isolés et sauvages sans jamais se perdre que ça vaut largement la peine, selon moi, de s’offrir ces packs.
A l’inverse, l’itinéraire de la Trans Dinarica traverse peu de villes. Aussi, si vous êtes attiré.e par les grandes métropoles, ces packs ne vous conviendront peut-être pas : privilégiez alors plutôt les itinéraires Eurovélo (lire plus bas), qui seront beaucoup plus adaptés à vos goûts citadins (capitales, monuments, musées, hébergements etc).
Pour résumer, la Trans Dinarica a plutôt tendance à fuir les zones touristiques et notamment la côte Adriatique, avec ses stations balnéaires souvent prises d’assaut, pour s’enfoncer dans les montagnes beaucoup moins fréquentées. Contrairement à Eurovélo, qui ne dévie à peu près jamais des itinéraires touristiques.
On peut se procurer le pack de la Trans Dinarica pour les huit pays à un tarif à mon avis avantageux (à partir de 90 euros), ou bien choisir un pack par pays (de 8 à 23 euros selon le pays). Le lien : se procurer le pack de navigation de la Trans Dinarica.
L’itinéraire de la Trans Dinarica (Croatie)
Remarque : au cas où vous vous posiez la question, aucun lien de ce blog n’est sponsorisé. Je ne perçois donc aucune commission, que vous cliquiez ou non !
Le long de la Trans Dinarica
En préparant votre périple à vélo, si vous vous interrogez sur la Trans Dinarica, n’hésitez pas à me poser vos questions dans la rubrique « commentaires » (votre @dresse mail ne sera pas publiée, contrairement à votre question qui le sera avec un léger décalage, généralement de quelques heures) : c’est avec plaisir que j’essaierai d’y répondre 🙂
Les itinéraires Eurovélo
Beaucoup plus connus que la Trans Dinarica encore confidentielle, les itinéraires Eurovélo ont fait leurs preuves depuis longtemps. Au nombre de dix-sept à ce jour, ils sillonnent l’Europe du Cap Nord à Malte, et de l’Irlande occidentale aux confins de l’Orient.
L’esprit est de constituer un réseau cohérent de grands itinéraires cyclables européens, en connectant les capitales et les grandes villes du continent. Le patrimoine naturel et culturel est mis en valeur tout en favorisant le tourisme durable.
Le réseau Eurovélo
Enfin, la sécurité des usagers est toujours prise en compte. Ainsi, les routes doivent être balisées et continues. Elles doivent également éviter les routes à fort trafic. Elles combinent donc pistes cyclables et routes secondaires, voire chemins balisés.
Le principal inconvénient, c’est que peu de ces routes Eurovélo sont totalement terminées.
Je suis attentivement l’évolution de certaines d’entre elles depuis cinq ans et pourtant, rien n’a bougé : elles en sont toujours au même stade (en général l’un des trois stades en rouge sur le tableau suivant) selon le site Eurovélo lui-même. Aucune évolution en cinq ans !
Percevoir les fonds européens, c’est bien, mais les utiliser pour procéder aux aménagements promis, ce serait mieux !
Les différents stades de développement des routes Eurovélo
J’enfonce un peu le clou : Eurovélo existe depuis 1995 mais trente ans plus tard (au 27 octobre 2025), une seule route est entièrement terminée ! Il s’agit de l’Eurovélo 19 : la route cyclable de la Meuse (1.050 km). Et cinq autres sont (enfin) à un état d’avancement supérieur à 90% :
Une seule route terminée en vingt ans, et cinq autres qui ne sont plus très loin de l’être, sur dix-sept routes en tout (les n° 16 et 18 n’existant pas encore), ce n’est quand même pas énorme. Bien sûr, il ne faut pas non plus cracher dans la soupe : ces dix-sept routes ont au moins le mérite d’exister, et Eurovélo reste un superbe projet pour les voyageurs à vélo.
Les automobilistes albanais
Pour les cyclistes qui recherchent une sécurité optimale sur la route, l’Albanie est un petit paradis. En effet, les automobilistes sont si respectueux des cyclistes qu’ils les doublent systématiquement en roulant sur la voie de gauche, y compris quand une voiture arrive en face d’eux ! J’ai pu le constater dès que j’ai passé la frontière depuis le Monténégro, puis quotidiennement pendant les onze jours que j’ai passés en Albanie.
A plusieurs reprises, j’ai carrément eu peur pour ces automobilistes car ils me doublaient sur la file de gauche alors qu’une voiture arrivait en face. Mais ceux qui arrivaient en face justement, fonctionnent de la même manière et ce sont donc eux qui se poussaient sur l’extrême bord de la route, parfois au ras du fossé, pour laisser passer la voiture en train de me doubler. Parfois ils se frôlaient, parfois ils devaient piler tous les deux pour ne pas se rentrer dedans, mais toujours ils passaient vraiment au large de moi, tout à gauche, donc.
Dans les pays que j’avais traversés précédemment (un peu en Italie et au Monténégro mais surtout en Croatie, et plus encore en Bosnie-Herzégovine), les voitures attendaient brièvement derrière moi lorsqu’une voiture arrivait en face, avant de me doubler. En Albanie, c’est différent : ils ne ralentissent pas, ils n’attendent pas derrière les cyclistes, ils passent, avec une grande marge de sécurité puisqu’ils doublent toujours sur la file de gauche et si quelqu’un arrive en face, c’est lui qui se pousse !
Je ne me suis donc absolument jamais senti en danger sur les routes albanaises. Le seul bémol concerne la capitale, Tirana où, comme indiqué dans l’article, quelques automobilistes pressés d’aller travailler à l’heure de pointe ont parfois un peu forcé le passage, mais sans jamais que je ne me sente vraiment en danger. Il me suffisait de les laisser passer dans les bouchons tiranais.
Petite queue de poisson à Tirana
En conclusion, les seules fois où j’ai eu peur sur les routes albanaises, c’était pour les automobilistes eux-mêmes, lorsqu’ils étaient à deux doigts de se percuter parce que l’un d’eux me doublait trop largement. Et pour tout dire, c’est anecdotique mais je me sentais tellement en sécurité que c’est dans ce pays que j’ai définitivement enlevé mon casque.
Infos pratiques
Où dormir à Përmet ?
J’ai dormi au Ramis Hotel & Outdoor Sports Center. C’est l’un des hôtels les moins chers de Përmet, il est propre, le confort est correct, les propriétaires sont accueillants et le petit déjeuner est copieux.
En plus de la partie hôtelière, l’établissement propose diverses activités, notamment la location de vélos et surtout, des sorties rafting sur la magnifique Vjosa. C’est l’un des fils des propriétaires qui assure l’encadrement de ces activités.
La Vjosa est un petit paradis naturel dans lequel de nombreuses activités sont possibles : le rafting est la plus prisée, mais on peut également descendre la rivière en bouée, faire des randonnées, du vélo (y compris électrique), du quad, de l’équitation…
Pour réserver ces activités, il y a plusieurs possibilités :
Demander des infos à votre hôtel, qui vous guidera ou, dans certains cas, qui vous proposera lui-même ses propres activités.
Après l’Italie, la Slovénie, la Croatie et la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro est la quatrième étape d’un voyage à vélo effectué en 2025 entre la France et la Grèce.
Les étapes suivantes sont l’Albanie, la Grèce… et la Turquie !
La frontière montagneuse entre la Bosnie-Herzégovine et le Monténégro est l’un de ces endroits dont la géographie a le secret : située à environ 1.000 mètres d’altitude, je l’atteins après une longue montée pluvieuse côté bosnien, et je la quitte par une longue descente ensoleillée côté monténégrin. Le contraste est étonnant.
Au Monténégro, les arbres ont déjà commencé à verdir. Les champs sont en fleurs, le soleil brille et les couleurs explosent un peu partout, ce qui me change radicalement de la grisaille pluvieuse qui s’est montrée omniprésente pendant toute ma traversée de la Bosnie-Herzégovine. D’un côté de la frontière, c’est encore l’hiver et de l’autre, c’est déjà le printemps ! C’est fou comme les paysages peuvent être différents à seulement quelques kilomètres d’écart.
Je ne le sais pas encore mais cette étape marquera la disparition brutale de la pluie jusqu’à la fin de mon périple, à l’exception de quelques averses de temps en temps. Rien à voir avec tout ce que j’ai enduré ces derniers temps, à travers les Balkans depuis l’est de l’Italie. Désormais, c’est un autre voyage qui commence pour moi et la conséquence immédiate, c’est qu’après ces quinze jours de pluie quasi ininterrompue, mon moral se regonfle à bloc d’un seul coup.
L’entrée des bouches de Kotor
Vue sur la ville de Kotor
La baie de Kotor
En voyage, les destinations où je me régale le plus sont souvent celles où il n’y a rien à voir ! En effet, comme on n’y trouve généralement aucun visiteur, les habitants ne sont pas habitués aux fortes affluences touristiques et du coup, ils sont souvent encore plus ouverts qu’ailleurs. C’est pour cette raison que j’avais exclu la très fréquentée baie de Kotor de mon périple.
Notre-Dame-des-Anges, baie de Kotor
Mais le temps était si mauvais en Bosnie-Herzégovine que j’ai fini par adapter mon itinéraire à la météo : au lieu d’arriver au Monténégro par les montagnes du nord annoncées comme très pluvieuses, j’ai décidé de passer par la côte, au sud-ouest du pays, où la météo attendue est plus clémente. C’est là que se situent les bouches de Kotor, considérées comme la perle du pays.
Kotor est une petite ville fortifiée cernée par des montagnes vertigineuses qui se jettent brutalement dans la mer. Elle est située au cœur des bouches, que l’Unesco a classées au patrimoine de l’humanité.
Le lieu est très touristique mais j’ai la chance d’y être en plein mois de mars, c’est-à-dire en basse saison. Et je dois bien dire que le site vaut le déplacement.
La vieille ville de Kotor
Le but consiste à aller admirer la ville depuis les hauteurs, d’où la vue est réputée. Pour cela, il faut emprunter à pied un petit chemin escarpé qui serpente inlassablement dans la montagne. Il est constitué de nombreux lacets afin d’en faciliter l’ascension, mais j’en ai tellement bavé en gravissant à vélo les montagnes des balkans ces dernières semaines, que mes mollets désormais bétonnés prendraient presque cette petite escalade pour une promenade de santé.
Kotor
La côte monténégrine
Sur mon nouvel itinéraire, il fait désormais beau quasiment tous les jours et ça, après mon vécu apocalyptique des dernières semaines, ça n’a pas de prix. Moi qui avais initialement prévu de me perdre dans les montagnes septentrionales du pays, je me retrouve donc à longer la côte avec tous ses aménagements touristiques et pourtant, le soleil ambiant ne me fait pas regretter ce choix contraint.
La côte monténégrine
Je traverse à tour de rôle les différentes stations balnéaires qui se succèdent sur la côte : Budva, Sveti Stefan, Petrovac Na Moru, Bar…
L’île de Sveti Stefan
J’aurais clairement préféré rouler dans les montagnes du nord, comme initialement prévu. Mais le beau temps qui inonde toutes ces petites villes donnant sur la Grande Bleue contraste agréablement avec la pluie qui a submergé tous les paysages que j’ai traversés en Bosnie-Herzégovine. Alors ici, j’en profite car la côte est globalement jolie.
Un soir, après avoir roulé sensiblement plus longtemps que prévu et avec beaucoup de dénivelé, le temps ensoleillé du Monténégro change assez brusquement, cherchant visiblement à imiter celui de sa voisine bosnienne. Un froid inhabituel me tombe dessus en même temps que la fatigue du jour m’assaille. Je me mets alors à chercher un spot de bivouac que pour une fois je ne trouve pas, le littoral étant bétonné à peu près partout, et je me résous à prendre un petit hébergement pour la nuit, dans la station balnéaire de Bar.
L’église Saint-Jovan-Vladimir de Bar
En partant le lendemain, la béquille de mon vélo se met à trembloter quand je roule. C’est normal qu’au fil des kilomètres et des vibrations, elle finisse par se dévisser. J’essaie bien de la revisser mais c’est impossible car je n’ai pas les outils adéquats pour atteindre la tête de vis, que les concepteurs du vélo ont eu la lumineuse idée de rendre inaccessible. Par chance, je passe devant un garage à la sortie de la ville de Bar. Le mécano est très sympa mais à ma grande surprise, il n’arrive pas lui non plus à venir à bout de ce problème pourtant ridicule. Il m’envoie chez un mécano vélo, non loin de là. Alors bien sûr, je pourrais continuer à rouler sans utiliser la béquille mais elle m’est quand même bien utile pour immobiliser mon vélo en position debout chaque fois que je m’arrête sur le bord de la route. Je décide donc de prendre le temps de passer chez ce mécano vélo pour régler enfin ce petit problème. Je dois tourner un bon moment dans ce quartier désert avant de finir par le trouver, puisqu’il n’y a aucun panneau menant chez lui.
Le type en question s’appelle Novak Djinovic. Son petit atelier est situé dans le jardin de sa maison, dans un quartier résidentiel à la périphérie de Bar. Novak ne parle pas beaucoup et sourit peu. Par contre, il agit et je préfère ça plutôt que le contraire. A l’inverse de son voisin garagiste, il ne se laisse pas impressionner par cette modeste béquille, qu’il dévisse rapidement et sans problème. Puis il dévisage avec un air circonspect la vis qui la fixait au vélo, avant de m’expliquer sobrement qu’elle est trop courte, dans un anglais fortement marqué par son rude accent balkanique. Il fouille dans les petites boîtes posées un peu partout sur son établis jusqu’à ce qu’il trouve une vis qui convienne, deux fois plus grande. Il revisse la béquille et en dix minutes, mon problème est réglé.
En me montrant toutes mes sacoches posées par terre à l’entrée de son atelier, que j’avais démontées pour qu’il puisse manipuler mon vélo et le réparer, il me demande d’où je viens et où je vais à coups de pédales. Je lui explique donc mon voyage France – Grèce et il se montre si intéressé qu’au moment de payer, il me dit que c’est cadeau ! Bien sûr, il n’a pas passé énormément de temps à réparer et cela ne lui a coûté qu’une vis mais le geste est sympa quand même, car d’autres n’auraient pas hésité à me facturer trente ou cinquante euros pour une prestation similaire. J’insiste un peu pour payer en rassemblant mes quelques euros dans la main. Ignorant mes billets, il se contente de prendre trois pièces d’un euro et me dit en riant que ça lui paiera le café. Il m’explique qu’il est toujours heureux de dépanner les voyageurs à vélo puisque visiblement, je ne suis pas le seul à venir lui demander de l’aide dans ce coin pourtant perdu de la ville.
A partir de là, la langue mal pendue de Novak le taiseux se délie, et nous discutons ensemble pendant trois bons quarts d’heure. Il sourit désormais tout le temps et m’explique qu’à trente-neuf ans, il est ancien cycliste professionnel, comme en attestent toutes les coupes qui décorent un coin de son atelier. Les plus grosses et les plus prestigieuses trônent dans le séjour de sa maison. Pour le remercier de son aide, je lui offre une petite tour Eiffel bleue, qu’il place sur l’étagère du bas au milieu de ses trophées.
Novak Djinovic, ex-cycliste pro monténégrin
Nous faisons alors un selfie à sa demande car, me dit-il, il en fait avec tous les voyageurs à vélo qui lui rendent visite, son but étant à terme de décorer un mur entier de son atelier avec tous les selfies pris avec les cyclo-voyageurs rencontrés !
Je me sens plutôt honoré à l’idée de savoir qu’un jour, ma trombine contribuera à agrémenter le mur d’un atelier vélo au fin fond du Monténégro…
Avec Novak Djinovic
J’ai perdu pas mal de temps ce matin à chercher quelqu’un pour réparer ma béquille. La discussion qui s’en est suivie avec Novak ne m’a pas fait rattraper mon retard, mais ce n’est pas bien grave puisque c’est justement le genre de rencontres que je recherche en voyage.
Dans l’après-midi, alors que j’approche de la frontière albanaise, un type dans une camionnette arrêtée sur le bord de la route me fait de grands signes. En même temps que je m’arrête, il descend de son véhicule : c’est un policier en uniforme. Je n’ai pas l’impression d’avoir fait une boulette et je m’attends plutôt à une demande de bakchich mais heureusement pour moi, le bonhomme est hilare !
En le regardant s’approcher, son visage me dit quelque chose et pourtant, je ne le reconnais pas tout de suite car son uniforme perturbe mes souvenirs.
« Apartman dobra ? » me demande-t-il sans se départir de son rire, c’est-à-dire je crois : « l’appartement était bien ? » Ça me revient alors enfin : c’est le gars qui m’a loué le petit appartement la veille au soir, à la dernière minute et à prix bradé, alors que la nuit tombait et que pour une fois, je ne trouvais pas de bivouac. Mais il était en civil et c’est vrai qu’un uniforme, ça vous transforme un bonhomme ! Bref, il m’explique qu’il travaille pour la douane et contrôle les voyageurs en provenance de l’Albanie voisine.
C’est sur cette dernière rencontre inattendue et amicale que je quitte le Monténégro pour entrer dans un pays qui, je ne le sais pas encore, va me marquer profondément : l’Albanie…
Le coin du cycliste
Trans Dinarica : l’itinéraire de rêve pour les cyclistes
La Trans Dinarica est un itinéraire cycliste qui relie les pays des Balkans occidentaux en traversant une superbe chaîne de montagnes, les Alpes Dinariques. Ce parcours a été conçu pour permettre aux cyclo-voyageurs qui s’aventurent par là de découvrir tout le patrimoine local : naturel, culturel, gastronomique…
La Trans Dinarica en Croatie
Cet itinéraire passe par des villages, des forêts, des montagnes, ou encore par la mer. Il alterne entre routes bitumées très peu fréquentées et chemins de terre ou de pierres en pleine nature. Il traverse des parcs nationaux et des sites classés au patrimoine de l’humanité par l’Unesco.
Bivouac sur le parcours de la Trans Dinarica
Tout au long du parcours, on découvre l’hospitalité des habitants des Balkans ainsi que les paysages à couper le souffle de cette superbe région méconnue, en plein cœur de l’Europe. Bref, quand on roule sur la Trans Dinarica, on en prend plein les yeux et on se sent une âme d’aventurier !
Sur la Trans Dinarica, sous la pluie (Bosnie-Herzégovine)
La pépite : le site Trans Dinarica
La carte suivante montre sommairement le parcours de la Trans Dinarica (copie d’écran extraite du site Trans Dinarica).
En cliquant pays par pays, ce site propose également de nombreux itinéraires alternatifs : rejoindre le parcours depuis les grandes villes, faire des détours pour aller visiter des sites intéressants à proximité, etc.
A titre d’exemple, c’est l’un de ces détours que j’ai utilisé pour traverser l’île de Pag, qui s’est avérée l’un des plus beaux endroits visités lors de ma « Trans Europa » !
La Trans Dinarica passe par la rivière Drin (Albanie)
Pour se procurer le parcours précis ainsi que sa trace GPS, ce que j’ai fait, il suffit donc de se connecter au site officiel : Trans Dinarica.
Bien sûr, ce n’est pas gratuit mais ce n’est pas très cher non plus et surtout, cela vaut tellement le coup : si, comme moi, vous êtes un.e cycliste amoureux.se de la nature, alors le rapport qualité-prix de ces packs est carrément exceptionnel. On traverse des endroits tellement natures, isolés et sauvages sans jamais se perdre que ça vaut largement la peine, selon moi, de s’offrir ces packs.
A l’inverse, l’itinéraire de la Trans Dinarica traverse peu de villes. Aussi, si vous êtes attiré.e par les grandes métropoles, ces packs ne vous conviendront peut-être pas : privilégiez alors plutôt les itinéraires Eurovélo (lire plus bas), qui seront beaucoup plus adaptés à vos goûts citadins (capitales, monuments, musées, hébergements etc).
Pour résumer, la Trans Dinarica a plutôt tendance à fuir les zones touristiques et notamment la côte Adriatique, avec ses stations balnéaires souvent prises d’assaut, pour s’enfoncer dans les montagnes beaucoup moins fréquentées. Contrairement à Eurovélo, qui ne dévie à peu près jamais des itinéraires touristiques.
On peut se procurer le pack de la Trans Dinarica pour les huit pays à un tarif à mon avis avantageux (à partir de 90 euros), ou bien choisir un pack par pays (de 8 à 23 euros selon le pays). Le lien : se procurer le pack de navigation de la Trans Dinarica.
L’itinéraire de la Trans Dinarica (Croatie)
Remarque : au cas où vous vous posiez la question, aucun lien de ce blog n’est sponsorisé. Je ne perçois donc aucune commission, que vous cliquiez ou non !
Le long de la Trans Dinarica
Je dois préciser que le Monténégro est le seul pays dans lequel je n’ai pas emprunté la Trans Dinarica. A cause d’une météo exécrable, j’ai en effet dû changer d’itinéraire en quittant la Bosnie-Herzégovine, ce qui m’a amené à traverser le Monténégro par sa côte sud, plutôt que par les montagnes du nord, comme initialement prévu. Mais cet itinéraire cycliste vaut tellement la peine de rouler dessus que je le cite quand même dans cet article, pour tous ceux qu’il pourrait attirer…
Du coup, en préparant votre périple à vélo, si vous vous interrogez sur la Trans Dinarica, n’hésitez pas à me poser vos questions dans la rubrique « commentaires » (votre @dresse mail ne sera pas publiée, contrairement à votre question qui le sera avec un léger décalage, généralement de quelques heures) : c’est avec plaisir que j’essaierai d’y répondre 🙂
Les itinéraires Eurovélo
Beaucoup plus connus que la Trans Dinarica encore confidentielle, les itinéraires Eurovélo ont fait leurs preuves depuis longtemps. Au nombre de dix-sept à ce jour, ils sillonnent l’Europe du Cap Nord à Malte, et de l’Irlande occidentale aux confins de l’Orient.
L’esprit est de constituer un réseau cohérent de grands itinéraires cyclables européens, en connectant les capitales et les grandes villes du continent. Le patrimoine naturel et culturel est mis en valeur tout en favorisant le tourisme durable.
Le réseau Eurovélo
Enfin, la sécurité des usagers est toujours prise en compte. Ainsi, les routes doivent être balisées et continues. Elles doivent également éviter les routes à fort trafic. Elles combinent donc pistes cyclables et routes secondaires, voire chemins balisés.
Le principal inconvénient, c’est que peu de ces routes Eurovélo sont totalement terminées.
Je suis attentivement l’évolution de certaines d’entre elles depuis cinq ans et pourtant, rien n’a bougé : elles en sont toujours au même stade (en général l’un des trois stades en rouge sur le tableau suivant) selon le site Eurovélo lui-même. Aucune évolution en cinq ans !
Percevoir les fonds européens, c’est bien, mais les utiliser pour procéder aux aménagements promis, ce serait mieux !
Les différents stades de développement des routes Eurovélo
J’enfonce un peu le clou : Eurovélo existe depuis 1995 mais trente ans plus tard (au 27 octobre 2025), une seule route est entièrement terminée ! Il s’agit de l’Eurovélo 19 : la route cyclable de la Meuse (1.050 km). Et cinq autres sont (enfin) à un état d’avancement supérieur à 90% :
Une seule route terminée en vingt ans, et cinq autres qui ne sont plus très loin de l’être, sur dix-sept routes en tout (les n° 16 et 18 n’existant pas encore), ce n’est quand même pas énorme. Bien sûr, il ne faut pas non plus cracher dans la soupe : ces dix-sept routes ont au moins le mérite d’exister, et Eurovélo reste un superbe projet pour les voyageurs à vélo.
La cohabitation avec les automobilistes…
Si je ne me suis jamais senti réellement en danger sur les routes du Monténégro, c’était quand même la première fois que je voyais les voitures me doubler d’aussi près. La plupart des automobilistes, comme dans les pays précédents, faisaient très attention à moi et respectaient une bonne distance de sécurité en me doublant, mais pas tous. Il y en avait en effet quelques-uns qui passent assez près de moi et assez vite, ce qui ne m’était jamais arrivé dans les pays précédents (et qui ne m’arrivera plus non plus dans les pays suivants).
Il ne faut évidemment pas généraliser car globalement, en tant que cycliste, les routes monténégrines m’ont paru assez sûres, mais j’ai dû rester un peu plus vigilant que d’habitude.
La Bosnie-Herzégovine est la quatrième étape du voyage à vélo que j’ai effectué en 2025 entre la France et la Grèce après l’Italie, la Slovénie et la Croatie.
Les étapes suivantes sont le Monténégro, l’Albanie, la Grèce… et la Turquie !
Après une petite semaine de pluies diluviennes, qui ont commencé en Italie et m’ont harcelé à travers la Slovénie jusqu’en Croatie, j’ai eu la chance d’avoir un temps magnifique pendant un jour et demi sur l’île de Pag. Mais depuis que j’ai quitté ce petit coin de rêve, je suis à nouveau assailli par des trombes d’eau.
A la petite frontière bosnienne que j’atteins en plein cœur des montagnes, le jeune douanier m’informe que la météo prévoit encore deux jours de fortes pluies. Je ne le sais pas encore mais elles dureront finalement une semaine.
Mes premiers kilomètres en Bosnie-Herzégovine
C’est fou ce qu’une simple frontière peut changer les choses. En Croatie, je ne me suis pas senti spécialement dépaysé. Le pays a l’air développé grâce entre autres au tourisme, qui représente une manne financière importante.
Mais en Bosnie-Herzégovine, je n’ai pas du tout la même impression : je la trouve beaucoup moins développée que sa voisine croate. Ici, l’ambiance rurale est bien plus prégnante, et les villages me semblent restés figés plusieurs décennies en arrière. Les bolides de grandes marques allemandes tous plus onéreux les uns que les autres, si nombreux sur les routes croates, laissent la place en Bosnie-Herzégovine à des voitures beaucoup plus petites, beaucoup plus modestes et beaucoup moins rutilantes. En plus, il y a carrément de nombreuses épaves roulantes en circulation. Mais ce qui me marque le plus, c’est peut-être le nombre de maisons en ruine qui bordent les routes, vraisemblables vestiges de la guerre. Cette dernière a beau être terminée depuis trente ans, ces constructions délabrées font toujours partie du paysage.
Ici, ma nouvelle compagne depuis une semaine ne me lâche plus : cette pluie persistante redouble carrément d’intensité en Bosnie-Herzégovine. Elle transperce désormais avec une grande facilité tous mes vêtements techniques de cycliste itinérant. Pourtant censés être imperméables, ils s’avèrent être de véritables passoires : chaussures « protégées » par des guêtres, triple épaisseur de gants, surpantalon, double coupe-vent, ils laissent tous passer l’eau…
Du coup, le ciel sadique prend un malin plaisir à me cracher dessus de toutes les façons possibles : bruine fine et légère, fortes pluies à grosses gouttes, averses orageuses… Son imagination n’a pas de limites pour m’arroser et il me détrempe des pieds à la tête à longueur de journée. Et le puissant vent de face qui est désormais son allié achève la besogne en me congelant jusqu’aux os.
Une semaine de vélo sous une pluie battante dans les montagnes de Bosnie-Herzégovine
Ces conditions difficiles ne m’empêchent pas d’éprouver une certaine sympathie pour ce pays et ses habitants, car je ne cesse de penser à tous les massacres qui ont été perpétrés ici il y a trente ans. Les gens ont alors tellement souffert, parfois au-delà de l’imaginable, que je ne vais quand même pas me plaindre pour quelques gouttes de pluie.
Squatter une maison en ruine
Au soir de ma troisième journée dans le pays, je suis tellement mouillé que je décide de poser ma petite tente non pas en pleine nature, laquelle est pourtant propice au bivouac tellement elle est sauvage par ici, mais dans l’une de ces petites maisons en ruine qui bordent la route un peu partout.
En effet, depuis ma dernière nuit dans une auberge, cela fait deux jours que je trempouille dans mes guenilles imbibées. Dormir sous un toit, même abandonné, évitera à ma tente de prendre l’eau, et cela me permettra également de faire sécher mes vêtements pendant la nuit. Car si je devais remettre ces fringues détrempées demain matin à la sortie de mon duvet chaud et douillet, elles me réfrigèreraient aussitôt, et reprendre la route par zéro degré ainsi accoutré ne serait vraiment pas une partie de plaisir.
C’est ainsi qu’au milieu de nulle part, sur l’une de ces petites routes de montagnes où presque jamais personne ne passe, je finis par trouver mon bonheur. Il s’agit d’une petite maisonnette abandonnée, dont la façade est toute taguée.
Squatter une maison en ruine
A l’intérieur, il ne fait pas bien chaud avec ce vent fort qui circule, les portes et les fenêtres ayant disparu depuis longtemps. L’avantage de ce gruyère, c’est que l’air qui s’y balade devrait permettre à tous mes vêtements de sécher pendant la nuit. Toujours voir le verre à moitié plein. Pour l’occasion, j’utilise mon vélo polyvalent en mode étendoir.
A l’intérieur, tout est dévasté : le sol est jonché de briques et de tuiles en miettes, mais aussi de détritus de toutes sortes, notamment des cadavres de bouteilles cassées et de canettes, sans compter quelques excréments desséchés que je soupçonne être d’origine humaine. Je ne perds pas trop de temps à réfléchir à cette question et, après avoir fait un ménage minimaliste à l’aide d’un morceau de tuile cassée, je monte ma tente dans le recoin qui est à la fois le moins sale et le plus abrité possible du vent, lequel traverse continuellement ma nouvelle maison, entre l’ouverture de la porte et celle d’une fenêtre.
Après avoir enfilé des vêtements secs et dévoré un plat de pâtes chaudes, je me surprends à constater que lorsqu’on vit dans un certain dénuement, un petit rien peut se transformer en véritable luxe : cette maisonnette en ruine qui, après avoir longtemps servi de squat est devenue un véritable repoussoir, je la vois plutôt, moi, comme un petit palace qui va me permettre de passer enfin une nuit bien au sec. Quand on est trempé et frigorifié huit heures par jour, un petit taudis qui abrite devient vite un luxe appréciable.
Dans ces montagnes reculées, il n’y a aucun réseau et je n’arrive donc pas à joindre ma petite femme, qui commence à me manquer sérieusement, pour lui donner ma position et lui dire que tout va bien. Nous avons discuté de cette éventualité avant mon départ : je lui avais bien dit que si un jour elle n’avait pas de nouvelles de moi, elle ne devrait pas s’inquiéter. Car s’il devait y avoir un problème grave, elle en serait forcément informée par quelqu’un, que ce soit les autorités ou quiconque d’autre. A cet effet, je porte toujours sur moi ses coordonnées de façon très accessible.
Malgré tout, je sais pertinemment qu’elle va passer la nuit à s’inquiéter alors que pour moi finalement, tout va bien. Cela m’empêche de trouver le sommeil malgré la fatigue due au pédalage de la journée si bien qu’au milieu de la nuit, je décide de me lever pour aller marcher sur la route située non loin. Je m’y retrouve à déambuler dans le noir absolu, car l’épais plafond de nuages absorbe la moindre lueur provenant de la lune et des étoiles : aucune once de lumière céleste ne peut parvenir jusqu’à moi. Sous une bruine fine et mouillante, je marche sur cette route d’un noir d’encre à la recherche d’un peu de réseau que je ne trouverai jamais. Je pense très fort à elle et je sais qu’elle pense très fort à moi mais la modernité n’ayant pas poussé jusqu’ici, l’absence de réseau ne me permettra pas de lui donner des nouvelles rassurantes avant demain.
Quelques heures plus tard au petit jour, il me suffira de rouler trois ou quatre kilomètres pour accrocher brièvement un peu de réseau et la rassurer par messages.
Déluge dans les montagnes
Une poignée de kilomètres plus loin, mon GPS me fait quitter le bitume routier pour un petit chemin sauvage montant dans les cailloux. La journée est l’une des plus pluvieuses depuis le début du périple, le chemin est boueux et ses innombrables pierres particulièrement glissantes. Le GPS m’indique que je vais devoir affronter dix kilomètres de montées, et donc de galères vu la météo exécrable, avant de retrouver enfin une route asphaltée.
Ce chemin monte tellement et les pierres sont si glissantes que je dois régulièrement pousser mes cinquante-quatre kilos de vélo. Je n’ai jamais progressé aussi lentement. Il pleut toujours autant, le paysage est complètement bouché par la brume qui m’entoure, et je suis trempé et gelé. J’ai tellement mais tellement hâte d’en finir avec ces dix kilomètres pour retrouver enfin un peu de bitume.
Quand mon GPS m’indique enfin que je vais rejoindre la route, la réalité s’avère tout autre : il n’y a pas le moindre bitume autour de moi, juste ce tortionnaire de petit chemin qui continue encore et toujours à perte de vue derrière l’horizon. Il serpente à travers la montagne puis traverse des bouts de forêts et des plaques de neige. Il fait froid et un brouillard de plus en plus épais m’entoure. Il se lève bien un peu de temps en temps mais le plus souvent, je n’y vois pas grand-chose. Les conditions sont vraiment difficiles et pourtant, je n’ai pas de quoi me plaindre tant que je ne vois aucun ours amaigri après plusieurs mois d’hibernation surgir du bois pour me débouler dessus.
C’est le moment que choisit l’écran de mon téléphone pour faire des siennes. Ça m’est déjà arrivé une fois avec un téléphone précédant, au cours d’une rando humide (décidément) en montagne : l’écran avait subitement changé de couleurs en tirant sur un vert, un rose et un bleu un peu fades, avant de rendre définitivement l’âme à cause de l’humidité. Je réalise donc que si ça se reproduit ici, je n’aurai plus de GPS. Et même s’il n’y a un vague croisement que tous les deux ou trois kilomètres sur ce chemin désespérément isolé, sans GPS, je finirai forcément par me perdre.
Depuis que j’ai quitté la route, je n’ai aperçu, même au loin, aucune maison, aucune route, aucun poteau électrique, bref, aucun signe de vie humaine. Pas le moindre. Si mon téléphone-GPS me lâche, je n’aurai plus aucun moyen de sortir de ces montagnes. Il ne me restera plus qu’à me réfugier sous ma tente, qui finira forcément par prendre l’eau à un moment ou à un autre avec tout ce qui tombe. J’ai bien de quoi manger pour deux jours car j’ai toujours deux sachets lyophilisés en réserve ainsi que du riz, mais je ne vois vraiment pas comment je pourrai sortir d’ici sans GPS et sans personne alentour pour m’aider, sauf improbable coup de chance.
Je retire donc immédiatement mon téléphone de la petite sacoche soi-disant étanche dont la vitre plastifiée me permettait jusque-là de voir mon chemin sur l’écran, et je le mets dans l’une de mes quatre grandes sacoches étanches de porte-bagages. Il pleut tellement que pendant l’opération, l’eau a le temps de pénétrer dans la sacoche. Je décide de ne plus penser à l’hypothèse d’un décès de mon téléphone-GPS : pour l’instant, il fonctionne donc tout va bien. S’il rend l’âme, il sera toujours temps d’aviser…
Avant de l’enfermer à peu près au sec, je regarde bien le parcours qui m’attend dans les prochains kilomètres en essayant de mémoriser les croisements à venir, et la route qu’il faudra prendre alors, puisque je n’aurai plus l’écran sous les yeux.
Conditions de vélo hivernales
Le temps ne passe pas vite et les kilomètres défilent lentement. De temps en temps, afin de vérifier ma route, j’enlève mes trois paires de gants imbibées pour attraper mon téléphone du bout de mes doigts trempés, ce qui n’arrange pas son problème d’humidité. Mais comme toutes mes affaires sont mouillées, je n’ai aucune possibilité de m’essuyer les mains. Je vérifie juste que je suis toujours sur le bon itinéraire et je range rapidement ce petit appareil qui est désormais mon meilleur ami, à l’intérieur de ma sacoche mi-sèche, mi-humide, et en croisant les doigts qui sont tout fripés.
Au moment où je repense à ces ours affamés que je n’ai toujours pas croisés, ce qui me rappelle au passage que la situation peut toujours être pire, trois ou quatre chiens me fondent dessus en aboyant. Leurs copains arrivent peu à peu et ils finissent par être sept. En approchant, tous aboient à m’en péter les tympans, pourtant, aucun n’entre dans ma bulle d’un bon mètre de diamètre. J’essaie de les amadouer mais rien n’y fait. Ils n’ont pas l’air bien méchant mais leurs aboiements persistants et très sonores sont insupportables. Il y en a surtout un qui de toute évidence ne m’aime pas du tout car il aboie en boucle, et c’est celui qui s’approche le plus souvent de mes mollets dodus. Il me suivra pendant plus d’une demi-heure sans jamais arrêter d’aboyer. Impressionnant.
Pour la première fois du périple qui sera aussi la dernière, je m’affale par terre. Trop occupé à surveiller ces canidés déchaînés vociférer derrière moi, je n’ai pas vu une grosse pierre contre laquelle bute ma roue avant, et je m’effondre comme un gros étron au milieu de tous ces cailloux. Sans gravité mais décidément, sale journée.
Au final, je mettrai cinq heures et demie pour faire dix-neuf misérables kilomètres avec mon vélo et rejoindre enfin une petite route bitumée, certes défoncée mais tellement salvatrice. A titre de comparaison, un marcheur moyen parcourt entre vingt-cinq et trente kilomètres dans le même laps de temps ! J’ai beau être un adepte des sports de grande endurance et donc habitué à ce type d’efforts longs et difficiles, je n’ai pas le souvenir d’avoir vécu une journée d’activité sportive aussi exigeante physiquement et dure moralement de toute ma vie.
A la fin de ce chemin démoniaque, il ne me reste plus qu’une vingtaine de kilomètres jusqu’à Mostar, avec essentiellement des descentes en perspective. Toutefois, par sécurité, je ne les dévale pas à fond car tout est mouillé, aussi bien le bitume que mes freins. Je n’attends donc pas le dernier moment pour freiner, et je commence à les actionner bien avant chaque virage, histoire de ne pas terminer cette magnifique journée au fond d’un ravin alors que le plus dur est enfin passé.
La route est inondée dans le premier petit village que je traverse, où quelques voitures garées trempent dans l’eau jusqu’au milieu des roues. Quand mon vélo se hasarde à rouler dans ces immenses flaques, mes pieds se retrouvent totalement immergés jusqu’aux chevilles à chaque coup de pédale, mais qu’importe finalement puisqu’ils sont déjà tout fripés depuis des heures.
Mostar
Lorsque j’arrive enfin au paradis, Mostar, je décide de prendre une chambre dans une petite auberge familiale aux prix modiques, carrément pour trois nuits. La météo ne prévoit en effet aucune amélioration au cours des prochains jours, excepté une brève éclaircie pendant quelques heures le lendemain. Inutile de remonter sur mon vélo au petit matin pour revivre des galères comme celles d’aujourd’hui. Trois nuits dans un lit confortable avec une couette propre, ainsi que deux jours de repos ne me feront pas de mal. Je repartirai le troisième jour tout frais et reposé, avec un moral en béton…
La propriétaire de l’auberge, Inga, se montre extrêmement accueillante si bien qu’en trois jours, nous avons le temps de sympathiser.
En me mettant au lit pour ma première nuit à Mostar, je savoure la douceur des draps propres qui glissent contre ma peau, si adoucie par ma première douche depuis trois jours. Et quand je repense à la nuit précédente que j’ai dû passer au milieu d’immondices dans un nid à rats, je considère que la petite auberge chaleureuse d’Inga vaut largement un hôtel douze étoiles.
Le lendemain de mon arrivée, elle me demande non pas si ça va bien mais si ça va mieux. Sa question me surprend un peu car je ne lui ai jamais dit que ça n’allait pas. Elle m’avoue alors qu’elle a eu très peur en me voyant arriver dégoulinant la veille, tellement j’avais l’air dévasté par la fatigue. Et elle insiste bien sur l’apparence épuisée que j’avais alors : les joues creuses et le tour des yeux noir, paraît-il ! Je suis sidéré d’entendre ça car de mon point de vue, j’étais tellement heureux d’arriver dans son auberge chauffée et conviviale, après la journée si difficile que je venais de vivre, que je ne pensais vraiment pas dégager une image de moi aussi pitoyable. Elle ajoute qu’en rentrant chez elle, elle a même fait part à son mari de son inquiétude sur mon état de santé ! Et moi qui pensais être souriant, cool et détendu…
Qu’est-ce que ça fait du bien de flâner dans les rues sans avoir rien à faire ! Rien, c’est vite dit : avant de partir à la découverte de cette ville-martyre, je dois quand même m’acquitter de mes tâches habituelles à chacune de mes escales en ville : faire une lessive manuelle de mes vêtements sales et boueux, recharger les batteries de tous mes appareils (téléphone, appareil photo, caméras, batterie externe…), faire sécher ma tente au milieu de ma petite chambre etc. Mais ensuite, déambuler tranquillement dans les ruelles de Mostar s’avère vraiment régénérant. Je profite des seules minutes de la semaine où un peu de soleil se fraiera un petit passage entre les nuages dans le ciel de l’Herzégovine, pour faire quelques images de la ville, avant le retour au galop de la pluie et de la pénombre.
Certains bâtiments de Mostar comportent toujours des trous d’obus au milieu de façades criblées de balles. La guerre qui a fait rage il y a plus d’un quart de siècle, dans cette ville aux profondes divisions ethniques, a laissé des cicatrices qui sont toujours visibles un peu partout aujourd’hui.
Mostar : trou d’obus et impacts de balles, trente ans après…
L’ambiance de la ville est assez difficile à décrire. D’une part, je la trouve lourde, avec ses habitants qui ne discutent guère entre eux et ne semblent même pas savoir rire. Ils se croisent et se côtoient mais ils ne dégagent aucune chaleur entre eux. D’autre part, je trouve à Mostar un côté hypnotique et fascinant qui m’attire irrésistiblement : je ne sais pas trop pourquoi mais j’aime cette ville. Je ne suis qu’un voyageur de passage donc bien sûr, ce ressenti très personnel ne vaut que pour moi. La réalité, c’est que de l’avis de tous, habitants comme experts, il suffirait aujourd’hui d’une petite étincelle pour que la situation explose à nouveau entre bosniaques musulmans, croates catholiques et serbes orthodoxes, qui se partagent la ville. Certains observateurs se demandent même, non pas si de nouveaux affrontements vont survenir, mais quand…
Amin, artisan graveur
L’immense croix érigée en 2000 par les catholiques sur les hauteurs de la cité, vécue comme une véritable provocation par les non catholiques en général et les musulmans en particulier, n’a fait qu’ajouter de l’huile sur ce feu qui ne s’est jamais vraiment éteint malgré trente ans de paix. Souvent considérée comme un symbole de domination religieuse, cette grande croix est également perçue par beaucoup comme un obstacle à la réconciliation entre les différentes communautés.
Objectivement, je dois dire que lorsqu’on lève la tête vers les montagnes depuis Mostar, on ne peut vraiment pas rater cet énorme symbole religieux…
La veille de mon départ, Inga frappe à la porte de ma chambre. Toujours aussi souriante, elle m’offre une part du gâteau qu’elle vient de réaliser. Elle est passionnée de pâtisserie et ce gâteau aux fruits rouges est aussi élaboré qu’un vrai gâteau de pâtissier. Elle l’a fait à l’occasion de l’anniversaire de son mari. Pauvre homme : alors qu’il ne me connaît même pas, le voilà obligé de partager ce succulent dessert avec moi !
Inga m’offre son gâteau
L’un des objectifs de mon périple, c’était de faire des rencontres. Ayant lu beaucoup de témoignages de voyageurs à vélo selon lesquels ils étaient parfois l’objet d’une grande attention et d’une grande générosité de la part des habitants des Balkans, j’espérais avant mon départ que je connaîtrais le même sort. Et je me disais que si c’était le cas, il faudrait que je puisse remercier ces habitants pour leur accueil, mais je ne savais pas comment faire : impossible d’emporter sur mon vélo des bouquets de fleurs où des bouteilles de vin à offrir.
J’avais alors pensé à un symbole de la France mondialement connu : la tour Eiffel. J’ai donc acheté sur Internet quelques dizaines de petites tour Eiffel bleues en porte-clés.
Pourquoi bleues ? Je n’en sais rien, toujours est-il qu’elles ne sont pas lourdes et ne prennent aucune place sur mon vélo. En d’autres termes, le petit cadeau idéal.
Inutile de dire que lorsqu’Inga m’offre une part de cette pâtisserie haut-de-gamme qui me change radicalement de mes pâtes quotidiennes au réchaud, je m’empresse de lui donner en retour, ainsi que pour l’ensemble de son accueil, l’une de ces petites tours Eiffel bleues. Elle a alors la même réaction que tous les gens à qui j’en offre une : elle marque d’abord un bref étonnement avant d’éclater de rire avec moi, puis de me remercier chaleureusement.
Ce n’est pas grand-chose bien sûr mais c’est une petite marque de reconnaissance sincère qui me tient à cœur, et que je destine à tous les gens que je rencontre au cours de ce périple et qui me donnent un coup de main quelconque. Et c’est vrai que ce modeste souvenir, qui fait systématiquement son petit effet, nous permet toujours de passer un bon dernier moment ensemble juste avant de nous quitter.
L’emblème de Mostar : son fameux pont
Après deux jours entiers de remise à neuf, je reprend gaiement la route. Il pleut toujours abondamment et sur ces routes bosniennes inondées, les nombreuses voitures qui me doublent dans les flaques à la sortie de Mostar m’arrosent à tour de rôle. Les conditions sont pourtant moins difficiles qu’il y a trois jours même si, avec ces paysages aquatiques, j’ai quand même une impression de déjà-vu.
La nécropole de Radimlja, patrimoine de l’humanité
Dans les Balkans, quelques milliers de stecci sont éparpillés dans la nature. Les stecci, ce sont des pierres tombales médiévales monumentales. On en trouve un peu partout : dans les forêts, dans les champs, le long des rivières… Avec 60.000 spécimens, c’est la Bosnie-Herzégovine qui en compte le plus.
Pour la première fois depuis je ne sais plus combien de jours, la pluie baisse soudain d’intensité au moment précis où je passe à hauteur de la nécropole de Radimlja, classée par l’Unesco au patrimoine de l’humanité. J’en profite pour y faire une brève halte et me balader dans ce cimetière impressionnant tout droit sorti du Moyen-Âge.
Stecci de la nécropole de Radimlja
Le chevalier défunt représenté avec son arc
Trahi par le GPS
Komoot est un excellent GPS vélo. La plupart du temps, il m’emmène soit sur des petites routes très peu fréquentées, soit carrément sur des petits chemins déserts à travers la nature. Ces endroits sont parfois si isolés que j’ai alors l’impression d’être arrivé au bout du monde. C’est tout ce que j’aime. Mais parfois aussi, je dirais peut-être une fois par semaine, Komoot est subitement et inexplicablement atteint de folie. Et dans ces moments-là, il peut m’emmener absolument n’importe où.
Ce jour-là donc, après avoir roulé trois bonnes heures après Mostar sur ces routes et chemins perdus à travers les bois, je finis par me retrouver en pleine campagne. Les nuages sont toujours aussi noirs et le ciel ne cesse de pleurer des torrents. Mon itinéraire se poursuit sur un petit chemin inondé qui rétrécit de plus en plus. Il traverse des champs si verts qu’à l’évidence, ils ne connaissent pas l’existence du mot sécheresse.
Komoot m’enverra au milieu de ces champs sur un chemin inexistant
A un moment, Komoot m’indique qu’il faut tourner à gauche mais il n’y a en réalité aucun croisement. Pourtant, le GPS est précis au mètre près. Je décide donc de tourner quand même à gauche comme il l’indique et de rouler dans l’herbe du vaste champ qui se trouve là, tout en suivant exactement le tracé de l’itinéraire GPS sur mon écran. Car au fond de moi, je pense que le chemin finira sans doute par réapparaître un peu plus loin. Mais au bout de quelques centaines de mètres, toujours rien, sauf un fossé bordé par un talus qui me barrent tous les deux la route. N’ayant pas le choix, je fais demi-tour.
La pluie n’arrête toujours pas de tomber, mon GPS m’a planté, je suis complètement perdu et le coin est désert, sans personne pour m’aider.
Je reviens donc sur mes pas jusqu’à ce que je retrouve un chemin carrossable. Là, mon cerveau ramolli ne me propose pas de meilleure idée que d’attendre sous la pluie, ce que je fais donc comme un misérable. Au bout d’une dizaine de minutes et comme souvent depuis le début du voyage, la chance choisit son camp. Mais pour une fois, c’est le mien !
Un homme arrive en effet dans ma direction, abrité sous un parapluie rosâtre qui égaye un peu la grisaille ambiante. Il est accompagné d’un chien qui semble tout content de me voir alors que nous ne nous connaissons pourtant pas.
Rencontre providentielle sous la pluie
Après avoir gratifié ce monsieur du traditionnel dobar dan (bonjour), je lui demande la direction de ma prochaine étape, la ville de Trebinje. Avec une grosse voix et dans sa langue à couper au couteau, il se lance dans un monologue auquel je ne comprends pas un traitre mot.
Pourtant, il a une vraie envie de m’aider et grâce aux gestes qu’il fait pour accompagner ses explications, je finis par comprendre que je dois aller tout droit jusqu’à un bled inconnu nommé Mosko ; puis tourner à droite et continuer droit devant jusqu’à Trebinje.
Faute de GPS, je suivrai ses indications et en fin de journée, j’aurai la double surprise, d’une part d’arriver à Trebinje sans encombre et d’autre part, de rouler les derniers kilomètres sous… quelques rayons de soleil !
Moralité : il vaut toujours mieux écouter les conseils incompréhensibles d’un inconnu bosniaque, que faire confiance au plus moderne des GPS.
Trebinje sous un rayon de soleil
L’église du Saint-Archange Michel, à Trebinje
Le lendemain, le soleil décide d’honorer ma dernière matinée dans le pays en me gratifiant de sa présence. Alors bien sûr, il ne restera qu’une petite heure et demie avant de repartir au galop se cacher derrière les nuages, une pluie vengeresse lui succédant immédiatement, mais ce bref moment de lumière me permet enfin de voir un peu à quoi ressemble la Bosnie-Herzégovine !
Mais maintenant, direction le Monténégro…
Info pratique – La Trans Dinarica : l’itinéraire de rêve pour les cyclistes
La Trans Dinarica est un itinéraire cycliste qui relie les pays des Balkans occidentaux en traversant une superbe chaîne de montagnes, les Alpes Dinariques. Ce parcours a été conçu pour permettre aux cyclo-voyageurs qui s’aventurent par là de découvrir tout le patrimoine local : naturel, culturel, gastronomique…
La Trans Dinarica en Croatie
Cet itinéraire passe par des villages, des forêts, des montagnes, ou encore par la mer. Il alterne entre routes bitumées très peu fréquentées et chemins de terre en pleine nature. Il traverse des parcs nationaux et des sites classés au patrimoine de l’humanité par l’Unesco.
Bivouac sur le parcours de la Trans Dinarica
Tout au long du parcours, on découvre l’hospitalité des habitants des Balkans ainsi que les paysages à couper le souffle de cette superbe région méconnue, en plein cœur de l’Europe. Bref, quand on roule sur la Trans Dinarica, on en prend plein les yeux et on se sent une âme d’aventurier !
Sur la Trans Dinarica, sous la pluie (Bosnie-Herzégovine)
La pépite : le site Trans Dinarica
La carte suivante montre sommairement le parcours de la Trans Dinarica (copie d’écran extraite du site Trans Dinarica).
En cliquant pays par pays, ce site propose également de nombreux itinéraires alternatifs : rejoindre le parcours depuis les grandes villes, faire des détours pour aller visiter des sites intéressants à proximité, etc.
A titre d’exemple, c’est l’un de ces détours que j’ai utilisé pour traverser l’île de Pag, qui s’est avérée l’un des plus beaux endroits visités lors de ma « Trans Europa » !
La distance totale de la Trans Dinarica approche les 6.000 kilomètres, et son dénivelé positif les… 100.000 mètres !
Les pays traversés sont la Slovénie, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, l’Albanie, la Macédoine du Nord, le Kosovo et la Serbie.
La Trans Dinarica passe par la rivière Drin (Albanie)
Pour se procurer le parcours précis ainsi que sa trace GPS, ce que j’ai fait, il suffit donc de se connecter au site officiel : Trans Dinarica.
Bien sûr, ce n’est pas gratuit mais ce n’est pas très cher non plus et surtout, cela vaut tellement le coup : si, comme moi, vous êtes un.e cycliste amoureux.se de la nature, alors le rapport qualité-prix de ces packs est carrément exceptionnel. On traverse des endroits tellement natures, isolés et sauvages sans jamais se perdre que ça vaut largement la peine, selon moi, de s’offrir ces packs.
A l’inverse, l’itinéraire de la Trans Dinarica traverse peu de villes. Aussi, si vous êtes attiré.e par les grandes métropoles, ces packs ne vous conviendront peut-être pas : privilégiez alors plutôt les itinéraires Eurovélo (lire plus bas), qui seront beaucoup plus adaptés à vos goûts citadins (capitales, monuments, musées, hébergements etc).
Pour résumer, la Trans Dinarica a plutôt tendance à fuir les zones touristiques et notamment la côte Adriatique, avec ses stations balnéaires souvent prises d’assaut, pour s’enfoncer dans les montagnes beaucoup moins fréquentées. Contrairement à Eurovélo, qui ne dévie à peu près jamais des itinéraires touristiques.
On peut se procurer le pack de la Trans Dinarica pour les huit pays à un tarif à mon avis avantageux (à partir de 90 euros), ou bien choisir un pack par pays (de 8 à 23 euros selon le pays). Le lien : se procurer le pack de navigation de la Trans Dinarica.
L’itinéraire de la Trans Dinarica (Croatie)
Remarque : au cas où vous vous posiez la question, aucun lien de ce blog n’est sponsorisé. Je ne perçois donc aucune commission, que vous cliquiez ou non !
Le long de la Trans Dinarica
En préparant votre périple à vélo, si vous vous interrogez sur la Trans Dinarica, n’hésitez pas à me poser vos questions dans la rubrique « commentaires » (votre @dresse mail ne sera pas publiée, contrairement à votre question qui le sera avec un léger décalage, généralement de quelques heures) : c’est avec plaisir que j’essaierai d’y répondre 🙂
Les itinéraires Eurovélo
Beaucoup plus connus que la Trans Dinarica encore confidentielle, les itinéraires Eurovélo ont fait leurs preuves depuis longtemps. Au nombre de dix-sept à ce jour, ils sillonnent l’Europe du Cap Nord à Malte, et de l’Irlande occidentale aux confins de l’Orient.
L’esprit est de constituer un réseau cohérent de grands itinéraires cyclables européens, en connectant les capitales et les grandes villes du continent. Le patrimoine naturel et culturel est mis en valeur tout en favorisant le tourisme durable.
Le réseau Eurovélo
Enfin, la sécurité des usagers est toujours prise en compte. Ainsi, les routes doivent être balisées et continues. Elles doivent également éviter les routes à fort trafic. Elles combinent donc pistes cyclables et routes secondaires, voire chemins balisés.
Le principal inconvénient, c’est que peu de ces routes Eurovélo sont totalement terminées.
Je suis attentivement l’évolution de certaines d’entre elles depuis cinq ans et pourtant, rien n’a bougé : elles en sont toujours au même stade (en général l’un des trois stades en rouge sur le tableau suivant) selon le site Eurovélo lui-même. Aucune évolution en cinq ans !
Percevoir les fonds européens, c’est bien, mais les utiliser pour procéder aux aménagements promis, ce serait mieux !
Les différents stades de développement des routes Eurovélo
J’enfonce un peu le clou : Eurovélo existe depuis 1995 mais trente ans plus tard (au 27 octobre 2025), une seule route est entièrement terminée ! Il s’agit de l’Eurovélo 19 : la route cyclable de la Meuse (1.050 km). Et cinq autres sont (enfin) à un état d’avancement supérieur à 90% :
Une seule route terminée en vingt ans, et cinq autres qui ne sont plus très loin de l’être, sur dix-sept routes en tout (les n° 16 et 18 n’existant pas encore), ce n’est quand même pas énorme. Bien sûr, il ne faut pas non plus cracher dans la soupe : ces dix-sept routes ont au moins le mérite d’exister, et Eurovélo reste un superbe projet pour les voyageurs à vélo.
Après avoir quitté le pays des ours, la Slovénie, je passe en Croatie.
Les frontières étant une invention purement humaine, elles ne s’appliquent pas aux ours. Dans les forêts montagnardes que je traverse, je continue comme en Slovénie à guetter ces grosses boules de poils griffues et dentues pendant plusieurs heures. Mais tuons le suspense tout de suite : je n’apercevrai pas le moindre nounours de tout mon périple…
La forêt croate
Pendant que je roule, mon vélo décide de faire des siennes. De petits sauts de chaînes de plus en plus fréquents accompagnent mon pédalage dans chaque montée, ne me donnant pas le choix : la chaîne en question est plus usée que prévu et il va falloir que je la fasse changer.
Je décide donc de modifier mon itinéraire. Je vais quitter les jolies montagnes croates pour faire une escale dans ce que je fuis depuis le début du périple : la ville ! La plus proche est Rijeka, sur la côte croate.
Rijeka sous un ciel d’encre
Une fois sur place, je laisse mon vélo à un réparateur et j’en profite pour aller acheter un billet de bateau vers ma prochaine étape : l’île de Pag.
Le réparateur m’a dit que Rijeka était la ville la plus pluvieuse de Croatie. Je ne sais pas si c’est vrai mais en tout cas, depuis trois jours maintenant, le ciel se vide de manière impressionnante. Ici encore plus qu’à Trieste, les rues sont inondées. Les voitures projettent d’énormes gerbes d’eau sur les trottoirs, où les quelques piétons qui ont osé braver les éléments s’abritent comme ils peuvent. Sous un abribus, un avant-toit… Moi, j’opte plutôt pour aller prendre un cappuccino bien au sec et au chaud en attendant que ça se calme. Le billet de bateau peut bien attendre un peu.
Une heure plus tard, le déluge ne semblant pas près de s’arrêter, je file au port pour acheter mon billet de bateau mais là, c’est la douche froide. Car on m’informe que le ferry pour l’île de Pag ne prend pas les vélos. Il prend bien les motos, les voitures, les camions, à peu près tout ce qui roule et même les piétons, mais allez savoir pourquoi, pas les vélos. Derrière son guichet, l’employée de la compagnie maritime arbore une tête de bouledogue qui me dissuade de poursuivre la discussion. Tant pis, je ferai deux cents bornes supplémentaires à vélo, en direction du sud jusqu’à Prizna. Il s’agit d’un port minuscule où les ferries qui font la brève traversée jusqu’à l’île de Pag acceptent bien, eux, les vélos.
Le village de Bakar
Deux jours de pédalage plus tard, mon vélo réparé et moi arrivons sur les hauteurs de Prizna juste avant que le soleil ne se couche. En réalité, il ne s’est jamais vraiment levé puisqu’il a passé toute la journée bien caché derrière une grosse épaisseur de nuages pluvieux, qui ne se sont jamais levés eux non plus. Depuis Trieste, la dernière ville italienne que j’ai traversée, le ciel vomit des trombes d’eau quasiment sans arrêt. Cette météo exécrable est de nature à démoraliser le plus optimiste des cyclo-voyageurs. Mais je rêve de ce périple depuis cinq ans, alors ce ne sont pas les quelques tonnes d’eau s’abattant lâchement sur ma tête qui vont me démotiver. Malgré le déluge, je suis toujours heureux de vivre ce périple. Un jour, il fera beau à nouveau.
Une petite route croate
La meute de chacals
Le soir venu, je profite d’une rare accalmie pour poser ma tente. Une heure plus tard, je dors déjà d’un sommeil profond, celui qui emmène loin les cyclistes harassés par huit heures de vélo. Mais j’en suis extirpé par ce qui ressemble à des sirènes de Police. Elles sonnent un peu bizarrement par rapport à leurs homologues françaises mais peu importe. Le son s’amplifie au fur et à mesure qu’elles approchent. Jusqu’à ce que mon esprit encore embrumé réalise que j’ai posé ma tente tellement à l’écart de la route qu’aucune voiture ne peut arriver jusqu’ici ! Je l’ai montée dans un petit champ jonché de gros cailloux, perdu en pleine nature et cerné par d’anciens murets de pierres. Ils ont été construits il y a longtemps par les paysans du coin, pour abriter leurs cultures du vent provenant de la mer voisine.
C’est là que je comprends enfin ce qui se passe : ce ne sont pas des sirènes de Police, ce sont les hurlements d’une meute de chacals dorés ! Ils sont si près de la tente que leurs cris me font mal aux oreilles. Vraiment. Mais ils partent aussi vite qu’ils sont arrivés. Le temps que j’attrape mon téléphone pour enregistrer leurs complaintes plutôt mélodieuses, ils se sont déjà pas mal éloignés. Ont-ils été attirés par l’odeur de chacal qui m’accompagne après deux jours sans douche ? Pas impossible.
Si j’ai fini par identifier ces animaux sans les voir c’est grâce à toutes les infos que j’avais prises sur Internet en préparant ce voyage. Je m’étais en effet renseigné sur les animaux potentiellement dangereux que je risquais de rencontrer au cours de mon périple : ours, loups, serpents, scorpions et araignées. J’étais alors tombé sur des articles évoquant les chacals. Je ne m’étais pas attardé dessus à partir du moment où j’avais lu qu’ils ne présentaient aucun danger pour les humains. J’avais juste écouté leurs cris sur internet pour pouvoir les identifier au cas où j’en entendrais pendant mon voyage. Et dire que cette nuit, je viens de les confondre avec des sirènes de Police !
Je n’en prendrai conscience que plus tard mais cette brève rencontre avec les chacals va constituer un tournant dans mon périple : il y avait un avant, il y aura un après.
Car c’est la première fois depuis mon départ que je me sens à ce point en harmonie avec la nature qui m’entoure. Déjà, ce spot de bivouac se trouve très isolé, beaucoup plus que d’habitude : il est situé loin de la route et il n’y a aucun village alentour. Cela m’a permis de passer la nuit loin de toute zone civilisée. Et pendant que ces chacals vagabondaient à gorge déployée autour de ma tente, je me suis régalé à les écouter chanter.
Depuis deux semaines maintenant que je suis parti, j’ai passé le plus clair de mon temps dans la nature, de jour comme de nuit. Mais ce soir, cette meute de canidés a fini de balayer les derniers repères de confort que j’avais conservés de ma vie citadine.
A partir de maintenant, j’ai un peu l’impression de faire partie intégrante de la nature : c’est toute la magie de ce voyage qui est en train de me tomber dessus.
L’île de Pag
Le lendemain matin, je rejoins Prizna, sous un soleil matinal qui ne va pas tarder à s’enfuir.
Là, je prends le billet d’un bateau qui, contrairement à ceux qui appareillent depuis Rijeka, ne fait aucune discrimination à l’encontre des vélos. Après une courte traversée de trente minutes, je me retrouve enfin sur l’île de Pag.
Mes premiers kilomètres sur l’île de Pag
Longue d’une soixantaine de kilomètres, elle est relativement grande. C’est une île sauvage, aride et battue par les vents, c’est d’ailleurs à cause de ça que pas grand-chose n’y pousse. Quant à sa population, elle est essentiellement composée de… moutons ! On en croise un peu partout et ça lui donne un certain charme. Ma découverte de l’île, très fréquentée l’été mais vide de touristes l’hiver, va constituer pour moi un véritable coup de cœur. Le premier du voyage, mais pas le dernier…
Le soir venu, je descend dans une petite pension afin de pouvoir prendre une bonne douche et tant pis si après ça, mon effluve naturelle n’attire plus aucun chacal.
La propriétaire septuagénaire des lieux, Sofia, m’accueille chaleureusement. Installée ici depuis quarante-cinq ans, elle est bosniaque. Elle est polyglotte mais nous ne pouvons pas communiquer pour autant : elle ne parle que des langues et dialectes croates, bosniaques et serbes. Moi pas.
Avec Sofia
Dotée d’un sens aigu de l’hospitalité, elle passe un bon moment dans sa cuisine pour me préparer un café turc dans les règles de l’art. Nous le dégustons ensemble malgré des freins linguistiques à la compréhension mutuelle. Mais nous prenons tout notre temps et nous passons une petite heure à échanger comme nous pouvons. Les silences qui s’immiscent parfois dans la discussion sont bienveillants. Le moment est tellement paisible. Peu productif en termes de compréhension mutuelle mais tellement paisible. J’arrive quand même à comprendre quelques bribes de ses propos, notamment qu’elle a beaucoup souffert de la guerre dans son pays, dans les années 90.
L’arrivée de sa fille anglophone fait subitement progresser nos échanges. Elle m’explique notamment pourquoi sa mère est encore si marquée par ce conflit, pourtant terminé depuis un quart de siècle : deux de ses frères y ont perdu la vie. Le premier a sauté sur une mine à l’âge de vingt-quatre ans, le corps du deuxième n’a jamais été retrouvé.
L’histoire est dramatique et me touche profondément. Pourtant, j’aime ce genre de rencontres où nous échangeons nos tranches de vies, si amicalement alors que nous ne nous connaissons même pas.
Pag à l’aube
Le lendemain matin, je mets le cap sur le sud de l’île. Il y a là un pont qui la relie au continent et qui m’évitera de prendre à nouveau un bateau. Normalement, je serai de l’autre côté ce soir.
Pour la première fois depuis cinq ou six jours, il ne tombe plus des cordes. Le temps est même passé d’un extrême à l’autre puisqu’il fait désormais un soleil éclatant et que le bleu du ciel n’est souillé d’aucun nuage. Du coup, les jolis paysages de l’île retrouvent toutes leurs couleurs, qui explosent.
Au fond, la Croatie continentale vue depuis Pag
Mon GPS vélo me fait traverser Pag en quittant le bitume de la route principale pour emprunter de petits chemins entièrement déserts, à travers une jolie nature sauvage et battue par les vents.
Au fond, la Croatie continentale vue depuis Pag
Ces chemins de terre, de pierres et de boue ne sont absolument pas roulants et mes mollets en bavent un peu, mais les vues plongeantes sur la mer et les montagnes en valent la peine.
Pendant une bonne partie de la journée, je ne croise pas un chat. Par contre, beaucoup de moutons. Il y en a partout. Quand je ne les vois pas brouter, je les entends bêler.
Dans l’après-midi, je croise enfin une présence humaine.
C’est celle de Luka, un jeune pèlerin croate sympa, qui se rend à pied dans l’ouest de l’Herzégovine, à Medjugorje. Ce petit village constitue un lieu de pèlerinage important pour les catholiques, à tel point que ses deux mille habitants accueillent chaque année plus de deux millions de pèlerins.
Avec Luka et son bâton de pèlerin
Nous échangeons sur les conditions difficiles de voyage et de bivouac que nous rencontrons tous les deux depuis quelques jours, à cause de ce temps à ne pas mettre un voyageur dehors. Et quand il m’explique que sa tente, visiblement moins étanche que la mienne, s’est retrouvée inondée en pleine nuit, nous nous marrons comme des bossus. Moi qui dors au sec, de quoi me plains-je ?
Champs inondés par la pluie des derniers jours
La journée passe et les paysages enchanteurs défilent, dans une ambiance à la fois champêtre et marine. Je m’arrête si souvent pour prendre des photos, filmer et tout simplement profiter de la vie, que je n’avance pas beaucoup.
Mon itinéraire et son dénivelé
Autoportrait !
Je pensais quitter cette île dans l’après-midi en rejoignant le continent par le pont sud mais à cause de ces si nombreux arrêts photos, je ne progresse pas assez vite pour y arriver avant la nuit. Je décide donc de profiter un peu plus que prévu de Pag, en bivouaquant ici plutôt que sur le continent.
Bien calé entre une petite route peu fréquentée et la mer calme, un vaste terrain boisé me tend les bras pour planter ma tente.
Encore un spot de bivouac très nature
Il est assez isolé et semble en friche, avec son herbe haute, humide et jaunie, et débouche sur de jolies petites criques désertes.
Une petite crique face à la tente
La Croatie étant la maison de nombreux reptiles, dont plusieurs variétés de vipères, je suis conscient que ces herbes hautes peuvent cacher des serpents venimeux. Je descends donc de mon vélo et le pousse en tapant des pieds pour faire fuir ceux qui flemmarderaient éventuellement par ici. En effet, n’ayant pas d’oreilles, les serpents sont sourds et n’entendent donc pas les humains approcher. Quand ils détectent enfin leur présence, c’est souvent trop tard et ils sont tellement surpris qu’ils se croient attaqués, donc ils mordent pour se défendre. C’est pourquoi il faut taper des pieds : cela permet de provoquer dans le sol des vibrations auxquelles ils sont très sensibles, ce qui les fait fuir avant qu’on n’arrive sur eux.
Une fois le meilleur emplacement trouvé pour ma tente, à proximité de quelques conifères, j’aplatis toutes les herbes de la zone pour me rassurer : si un serpent déboule, je l’apercevrai plus facilement.
Bivouac sur l’île de Pag
Cette journée est la plus belle depuis le début du périple, et elle s’achève par le spectacle classique mais toujours efficace du soleil rougeoyant qui s’effondre dans la mer. Comme lui, je finis par me coucher. Demain, je quitterai Pag.
Coucher de soleil face à la tente
La Croatie profonde et sauvage
Ma vie nomade m’impose une triple quête quotidienne : trouver suffisamment d’eau pour tenir jusqu’au lendemain, trouver une poubelle où jeter mes ordures puis le soir, trouver un spot de bivouac pour dormir comme un bienheureux.
Ainsi, à peine de retour sur la Croatie continentale, je dois déjà remplir mes gourdes qui sont vides. Mon itinéraire m’a fait quitter la côte, où les villes et villages n’étaient pas rares, pour m’enfoncer dans les terres montagneuses de l’intérieur, beaucoup moins habitées. Là, pendant un bon moment, je ne traverse pas le moindre village.
L’un des rares signes de vie que je rencontre se présente sous la forme d’un motard. Il s’arrête à un croisement pour me laisser passer, alors qu’il aurait largement la place de me doubler puisqu’à part nous deux, cette petite route de montagne est entièrement déserte. Nous nous saluons brièvement de la main puis, une fois passé devant lui, je m’attends à l’entendre accélérer et le voir me doubler en trombe. Mais non. Il arrive au pas puis roule à ma hauteur, à vingt kilomètres à l’heure au lieu de cent cinquante. Nous discutons comme ça quelques minutes tout en roulant au milieu de la route. Il est allemand et va en Inde. Quand je lui dis que pour ma part, je vais en Grèce, il observe avec étonnement tout mon chargement, me fait un grand sourire et me dit « respect ». Nous faisons un check, toujours en roulant, puis il pousse une accélération qui me laisse sur place. A ce rythme-là, il arrivera sur la terre de Gandhi avant que je n’atteigne celle d’Aristote.
Cette discussion sympa n’a pas résolu mon problème d’eau. Je finis par arriver dans un minuscule hameau, constitué d’à peine quatre ou cinq vieilles maisons de pierre. Tout est calme, la petite route qui le traverse est déserte et à part un aboiement lointain de temps en temps, le silence règne.
Par chance, un habitant travaille dans son jardin.
Après lui avoir exprimé le tiers de mon vocabulaire croate, à savoir dobar dan qui veut dire bonjour, je lui demande sans la moindre illusion s’il parle anglais. Dans un hameau aussi reculé, c’est quasi-impossible.
Mais il me répond « english, french » : il se trouve qu’il parle couramment le français ! C’était improbable. Il s’appelle Danilo et il a vécu et travaillé cinq ans à Paris.
Avec Danilo
Quand je lui demande où je peux trouver de l’eau, il me propose immédiatement celle de son puits. Nous discutons pendant qu’il remplit mes gourdes, puis il me fait visiter son potager d’un côté, et son verger de l’autre : salades, choux, figuiers, pruniers, vignes, rien ne manque ici pour que son jardin prospère, à part la chaleur estivale.
Après avoir fait le tour du propriétaire, j’étale fièrement les deux tiers restants de mon vocabulaire croate, à savoir hvala puno qui signifie merci beaucoup, puis do vidjenia pour au revoir. Mon accent pas terrible lui arrache un sourire et nous nous quittons là-dessus.
Alourdis de trois kilos grâce à l’eau du puits de Danilo, mon vélo et moi reprenons la route. Tout en le propulsant à la vitesse d’un escargot dans ces montées qui n’en finissent pas, je réalise que depuis mon départ de France, j’ai déjà grimpé près de 10.000 mètres de dénivelé positif. C’est-à-dire sensiblement plus que l’altitude de la reine des montagnes, l’Everest.
Ciel croate menaçant
Une nuit, je me rends compte que contrairement à ce que je pensais jusque-là, les villes n’ont pas forcément le monopole des troubles du voisinage ni du tapage nocturne. Car bien qu’ayant monté ma tente en pleine nature, dans un petit bois de conifères délicatement odorants, je suis réveillé à plusieurs reprises par mes voisins. Il s’agit d’un troupeau d’ânes qui passent la nuit dans le champ d’à côté. De temps en temps, ils poussent de grands cris qui taillent en pièces le silence profond de la montagne. Dès que l’un d’entre eux beugle comme un âne, il se trouve toujours un de ses congénères pour lui répondre, quelque part au loin. A un moment, ces ânes exubérants finissent par réveiller un coq qui, complètement désorienté, se met à chanter au beau milieu de la nuit. Décidément, quand ce ne sont pas des chacals qui me réveillent, ce sont les ânes et les coqs ! Mais à vrai dire, je savoure ces moments rares d’immersion en pleine nature.
Demain matin, je leur rendrai visite pour leur dire ma façon de penser.
Une fois le jour levé et mes affaires rangées sur le vélo, je vais voir d’un peu plus près ce troupeau d’ânes bruyants. Dès qu’ils me voient, ils se figent tous en m’observant pour me jauger. Mais plus j’approche, plus ils se montrent curieux. Ne décelant aucun danger chez le voyageur pacifique que je suis, ils viennent jusqu’à moi pour se faire caresser le bout du museau, en se bousculant les uns les autres pour passer devant les copains. Ceux qui sont derrière hi-hanent haut et fort pour affirmer quand même un peu leur présence. Je finis par prendre congé de mes voisins herbivores afin de poursuivre ma route.
Par ici, la nature croate est belle et sauvage. Je traverse de vastes forêts dépouillées de leurs feuilles en cette fin d’hiver, je longe de petites rivières qui se terminent en grosses cascades, je monte péniblement les pentes des montagnes qui m’encerclent avant de les descendre joyeusement de l’autre côté…
Bref, je savoure de plus en plus ce voyage très nature qui m’emmène à tour de rôle sur des petites routes désertes et des sentiers perdus. Je me sens loin, tellement loin de la ville et de son bruit, de sa pollution, de son stress.
Les chutes de la rivière Zrmanja à Bilisane
Ici règnent le chant des oiseaux, les senteurs de la forêt et cette incroyable sensation de liberté. Il faut que j’en profite car dans quelque temps, à l’issue de mon congé sabbatique de six mois qui sera forcément trop court, je devrai retourner au travail chez moi à Bordeaux, en pleine ville : la paisible nature croate me manquera alors tellement…
Les chutes de la Zrmanja
A vélo, l’une de mes obligations consiste à me procurer quotidiennement de quoi manger. Aussi, peu avant de passer en Bosnie-Herzégovine, dans la petite ville croate de Sinj, je m’arrête comme souvent dans une minuscule épicerie de bord de route. J’y suis accueilli à bras ouverts par la gérante, qui est une petite femme dynamique et joviale.
Elle est sans filtre et nous plaisantons très vite comme si nous nous connaissions depuis toujours, alors que nous nous sommes rencontrés il y a trois minutes. Son humour implacable s’attaque d’emblée à mon pauvre crâne dégarni, lequel n’avait rien demandé mais je dois l’avouer, elle me fait bien rire.
Le courant passe si bien qu’elle m’offre vite de quoi me sustenter : charcuterie maison et fromage, avec morceaux de pain et petits biscuits. Ce festin est destiné à tous ses clients mais comme je suis le seul dans le magasin, elle m’oblige à me resservir plusieurs fois ! Mon estomac de cycliste toujours affamé ne se fait pas prier. Je dévaste l’assiette et je reprends la route.
Avec Ana et Milanka
Ce sera ma dernière rencontre en Croatie. La panse désormais bien remplie, je prends la direction de la Bosnie-Herzégovine toute proche mais auparavant, j’ai un dernier site à voir dans le pays : l’œil de la Terre ! Il s’agit de la source d’une rivière très connue dans le pays, la Cetina, qui se présente sous la forme d’un gigantesque trou rempli d’une eau très colorée.
L’œil de la Terre
Le coin du cycliste
Trans Dinarica : l’itinéraire de rêve pour les cyclistes
La Trans Dinarica est un itinéraire cycliste qui relie les pays des Balkans occidentaux en traversant une superbe chaîne de montagnes, les Alpes Dinariques. Ce parcours a été conçu pour permettre aux cyclo-voyageurs qui s’aventurent par là de découvrir tout le patrimoine local : naturel, culturel, gastronomique…
La Trans Dinarica en Croatie
Cet itinéraire passe par des villages, des forêts, des montagnes, ou encore par la mer. Il alterne entre routes bitumées très peu fréquentées et chemins de terre en pleine nature. Il traverse des parcs nationaux et des sites classés au patrimoine de l’humanité par l’Unesco.
Bivouac sur le parcours de la Trans Dinarica
Tout au long du parcours, on découvre l’hospitalité des habitants des Balkans ainsi que les paysages à couper le souffle de cette superbe région méconnue, en plein cœur de l’Europe. Bref, quand on roule sur la Trans Dinarica, on en prend plein les yeux et on se sent une âme d’aventurier !
Sur la Trans Dinarica, sous la pluie (Bosnie-Herzégovine)
La pépite : le site Trans Dinarica
La carte suivante montre sommairement le parcours de la Trans Dinarica (copie d’écran extraite du site Trans Dinarica).
En cliquant pays par pays, ce site propose également de nombreux itinéraires alternatifs : rejoindre le parcours depuis les grandes villes, faire des détours pour aller visiter des sites intéressants à proximité, etc.
A titre d’exemple, c’est l’un de ces détours que j’ai utilisé pour traverser l’île de Pag, qui s’est avérée l’un des plus beaux endroits visités lors de ma « Trans Europa » !
La Trans Dinarica passe par la rivière Drin (Albanie)
Pour se procurer le parcours précis ainsi que sa trace GPS, ce que j’ai fait, il suffit donc de se connecter au site officiel : Trans Dinarica.
Bien sûr, ce n’est pas gratuit mais ce n’est pas très cher non plus et surtout, cela vaut tellement le coup : si, comme moi, vous êtes un.e cycliste amoureux.se de la nature, alors le rapport qualité-prix de ces packs est carrément exceptionnel. On traverse des endroits tellement natures, isolés et sauvages sans jamais se perdre que ça vaut largement la peine, selon moi, de s’offrir ces packs.
A l’inverse, l’itinéraire de la Trans Dinarica traverse peu de villes. Aussi, si vous êtes attiré.e par les grandes métropoles, ces packs ne vous conviendront peut-être pas : privilégiez alors plutôt les itinéraires Eurovélo (lire plus bas), qui seront beaucoup plus adaptés à vos goûts citadins (capitales, monuments, musées, hébergements etc).
Pour résumer, la Trans Dinarica a plutôt tendance à fuir les zones touristiques et notamment la côte Adriatique, avec ses stations balnéaires souvent prises d’assaut, pour s’enfoncer dans les montagnes beaucoup moins fréquentées. Contrairement à Eurovélo, qui ne dévie à peu près jamais des itinéraires touristiques.
On peut se procurer le pack de la Trans Dinarica pour les huit pays à un tarif à mon avis avantageux (à partir de 90 euros), ou bien choisir un pack par pays (de 8 à 23 euros selon le pays). Le lien : se procurer le pack de navigation de la Trans Dinarica.
L’itinéraire de la Trans Dinarica (Croatie)
Remarque : au cas où vous vous posiez la question, aucun lien de ce blog n’est sponsorisé. Je ne perçois donc aucune commission, que vous cliquiez ou non !
Le long de la Trans Dinarica
En préparant votre périple à vélo, si vous vous interrogez sur la Trans Dinarica, n’hésitez pas à me poser vos questions dans la rubrique « commentaires » (votre @dresse mail ne sera pas publiée, contrairement à votre question qui le sera avec un léger décalage, généralement de quelques heures) : c’est avec plaisir que j’essaierai d’y répondre 🙂
Les itinéraires Eurovélo
Beaucoup plus connus que la Trans Dinarica encore confidentielle, les itinéraires Eurovélo ont fait leurs preuves depuis longtemps. Au nombre de dix-sept à ce jour, ils sillonnent l’Europe du Cap Nord à Malte, et de l’Irlande occidentale aux confins de l’Orient.
L’esprit est de constituer un réseau cohérent de grands itinéraires cyclables européens, en connectant les capitales et les grandes villes du continent. Le patrimoine naturel et culturel est mis en valeur tout en favorisant le tourisme durable.
Le réseau Eurovélo
Enfin, la sécurité des usagers est toujours prise en compte. Ainsi, les routes doivent être balisées et continues. Elles doivent également éviter les routes à fort trafic. Elles combinent donc pistes cyclables et routes secondaires, voire chemins balisés.
Le principal inconvénient, c’est que peu de ces routes Eurovélo sont totalement terminées.
Je suis attentivement l’évolution de certaines d’entre elles depuis cinq ans et pourtant, rien n’a bougé : elles en sont toujours au même stade (en général l’un des trois stades en rouge sur le tableau suivant) selon le site Eurovélo lui-même. Aucune évolution en cinq ans !
Percevoir les fonds européens, c’est bien, mais les utiliser pour procéder aux aménagements promis, ce serait mieux !
Les différents stades de développement des routes Eurovélo
J’enfonce un peu le clou : Eurovélo existe depuis 1995 mais trente ans plus tard (au 27 octobre 2025), une seule route est entièrement terminée ! Il s’agit de l’Eurovélo 19 : la route cyclable de la Meuse (1.050 km). Et cinq autres sont (enfin) à un état d’avancement supérieur à 90% :
Une seule route terminée en vingt ans, et cinq autres qui ne sont plus très loin de l’être, sur dix-sept routes en tout (les n° 16 et 18 n’existant pas encore), ce n’est quand même pas énorme. Bien sûr, il ne faut pas non plus cracher dans la soupe : ces dix-sept routes ont au moins le mérite d’exister, et Eurovélo reste un superbe projet pour les voyageurs à vélo.
La cohabitation vélos – voitures en Croatie
Sur mon itinéraire, la Croatie était le pays qui m’inquiétait le plus en termes de risques d’accidents de la route. Car j’avais lu de nombreux témoignages de voyageurs à vélo, sur des blogs et forums, qui disaient tous invariablement la même chose, et ça faisait peur : les Croates conduisent comme des fous, ils s’amusent à frôler les cyclistes à grande vitesse, ils doublent comme des malades tout en klaxonnant sans la moindre raison, certains font carrément des bras d’honneur en passant, etc.
Alors disons-le tout de suite : j’ai vécu exactement le contraire sur les routes croates ! En dix jours passés à rouler dans ce pays, aucun automobiliste (ni poids lourd etc.) ne m’a jamais mis en danger. Pas une seule fois.
Les automobilistes croates m’ont toujours doublé à distance très respectable. Quand il n’y avait pas la place de passer sans me frôler, ils restaient derrière moi et attendaient qu’il n’y ait plus de voiture en face pour passer, sans énervement ostensible.
C’est vrai que les grosses voitures allemandes sont très répandues en Croatie (Audi, Porsche, Mercedes, BMW…) mais pour ce que j’en ai vu, les croates en ont toujours fait un usage respectueux et sécurisé par rapport au cycliste que je suis.
Pourtant, je fais plutôt confiance à tous les témoignages évoqués plus haut. Alors pourquoi une telle différence de ressenti ?
D’une part, j’ai traversé la Croatie à vélo mi-mars, c’est-à-dire en basse saison, à une période de l’année où les locaux ne sont pas encore envahis par les nuées de cyclotouristes passant par là.
D’autre part, j’ai pédalé à l’intérieur des terres sur une bonne partie de mon itinéraire, contrairement à la plupart des voyageurs à vélo qui traversent le pays du nord au sud en longeant la côte. Là, il est possible que les locaux soient excédés l’été sur ces petites routes étroites mais très fréquentées qui les empêchent de doubler les nombreux vélos roulant au ralenti.
En tout cas, si vous avez lu les mêmes témoignages alarmistes que moi, alors un conseil : attendez d’être là-bas pour vous faire votre propre idée.
Moi, j’ai juste une chose à dire aux automobilistes croates : hvala puno (merci beaucoup) !
La Slovénie est le deuxième pays que j’ai traversé lors d’un voyage à vélo effectué en 2025 entre la France et la Grèce. Contrairement aux autres pays, le passage en Slovénie fut très court (dix-huit kilomètres seulement), donc cet article aussi !
Ce matin-là, mes premiers coups de pédales de la journée sont aussi les derniers que je donne en Italie, et une petite montée m’emmène vers le pays des ours : la Slovénie.
La frontière italo-slovène
Sitôt la frontière passée, tout seul sur cette route peu fréquentée, je fouille du regard l’épaisse forêt qui m’entoure, avec le petit espoir mais la grosse trouille d’apercevoir l’un de ces gros plantigrades.
Je repense alors à Mike Horn, qui décrivait ainsi l’odorat très développé des ours : « si je pète ici, l’ours qui est à cinquante kilomètres va le sentir »
Je m’empresse aussitôt de faire le nécessaire pour que les ursidés du coin détectent olfactivement ma présence. Peine perdue : aucun ne sortira son museau si performant du bois.
La forêt autour de la frontière italo-slovène
Sans transition, le paradoxe du jour après avoir essuyé quarante-huit heures de pluies abondantes, c’est que je n’ai plus d’eau : mes gourdes sont vides. C’est à ce moment-là que j’arrive dans mon premier village slovène, où j’aperçois autant de gens dans les rues que d’ours dans la forêt voisine.
Je me dirige donc vers le cimetière pour m’approvisionner en eau mais là, aucune goutte ne jaillit du robinet. Sans doute l’eau a-t-elle été coupée pour ne pas geler dans les canalisations pendant l’hiver ? En tout cas, c’est totalement bredouille que je remonte sur mon vélo mais il faut toujours voir le bon côté des choses : je ne l’alourdirai pas de trois kilos supplémentaires.
Dix-huit kilomètres plus loin, j’arrive déjà à une autre frontière, croate celle-là. Je ne pensais pas traverser la Slovénie aussi vite. Bilan : je n’y aurai vu aucun humain, aucun ours et aucune goutte d’eau, à part celles dégoulinant du ciel. C’est donc aussi frustré que mouillé que je quitte le pays.
Trans Dinarica : l’itinéraire de rêve pour les cyclistes
La Trans Dinarica est un itinéraire cycliste qui relie les pays des Balkans occidentaux en traversant une superbe chaîne de montagnes, les Alpes Dinariques. Ce parcours a été conçu pour permettre aux cyclo-voyageurs qui s’aventurent par là de découvrir tout le patrimoine local : naturel, culturel, gastronomique…
La Trans Dinarica en Croatie
Cet itinéraire passe par des villages, des forêts, des montagnes, ou encore par la mer. Il alterne entre routes bitumées très peu fréquentées et chemins de terre en pleine nature. Il traverse des parcs nationaux et des sites classés au patrimoine de l’humanité par l’Unesco.
Bivouac sur le parcours de la Trans Dinarica
Tout au long du parcours, on découvre l’hospitalité des habitants des Balkans ainsi que les paysages à couper le souffle de cette superbe région méconnue, en plein cœur de l’Europe. Bref, quand on roule sur la Trans Dinarica, on en prend plein les yeux et on se sent une âme d’aventurier !
Sur la Trans Dinarica, sous la pluie (Bosnie-Herzégovine)
La pépite : le site Trans Dinarica
La carte suivante montre sommairement le parcours de la Trans Dinarica (copie d’écran extraite du site Trans Dinarica).
En cliquant pays par pays, ce site propose également de nombreux itinéraires alternatifs : rejoindre le parcours depuis les grandes villes, faire des détours pour aller visiter des sites intéressants à proximité, etc.
A titre d’exemple, c’est l’un de ces détours que j’ai utilisé pour traverser l’île de Pag, qui s’est avérée l’un des plus beaux endroits visités lors de ma « Trans Europa » !
La Trans Dinarica passe par la rivière Drin (Albanie)
Pour se procurer le parcours précis ainsi que sa trace GPS, ce que j’ai fait, il suffit donc de se connecter au site officiel : Trans Dinarica.
Bien sûr, ce n’est pas gratuit mais ce n’est pas très cher non plus et surtout, cela vaut tellement le coup : si, comme moi, vous êtes un.e cycliste amoureux.se de la nature, alors le rapport qualité-prix de ces packs est carrément exceptionnel. On traverse des endroits tellement natures, isolés et sauvages sans jamais se perdre que ça vaut largement la peine, selon moi, de s’offrir ces packs.
A l’inverse, l’itinéraire de la Trans Dinarica traverse peu de villes. Aussi, si vous êtes attiré.e par les grandes métropoles, ces packs ne vous conviendront peut-être pas : privilégiez alors plutôt les itinéraires Eurovélo (lire plus bas), qui seront beaucoup plus adaptés à vos goûts citadins (capitales, monuments, musées, hébergements etc).
Pour résumer, la Trans Dinarica a plutôt tendance à fuir les zones touristiques et notamment la côte Adriatique, avec ses stations balnéaires souvent prises d’assaut, pour s’enfoncer dans les montagnes beaucoup moins fréquentées. Contrairement à Eurovélo, qui ne dévie à peu près jamais des itinéraires touristiques.
On peut se procurer le pack de la Trans Dinarica pour les huit pays à un tarif à mon avis avantageux (à partir de 90 euros), ou bien choisir un pack par pays (de 8 à 23 euros selon le pays). Le lien : se procurer le pack de navigation de la Trans Dinarica.
L’itinéraire de la Trans Dinarica (Croatie)
Remarque : au cas où vous vous posiez la question, aucun lien de ce blog n’est sponsorisé. Je ne perçois donc aucune commission, que vous cliquiez ou non !
Le long de la Trans Dinarica
En préparant votre périple à vélo, si vous vous interrogez sur la Trans Dinarica, n’hésitez pas à me poser vos questions dans la rubrique « commentaires » (votre @dresse mail ne sera pas publiée, contrairement à votre question qui le sera avec un léger décalage, généralement de quelques heures) : c’est avec plaisir que j’essaierai d’y répondre 🙂
Les itinéraires Eurovélo
Beaucoup plus connus que la Trans Dinarica encore confidentielle, les itinéraires Eurovélo ont fait leurs preuves depuis longtemps. Au nombre de dix-sept à ce jour, ils sillonnent l’Europe du Cap Nord à Malte, et de l’Irlande occidentale aux confins de l’Orient.
L’esprit est de constituer un réseau cohérent de grands itinéraires cyclables européens, en connectant les capitales et les grandes villes du continent. Le patrimoine naturel et culturel est mis en valeur tout en favorisant le tourisme durable.
Le réseau Eurovélo
Enfin, la sécurité des usagers est toujours prise en compte. Ainsi, les routes doivent être balisées et continues. Elles doivent également éviter les routes à fort trafic. Elles combinent donc pistes cyclables et routes secondaires, voire chemins balisés.
Le principal inconvénient, c’est que peu de ces routes Eurovélo sont totalement terminées.
Je suis attentivement l’évolution de certaines d’entre elles depuis cinq ans et pourtant, rien n’a bougé : elles en sont toujours au même stade (en général l’un des trois stades en rouge sur le tableau suivant) selon le site Eurovélo lui-même. Aucune évolution en cinq ans !
Percevoir les fonds européens, c’est bien, mais les utiliser pour procéder aux aménagements promis, ce serait mieux !
Les différents stades de développement des routes Eurovélo
J’enfonce un peu le clou : Eurovélo existe depuis 1995 mais trente ans plus tard (au 27 octobre 2025), une seule route est entièrement terminée ! Il s’agit de l’Eurovélo 19 : la route cyclable de la Meuse (1.050 km). Et cinq autres sont (enfin) à un état d’avancement supérieur à 90% :
Une seule route terminée en vingt ans, et cinq autres qui ne sont plus très loin de l’être, sur dix-sept routes en tout (les n° 16 et 18 n’existant pas encore), ce n’est quand même pas énorme. Bien sûr, il ne faut pas non plus cracher dans la soupe : ces dix-sept routes ont au moins le mérite d’exister, et Eurovélo reste un superbe projet pour les voyageurs à vélo.